Décidément, la baisse des prix des médicaments n'aura pas fini de faire des vagues. Après les pharmaciens, c'est au tour des laboratoires pharmaceutiques de monter au créneau. Réunis dans le cadre associatif Maroc Innovation et Santé (MIS), les laboratoires affiliés aux multinationales font volte-face pour appeler le ministère de la Santé à plus de rigueur et à la mise en place de mesures d'accompagnement. Cette prise de position est d'autant plus surprenante que ces mêmes organismes avaient en septembre dernier, signé avec le ministère de tutelle, la convention prévoyant la baisse des prix de près de 400 médicaments en vente sur le marché marocain. Dans leur plaidoyer, les professionnels des produits pharmaceutiques revendiquent clairement un «cadre règlementaire officiel dans lequel figureront les nouvelles tarifications pour les spécialités pharmaceutiques déjà commercialisées». Les derniers s'estiment alors les plus lésés par ces nouvelles mesures, qui ne respecteraient pas le cadre légal régissant la fixation des prix des médicaments. C'est dans ce sens que la réaction des laboratoires rejoint alors celle des pharmaciens (www.lesechos.ma) qui avaient, la semaine dernière, mis l'accent sur la méthode préalable à la mise en place de cette mesure. D'un point de vue technique, la fixation des prix repose sur une base Benchmark dans un certain nombre de pays de référence. Cependant, les revendications des laboratoires diffèrent de celles des officinaux sur de nombreux points et surtout sur le fond. Ne remettant pas en cause la mesure en tant que telle, les laboratoires internationaux font preuve de prévoyance en réclamant un cadre légal et officiel bien défini, qui encadrera la mise en œuvre des nouveaux prix. Dans le même ordre d'idées, ces derniers attendent du ministère de tutelle une base de prix ainsi qu'une fréquence qui leur permettent d'avoir plus de visibilité sur leurs marchés : «Nos organisations actuelles, nos investissements et structures industrielles reposent essentiellement sur des équilibres financiers qui seraient profondément remis en cause si nos accords devaient être revus de manière non concertée». En ordre de bataille Outre la revendication d'un cadre règlementaire et d'une garantie de méthodologie de fixation des prix rigoureuse, les laboratoires semblent s'être mis en ordre de bataille pour assurer la bonne marche de leur activité. Pour ces derniers, la mise en œuvre de la nouvelle mesure sur le terrain devra prendre en ligne de compte un certain nombre de considérations logistiques et organisationnelles, de telle sorte à ne pas bouleverser l'équilibre du processus de commercialisation. Plus concrètement, la lettre adressée au ministère de la Santé stipule clairement que «le délais d'application des baisses des prix devra prendre en considération aussi bien les stocks dans nos magasins que chez les grossistes». L'ensemble des stocks doivent donc être épuisés et les produits en circulation sur le marché ne doivent «en aucun cas» être retournés. Sur ce point, les normes internationales viennent se mêler des revendications nationales dans le sens où ces mêmes organismes sont soumis à des règlementations internationales draconiennes, qui en cas de retour de produits non vendus les soumettent à des pertes sèches entraînées par la destruction de ces mêmes produits non écoulés sur le marché. Enfin, pour optimiser leur démarche, les laboratoires brandissent la menace de «rupture de stock», qui résulterait d'une nouvelle organisation du système de distribution visant à introduire sur le marché une quantité minimale de produits pour éviter tout retour de médicaments non écoulés. Une nouvelle régulation qui pourrait bien induire l'effet inverse de celui initialement visé par le ministère de tutelle, à savoir l'accessibilité du médicaments pour tous. Voilà une mesure qui, sans un suivi rigoureux peut présenter de nombreux effets non désirables... En attendant, le ministre El Hossein El Ouardi tente de rassurer les professionnels en annonçant de nouvelles mesures complémentaires qui accompagneraient cette baisse des prix.