Le projet de loi sur l'administration électronique va enfin voir le bout du tunnel. Il était fin prêt, rappelons-le, en mai 2019 et déposé au Secrétariat général du gouvernement (SGG). Mais un an après, il est toujours au point mort. Selon nos sources, il vient d'être rediscuté par le ministère de l'Industrie, du commerce et de l'économie verte et numérique et le département de la Réforme de l'administration pour activer son processus d'adoption. Il devrait bientôt être programmé au Conseil de gouvernement, comme l'assure notre source. Incontournable dans la mise en œuvre du chantier de la transformation numérique de l'administration publique, le texte est attendu depuis des années. Il permettra d'édicter de nouvelles règles pour instaurer les e-services administratifs en se basant sur une nouvelle ingénierie des mesures et procédures et l'ouverture de l'échange des données dans le cadre d'une approche complémentaire. L'adoption de ce projet de loi s'impose pour pouvoir, entre autres, concrétiser la généralisation de la transformation numérique et mettre en œuvre les dispositions du texte sur la simplification des démarches administratives qui a franchi le cap du Parlement en février dernier. Ce texte stipule la nécessité pour les administrations de s'échanger les informations par voie électronique. Dans la conjoncture actuelle marquée par le confinement et le télétravail, l'accélération de l'adoption du projet de l'administration numérique s'avère être une nécessité en vue de réglementer les échanges électroniques entre administrations et de mettre en place le cadre réglementaire tant escompté. Ce n'est en effet que par le biais de la législation qu'on peut réduire la fracture numérique entre les administrations qui ne cessent de grandir. Alors que certaines administrations ont franchi des étapes importantes dans leur digitalisation et que leurs efforts ont permis de simplifier les procédures administratives au profit des usagers, d'autres ont du mal à remonter la pente. Pis encore, certaines administrations sont réticentes au changement. Il faut dire que le passage à l'administration électronique ne peut avoir lieu sans un texte contraignant. Gateway : un retard abyssal Au niveau technique et opérationnel, la généralisation de la «Gateway» gouvernementale, qui sera le guichet unique des services publics, permettra de faciliter la mission des usagers. Annoncée depuis des années, cette plateforme va permettre aux citoyens et entreprises de s'adresser uniquement à l'administration responsable du service demandé qui a pour mission de demander aux autres administrations les informations nécessaires à l'accomplissement de ce service. Lancé en 2014, ce projet est certes très ambitieux, mais il a accusé d'importants retards et est toujours en phase pilote, comme le relève l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans sa dernière revue sur les principes d'administration publique. Pour faire de la Gateway la plateforme unique d'échanges de données, il est urgent, d'après l'OCDE, «de lui donner rapidement une assise solide en levant les obstacles juridiques, techniques et opérationnels, et en clarifiant les responsabilités respectives». Sur le plan juridique, la mise en place de cette plateforme devra se faire par décret. La généralisation de la Gateway gouvernementale permettra non seulement de faciliter les démarches administratives pour les usagers, mais aussi de développer la coordination entre les différentes administrations et de donner, ainsi, un véritable coup de fouet au rendement des services publics. Pour y arriver, il faut lancer une véritable politique d'ouverture des données. Il s'agit aussi de contribuer aux actions de lutte contre la corruption. En effet, la lourdeur des procédures administratives et la bureaucratie sont un terreau fertile pour la corruption. La digitalisation des services administratifs permettra de limiter le contact entre les usagers et les agents publics. Par ailleurs, le financement est un volet important qui devra être pris en considération dans la stratégie de transformation numérique de l'administration. La digitalisation a en effet un coût financier considérable surtout pour certaines administrations qui n'ont pas de budget dédié à cette fin et qui recourent massivement à l'usage du papier. Parfois, ce n'est pas la volonté qui manque pour basculer à l'ère numérique, mais plutôt les moyens tant humains que matériels. Soulignons à cet égard que le chef du gouvernement vient d'annoncer que la transformation numérique figure désormais parmi les chantiers prioritaires. Ainsi, des financements supplémentaires vont visiblement être consacrés à ce chantier dans le cadre de loi de Finances rectificative qui est en vue.