Un marché estimé à 250.000 salariés temporaires, «dont 150.000 qui ne passent par aucune société d'intérim» (temporaires directs au sein des entreprises), soit au total 2,2% de l'emploi salarié, 7 MMDH de chiffre d'affaires, 3,33 MMDH «d'entrées potentielles pour l'Etat» (1,35 MMDH au titre de la TVA, 58 MDH pour l'IS, 1,3 MMDH pour la CNSS et 620 MDH pour l'IR). Les chiffres du secteur du travail temporaire sont éloquents. Pourtant, la réalité du secteur est moribonde. En témoignent la série de scandales et de mouvements sociaux qui ont marqué récemment l'actualité de «certaines entreprises peu scrupuleuses en matière de respect des droit des travailleurs temporaires», note Jamal Belahrach. En président de la Fédération nationale des entreprises de travail temporaire (FNETT), ce dernier sort les chiffres non pas pour appâter l'Etat, mais pour le rappeler à ses responsabilités. C'est ains qu'il a réuni la presse vendredi dernier pour exposer les «30 propositions visant à organiser le travail temporaire» concoctées par sa fédération pour les mettre en débat avec la CGEM, les partenaires sociaux et le ministère de l'Emploi. L'objectif étant de créer un cadre juridique plus large, plus claire, mais surtout plus flexible, incitant ainsi les entreprises «utilisatrices» à moins contourner la loi. Eliminer le flou. Dans le secteur du travail temporaire, il semblerait qu'il n'y ait que les «mauvaises» pratiques qui se soient développées depuis 2004. Le cadre juridique étant resté le même depuis l'introduction du travail temporaire dans le Code du travail en 2004. Pour y remédier, Belahrach et sa fédération présentent leurs solutions «pour faire évoluer la législation», figée à la fois par les textes de loi eux-mêmes, et par les pouvoirs publics. Cet effort de proposition concourt à la réalisation de cinq objectifs majeurs. Le premier renvoie à «la définition de l'entreprise de travail temporaire» (ETT) elle-même. Il vise ainsi à remplacer, dans l'article de loi 488, la dénomination «agence de recrutement privée», terme générique et donc prêtant à confusion celle d'«entreprise de travail temporaire», et de la rajouter dans tous les autres articles où elle n'est pas mentionnée (art. 482, art. 483). Une autre précision est introduite au sujet de la caution déposée par les ETT auprès de la CDG, en vue d'obtenir une autorisation. De simple caution, sans autres précisions, la FNETT propose d'en faire une «caution bancaire». Et pour cause, les ETT, devant s'acquitter de près de «50 fois la valeur globale annuelle du salaire minimum global», peinent pour les plus petites d'entre elles à se conformer à cette exigence. La FNETT exige également qu'il soit demandé aux ETT de fournir «le numéro d'immatriculation à la CNSS» pour obtenir une autorisation. De précisions en précisions Au niveau des motifs de recours au travail temporaire, il est proposé d'élargir le champ d'application de la loi, au delà des motifs existants à ce jour que sont le remplacement d'une absence, l'augmentation de l'activité et le travail saisonnier, aux cas d'«ouverture d'une entreprise pour la première fois ou d'un nouvel établissement au sein de l'entreprise, le lancement d'un nouveau produit pour la première fois, les travaux de chantiers, la gestion déléguée de service public» et «les missions limitées dans le temps». Les durées de 3 et 6 mois valables jusqu'à aujourd'hui devraient, selon Belahrach, être adaptées directement à la nature et à la durée réelle de l'activité, pour laquelle le travail temporaire est requis (voir tableau). Là en effet, où l'accroissement temporaire de l'activité donnait lieu à un contrat de 3 mois renouvelable, la FNETT se propose de le corréler à la «durée effective de l'accroissement» de l'activité. il s'agit aussi d'ajouter, au niveau de l'article 502, relatif aux 3 durées légales prévues auparavant, la précision qu'«au delà de cette période, la société utilisatrice ne pourrait provoquer une fin de mission, sauf en cas de faute grave ou professionnelle», remédiant ainsi à un vide juridique préjudiciable. D'autres précisions sont évoquées au niveau de l'article 504, sur les droits sociaux des travailleurs temporaires, et visent, dans l'ensemble à affiner le texte pour définir les droits et les obligations de chacune des trois parties, travailleur, entreprise de travail temporaire et entreprise utilisatrice. Flexibilité, prochain chantier de la FNETT Le non respect du droit des travailleurs temporaires n'est pas une question nouvelle. Et le travail de proposition des fédérations et de la FNETT non plus. Le dernier en date, remonte à un an où Belahrach et sa Fédération ont fait «passer», par le biais du groupe socialiste au Parlement, leurs suggestions et doléances pour un éventuel débat au sein de l'Hémicycle. Le texte a été mis en veille, subordonné qu'il fût au changement constitutionnel et législatif de fin d'année dernière. «Nous avons contacté récemment un des députés du groupe, qui nous a confirmé que le texte sera à nouveau remis sur le tapis», relate Belahrach. Ce dernier ne s'arrête pas là. À la rentrée, au mois de septembre, il entend, avec sa fédération, élargir le débat à la question de «la flexibilité». Des propositions seront alors faites au pouvoir Exécutif actuel pour, explique-t-il, une «amélioration du marché du travail marocain nécessaire pour le soutien et l'attractivité des investissements», notamment étrangers.