Après juillet 2011 et décembre 2011, le SMIG dans le secteur textile marque le point de sa troisième phase de revalorisation, depuis hier, 1er juillet 2012. Mais ce n'est pas là la seule actualité de ce secteur. À un niveau plus stratégique, le ministre du Commerce, Abdelkader Aâmara, annonce le lancement d'une étude pour le repositionnement du secteur. Intitulée «une vision pour le textile du Maroc à l'horizon 2025», cette étude devrait permettre, selon le ministre, de «donner plus de visibilité sur les tendances lourdes des marchés et d'éclaircir les décideurs sur les enjeux actuels et les défis pour le futur». En pratique, il s'agit d'élargir les marchés cibles du secteur à des clients autres qu'européens, vu la contraction de la demande en Europe depuis l'éclatement de la crise financière, et ensuite des dettes souveraines, en 2008 et 2011. Lancer des études sur les secteurs exportateurs semble être une technique plébiscitée par le ministre du Commerce, de l'industrie et des nouvelles technologies. Dans un entretien publié sur nos colonnes à l'occasion de la Caravane de l'export dans son étape burkinabaise, Aâmara faisait état de sa préoccupation, dès son arrivée au ministère, «d'évaluer tout ce qui a été fait», de manière à «s'orienter là où le bilan est le plus intéressant». Dans le domaine du textile, cette tâche semble avoir été confiée à l'Association marocaine des industries du textile et de l'habillement (AMITH), dans le cadre de l'institution d'une cellule de veille. Son rôle: suivre de près l'évolution du secteur et les tendances actuelles et futures. Cela permettra sur le court terme de mieux faire face aux soubresauts des économies des pays importateurs, et sur un plus long terme, d'envisager de nouvelles pistes de repositionnement du secteur. Cependant, et pour ce faire, le secteur se doit de passer le cap de la productivité vers une compétitivité qui lui permettrait de gagner de nouvelles parts de marché, grignotées ces dernières années par les deux géants que sont la Turquie et la Chine, notamment en Afrique et en Europe. C'est d'ailleurs sur ce dernier marché que les exportations marocaines dégringolent sérieusement. Et pour cause, l'Europe en crise est le premier marché à l'export du Maroc dans le domaine du textile. Davantage, sur ce marché en particulier, deux pays, l'Espagne et la France, à la diète pour le premier, dans une sorte de «rigueur de gauche» pour le second, s'accaparent à eux seuls plus de 74% des exportations marocaines d'habillement. Europe, quand tu nous tiens ! Cette dépendance malheureuse en temps de crise du secteur du marché européen se traduit, dans les faits, par une baisse significative des parts de marché du Maroc depuis 2008. La part de marché du Maroc passe de 4,4% en 2007 à 4% en 2008, peinant ensuite à se redresser, puisqu'à fin 2011, rapporte l'Institut Français de la Mode (IMF), elle se rapproche nettement du seuil de 3% (3,2%). Seules en effet la Chine et la Turquie sont arrivées à augmenter leurs parts de marché sur cette même période, qui passent ainsi respectivement de 37,7 et 7,6% en 2007 à 43,9% et 11,1% en 2011. Et pour cause, plus que productive, leur industrie textile est structurellement compétitive. Sur cette question de la compétitivité, le ministre Aâmara est conscient des enjeux et des défis à relever par le secteur textile. Crise européenne ou non, ce qui préoccupe Aâmara, ce sont principalement tous les accords de libre-échange signés par le Maroc, et qui ne sont pas pour certains, «à l'avantage» du Maroc. Cependant, relève ce dernier, «ils ont l'avantage de susciter des interrogations au niveau de (nos) entreprises, dans le textile notamment». Plus que les autres secteurs, le ministre reconnaît ainsi l'état de dégradation de l'industrie textile nationale. Il ne s'agira pas alors d'une simple étude d'appréciation de l'évolution du secteur, mais d'une étude de refondation d'une industrie qui contribue à hauteur de 4% du PIB et 38% des emplois, comme le note le rapport de l'IMF, publié début juin. D'où la nécessité donc de rechercher de nouveaux relais de croissance. Aux dires de tous les observateurs, nationaux comme internationaux, la bouffée d'air viendrait du marché local, mais vu la taille de ce dernier, et les ambitions du ministre, il y a fort à parier que de nouveaux marchés à l'export seront sérieusement sondés, quitte à ce que le ministre prenne les risques qui s'imposent, comme il semblait apprécier ceux pris, quelques années auparavant à l'endroit du marché américain, lors de la conclusion de l'accord de libre-échange avec les USA. En attendant, le ministre lancera un programme de modernisation des PME, en sus de l'octroi d'aide financière à l'investissement, notamment sur les niches à forte valeur ajoutée.