Les syndicats divisés ? La question, posée par les plus pessimistes du mouvement ouvrier, devient une réalité palpable à l'heure où la CDT et la FDT ont décidé de se détacher des autres centrales pour battre le pavé. Dans l'attente du round du dialogue social de septembre prochain, les deux centrales ont en effet décidé de descendre dans la rue pour faire entendre leurs revendications, et ce après avoir boycotté les réunions qui ont mis aux prises tout au long de la semaine, le département de tutelle avec l'UMT, l'UGTM et l'UNTM. La marche, des deux centrales dissidentes, se fera en fait sur fond de désaccord profond avec le gouvernement notamment sur les questions du droit de grève et des libertés syndicales. Toutefois, les revendications des centrales ne s'arrêtent pas là. Elles englobent notamment la couverture sociale et la hausse des salaires. Deux grandes priorités qu'elles entendent inscrire à l'ordre du jour du dialogue, avec les deux autres partenaires sociaux. L'accélération du processus d'adoption de la nouvelle loi sur les allocations pour perte d'emploi, ainsi que la présence des représentations syndicales dans le tissu productif privé, forment la deuxième grille des demandes urgentes à satisfaire pour les deux centrales. En outre, les demandes d'accès au logement social pour certaines catégories de salariés n'ayant pas été couvertes par les conventions étatiques signées, sont également réitérées. Il s'agit notamment des salariés des secteurs de l'enseignement, de la santé et des fonctionnaires des collectivités territoriales. Les autres demandes restées en suspens, et actuellement reconduites aussi par les syndicats, concernent la politique fiscale de l'Etat. Une demande d'exonération totale des tranches au dessous de 36.000 dirhams, ainsi que la réduction de 2 points de l'IR sur toutes les tranches, ont été formulées en doléances. Par ailleurs, le devoir de contrôle qui incombe au département de Souhail, ciblera, cette année, essentiellement la lutte contre le travail des enfants et l'établissement d'une liste des secteurs d'activités qui emploient des mineurs par circonscription du travail. Les inspections du Travail se focaliseront aussi sur l'octroi des autorisations accordées aux entreprises de l'emploi temporaire, dont 20 sont actuellement reconnues et opèrent encore «clandestinement» sur le marché. Plusieurs actions pour prévenir en amont les conflits collectifs du travail, forment pour leur part les principales mesures destinées à la sauvegarde de l'emploi. Faibles retours de la convention collective Le faible rendement du conseil de la convention collective, durant l'année 2011 ainsi que les obstacles insurmontables se dressant devant la médecine et l'hygiène dans les lieux de travail inquiètent aussi les syndicats. Une nouvelle réflexion qui tend à converger les actions des différentes structures publiques spécialisées, sans oublier la redynamisation du Conseil supérieur de la promotion du travail, est en gestation. Le conseil est resté en effet prisonnier de la logique post-crise qui a relégué la question des relations professionnelles au second plan. Les revendications à clamer ce dimanche par les représentants syndicaux de la CDT et de la FDT sont donc nombreuses et pour la plupart partagées par les autres centrales. Sauf que ces dernières ont choisi de ne pas rompre le fil des négociations avec l'exécutif. Même si le bilan des réunions qui ont eu lieu durant cette semaine n'est pas fameux. C'est le cas notamment sur le dossier de la loi sur la grève qui bloque toujours. L'UMT est toujours sceptique vis-à-vis de la mouture finale proposée et acceptée par l'UGTM et l'UNTM. «Des comités spéciaux ont été mis en place pour le suivi de l'exécution des accords de 2011», explique le document conjoint établi par le département de l'Emploi et les 3 syndicats avant de préciser : «Les questions sectorielles soulevées par les syndicats feront l'objet de réunions programmées avec les opérateurs concernés». Pas de rupture donc ceux qui ont participé aux réunions. A contrario, le département de l'Emploi n'a pas de la visibilité sur le calendrier des prochaines réunions avec la FDT et la CDT. Larbi Habchi, Conseiller et membre du bureau central de la FDT : «L'Exécutif doit donner des signaux forts» Les Echos quotidien : Pourquoi la FDT n'at- elle pas participé jusqu'à présent aux réunions qui ont été programmées par le département de tutelle cette semaine ? Larbi Habchi : Nous avons constaté un laxisme volontaire dans le respect des engagements déjà pris par le gouvernement. Le dialogue social dans ces circonstances est infructueux. Je rappelle que le 1er-Mai fut «blanc», y compris pour les décisions qui ne demandent pas le moindre centime de l'Etat. Comme quoi, par exemple ? Je pense essentiellement aux engagements déjà signés le 26 avril 2011, comme la suppression de l'article 288 du code pénal sur la base duquel les syndicalistes sont punis d'une peine d'emprisonnement, mais aussi à la convention internationale sur les libertés syndicales au sein des entreprises. Il y a plusieurs entreprises et secteurs publics où il n'existe pratiquement pas de dialogue social. Les cas d'IAM, de l'ONE, de l'OFPPT sont les plus frappants. Quelle suite donner à cette marche du dimanche ? C'est le gouvernement qui doit en principe réfléchir à cette question. Nous sommes des syndicats responsables, qui ont le droit et le devoir constitutionnel d'encadrer et de représenter les citoyens. Le président du gouvernement doit donner des signaux forts toujours attendus par les syndicats. Nous appelons à ce que la question sociale soitla clé de voute de la stratégie du gouvernement.