Un long épisode prend fin avec le vote de la loi de Finances 2012 par l'instance présidée par Biadillah. Le gouvernement s'apprête enfin de tourner la page d'un Budget qui porte l'empreinte du gouvernement sortant et dont le gouvernement Benkirane n'avait pas d'autre choix que d'en assumer la paternité. Le projet est difficilement passé au sein de la seconde Chambre, avec 38 conseillers qui ont été partagés entre le non et l'abstention. Pour obtenir un vote positif, le gouvernement a été intransigeant vis-à-vis de certaines propositions, comme celle relative à l'impôt sur la fortune qui a été rejetée, alors qu'au total 11 amendements émanant des groupes de l'opposition ont été retenus. L'exonération de taxes pour certaines catégories de médicaments ainsi que celle à la création d'opportunités d'emploi n'ont pas été acceptées. Nizar Baraka, ministre de l'Economie et des finances, a refusé pour sa part d'adhérer à la thèse de l'année budgétaire blanche : «D'après les chiffres et les indicateurs de réalisation, nous ne vivons pas une année blanche. Les ressources de l'Etat générées essentiellement par l'IS ne seront pas impactées, car elles seront calculées sur les bénéfices de 2011», a insisté l'argentier du pays à l'issue des interventions des partis pour motiver leur vote. Le montant récupéré à ce titre a atteint 1 MMDH à fin avril 2012, soit une hausse de 3%. Durant les quatre premiers mois de cette année, les recettes en provenance de la TVA n'affichent pas de signes inquiétants, grâce «aux dotations qui ont été réservées à la Caisse de compensation et pour le dialogue social, qui ne vont pas ralentir la consommation des ménages», a expliqué Baraka. Le vote définitif du projet, qui doit intervenir dans les jours qui viennent, va permettre au gouvernement de passer très vite à la nouvelle étape : la nouvelle loi organique de Finances. Les deux Chambres comptent coordonner leurs actions durant cette seconde moitié du mois de mai pour arriver à un terrain d'entente sur les nouvelles règles du vote de la loi de Finances, lesquelles dépendront de la compétence exclusive de la Chambre des représentants. Pour leur part, les partis de l'opposition au sein de la seconde Chambre n'ont pas dérogé au vote qui a eu lieu au sein de la première Chambre, avec un vote négatif du PAM, de l'UC et du groupe fédéral, au moment où les conseillers du RNI ont opté pour les bras croisés : «Nous n'avons pas voulu entrer dans les détails de la loi des finances 2012, car nous estimons que le gouvernement n'a pas accordé au projet le volontarisme qu'il devait y investir», souligne Driss Radi, le président du groupe de l'UC . «Au lieu de cela, le gouvernement a versé dans le populisme». Le même reproche de manque d'audace a été adressé par le groupe socialiste. Zoubida Bouayad, le leader du parti de la rose a fustigé le temps perdu «pour un projet ordinaire qui est resté loin des promesses électorales», a-t-elle souligné avant le vote de la loi de Finances 2012, l'ultime budget à avoir été voté par la Chambre des conseillers. Le rapport de la commission spécialisée au sein de la seconde Chambre montre pour sa part que la Fédération démocratique du travail a réussi à faire passer la proposition sur les exonérations des ventes immobilières de 100.000 à 140.000 DH. La loi organique de Finances au menu C'est demain que les groupes parlementaires se réuniront pour la première fois autour de la nouvelle loi organique des Finances. Les députés ont opté d'abord pour une journée d'étude qui se focalisera sur les droits à l'information pour les députés. Plusieurs groupes de l'opposition au sein des deux Chambres ont dénoncé l'absence des documents connexes que le Budget 2012 devrait présenter aux élus. Hakim Benchamasse, président du groupe du PAM pense que «le gouvernement n'a pas tenu à respecter le devoir d'information du Parlement en omettant de présenter les documents qui ont été demandés». Le projet de réforme de la loi organique a été élaboré par un comité de travail interne au ministère de l'Economie et des finances, avec l'assistance d'experts de l'Union européenne. Objectif de cette journée, selon un député de la majorité : «renforcer le rôle du contrôle du Parlement sur l'action du gouvernement par l'enrichissement qualitatif de l'information sur la loi de finances, communiquée au Parlement, et par l'orientation du débat parlementaire davantage vers la performance du budget et ses retombées sur la qualité de vie des citoyens». L'adaptation du dispositif budgétaire pour accompagner la nouvelle dynamique de régionalisation sera l'un des grands enjeux de cette réforme sur laquelle le gouvernement s'est engagé dans son plan législatif pour 2012. En attendant le vote final Si le projet de loi de Finances a traversé les deux phases cruciales de son parcours législatif, il reste encore quelques étapes avant l'entrée en vigueur effective des nouvelles dispositions. C'est la Chambre des représentants qui statuera, en dernier ressort, comme le stipule dans pareil cas la Constitution dans son article 84 : «la Chambre des représentants adopte en dernier ressort le texte examiné». Une étape qui s'annonce comme une simple formalité pour le gouvernement qui dispose de la majorité. Baraka et El Azami peuvent donc réellement pousser un «ouf» de soulagement surtout en vertu des nouvelles dispositions de la Constitution. Avec l'ancienne, il aurait fallut recourir à «la navette» et sûrement, à la commission paritaire. Ce qui aurait pu étendre la durée de l'examen parlementaire du projet. Pour la seconde et dernière lecture, le gouvernement a également, la possibilité de faire accélérer la procédure. Selon l'article 83 de la Constitution, «si le gouvernement le demande, la Chambre saisie du texte en discussion, se prononce par un seul vote sur tout ou partie de celui-ci, en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le gouvernement». Reste que l'opposition au niveau de la seconde Chambre compte saisir, le cas échéant, le Conseil constitutionnel pour statuer sur ce qu'elle considère comme une violation de son droit, à la suite du rejet de l'amendement relatif à un impôt sur la fortune (ISF) proposé par le groupe FDT et soutenu par l'USFP. Une manœuvre politique destinée plutôt à retarder l'entrée en vigueur de la loi de Finances, même si Baraka n'a cessé de clamer que l'exercice budgétaire se déroulerait «normalement».