La politique du groupe OCP en matière de gestion de l'eau est à ce point stratégique et donc ambitieuse qu'elle ne coule pas vraiment de source. Elle nécessite en effet des investissements d'envergure, ce à quoi l'Agence française de développement propose de participer. L'évènement a eu lieu hier, en milieu de journée au siège de l'OCP, où Mostafa Terrab, PDG du groupe marocain, Charles Fries, ambassadeur de France au Maroc et Joël Daligault, directeur de l'AFD, ont pris part conjointement à la signature d'une convention, portant sur une enveloppe de 237 M$. De l'écologie à l'industrie pure, l'OCP n'oublie pas ses investissements productifs et a concrétisé le jour même, la signature d'une autre convention de prêt, avec cette fois-ci, la Banque africaine de développement (BAD), pour un montant de 250 M$. Toute compétitivité internationale nécessitant une modernisation des infrastructures de production, l'OCP compte mettre sur pieds un nouveau «Jorf Phosphate Hub destiné à accueillir de nouvelles unités de fabrication de produits phosphatés à des coûts compétitifs», en l'occurrence l'acide phosphorique et les engrais. Le transfert du phosphate vers ces nouvelles unités, devrait se faire au travers d'un pipeline direct entre le site d'extraction de Khouribga et les unités de production sises, à Jorf Lasfar. La nouveauté réside dans l'ingéniosité du procédé d'alimentation, qui devrait permettra à la fois, d'«alimenter la plateforme de Jorf Lasfar» en minerai, «tout en optimisant l'utilisation des ressources hydriques et énergétiques». En récupérant ainsi la vapeur dégagée par les unités de production d'acide sulfurique, l'OCP entend «couvrir la totalité des besoins énergétiques de la plateforme», alimenter l'unité de dessalement et dégager même un surplus. La croissance verte, une stratégie à part entière «Le prêt financera en partie les usines de dessalement prévues à Jorf Lasfar et Safi, les stations d'épuration d'eau de Khouribga, Youssoufia et Ben Guérir», ainsi que «les systèmes d'adduction et de distribution d'eau», indique le management du groupe, au sujet du prêt accordé par la BAD. Les deux usines de dessalement de Jorf Lasfar et Safi auront une capacité respective de 75 et 25 millions de m3/an. Cependant, alors que celle de Safi, dont la mise en service est prévue pour 2015, sera dédiée entièrement à la satisfaction des besoins en eau de l'OCP, l'usine de Jorf Lasfar devrait, elle, couvrir à hauteur de 15 millions de m3/an, ceux de la collectivité. Auprès de l'OCP, l'accent est mis particulièrement sur le fait que l'énergie nécessaire au fonctionnement des deux usines sera «puisée dans l'excédent énergétique au niveau des unités de productions chimiques» du groupe. Pour l'usine de dessalement de Jorf Lasfar, la mise en service se fera en trois temps, 2013, 2015 et 2020. Outre ses effets sur «la sauvegarde des ressources en eau» aux environs des sites de production, ce projet devrait permettre la création de 250.000 jours/hommes lors de la phase de construction et «80 permanents» lors de la phase d'exploitation, sans oublier bien entendu, «la maîtrise des métiers de l'eau», qui devrait venir compléter l'expertise du groupe dans ce domaine, acquise à Laâyoune. «Notre intention n'est pas d'intégrer quelques éléments écologiques à notre stratégie globale, mais de faire de nos préoccupations environnementales, une politique stratégique à part entière», explique Terrab. L'OCP, un mastodonte de niveau international, s'apprête t-il à lancer les premiers jalons de l'écologie industrielle au Maroc ? En tout cas, le groupe ne se limitera pas à dessaler l'eau de mer pour satisfaire ses besoins en eau. Il semble s'être doté d'une politique intégrée en matière de gestion de l'eau. En témoigne le programme d'adduction des eaux de barrage, consacré à la satisfaction des besoins industriels en eaux des trois sites miniers du groupe. Deux barrages seront ainsi investis par l'OCP pour le transfert des eaux de surface. Celui d'Aït-Messaoud, d'une capacité de 45 millions de m3/an, destiné aux installations industrielles de Khouribga et le barrage d'Al-Massira, d'une capacité de 18 millions de m3/an et qui est dédié, lui, aux installations de Gantour (Benguérir et Youssoufia). L'objectif étant de préserver les eaux de la nappe phréatique de Tadla dans le cas de Khouribga et Bahira pour les installations de Gantour. Dessalement, adduction de l'eau, reste alors le programme d'épuration des eaux usées, un projet sur 3 sites hautement technologiques. Toujours à Khouribga, Benguérir et Youssoufia, ce programme passera par la «réalisation de trois stations» dédiées, pour une capacité de 10 millions de m3/an. Dans le cas de Benguérir, une partie de l'eau épurée servira à l'arrosage des espaces verts de la future ville verte Mohammed VI.