C'est la énième fois depuis l'investiture du gouvernement Benkirane que le ministre de la Communication, Mustapha El Khalfi crée l'événement. Après avoir annoncé en grande pompe le contenu des nouveaux cahiers des charges de la SNRT et de Soread- 2M fin mars, le voilà qui s'attaque cette fois-ci, au secteur cinématographique et audiovisuel. Mercredi à Rabat, sa présence était très attendue à l'ouverture de la conférence du programme Euromed Audiovisuel III, organisé par l'Union européenne. Adoption de la loi de finances au Parlement oblige, il s'est désisté à la dernière minute. C'est Mohamed Belghouat, un vieux routier du ministère de la Communication et directeur des études et du développement, qui a présenté les grandes lignes de la «stratégie» du ministre PJDiste, pour développer le secteur. Premier constat : le ministère a réponse ou plutôt solution à tout problème. On apprend ainsi que les salles de cinéma existantes seront rénovées et numérisées. D'autres seront construites prochainement. Le piratage sera éradiqué, les ressources humaines seront bien formées, le produit national sera promu et le secteur sera doté d'un cadre législatif, mettant fin à l'anarchie qui règne depuis toujours. D'ailleurs un cahier des charges du secteur sera présenté dans deux semaines, une structure dédiée aux secteurs cinématographique et audiovisuel verra le jour, ainsi qu'une liste des festivals recevant un don du ministère de tutelle. Après de si belles annonces, l'assistance composée essentiellement de réalisateurs, de producteurs, de distributeurs et d'exploitants semblait sur un nuage. On le sait, depuis sa nomination à la tête du ministère de la Communication, El Khalfi n'a cessé de prendre les choses à bras le corps et d'attaquer les grands chantiers de manière frontale, cependant pas au point de démêler, en un temps record, l'écheveau de problématiques aussi épineuses ! Infatigable, le jeune ministre a partagé, lors d'un dîner informel avec les professionnels, ses propositions - qui forment d'ailleurs l'ossature des cahiers des charges de la SNRT et de 2M. Des propositions et décisions qui risquent de chambouler le secteur audiovisuel marocain. Et les moyens ? Bref, El Khalfi semble avoir une baguette magique, capable de restructurer ces deux secteurs-clés (cinématographique et audiovisuel). Mais a-t-on réellement les moyens de nos ambitions ? Le ministre de la Communication peut-il atteindre tous ces objectifs d'ici la fin de son mandat ? Ces belles annonces resteront- elles suspendues aux lèvres du ministre, ou deviendront-elles une réalité palpable ? «Nous n'avons pas les moyens de nos ambitions, mais je peux vous assurer qu'on manquait de stratégies auparavant, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Et grâce à la nouvelle stratégie du ministère, nous définissons mieux nos besoins», précise-ton auprès du cabinet de El Khalfi. Définir mieux ses besoins et détecter ses lacunes, n'est pas toujours synonyme de réussite. Lorsque le directeur des études et du développement du ministère a affirmé que le département de la Communication était capable de mettre fin au piratage (sans pour autant décliner les grands axes de ce programme visant à éradiquer ce fléau), la salle a éclaté de rire. «C'est la même rengaine... Les ministres précédents ont tous dit la même chose sans pour autant trouver une solution au problème du piratage... Ce que vous dîtes est tellement beau, que nous ne pouvons pas le croire», a réagit sur le champ, le président de la Chambre des exploitants, Abdelhamid Marrakechi. La réalisatrice Zakia Tahiri, s'est elle aussi demandé si les annonces du ministère de la Communication concernant le secteur du cinéma, étaient réalistes. «J'aimerais bien croire ce qui a été dit par le représentant du ministère de la Communication, mais j'ai l'impression que ces responsables n'ont pas la moindre idée de ce qui se passe sur le terrain. Produire un film, un téléfilm, une série ou une docu-fiction au Maroc demeure toujours problématique». En un mot, les prochains jours promettent une joute entre El Khalfi et les professionnels de l'audiovisuel et du cinéma au Maroc. Nous l'avons bien dit, notre ministre est sur tous les fronts ! Lire aussi : Edito : Si j'étais El Khalfi! El Khalfi assume Utopique réforme ?