Réforme du paysage médiatique national, libéralisation du secteur audiovisuel, accompagnement des entreprises de presse, restructuration du secteur et révision du Code de la presse, réglementation et régulation de la presse électronique, remise à niveau de la formation professionnelle, création d'un observatoire national pour l'amélioration de l'image de la femme dans les médias... ce ne sont pas les chantiers qui manquent au département de la Communication. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'à tour d'annonces, le nouveau ministre, Mustafa El Khalfi, a placé la barre très haute, ou plus exactement à la hauteur des attentes du secteur et de ses acteurs. Seulement voilà, aura-t-il les moyens de ses ambitions ? 1,66 MMDH, c'est donc le budget accordé au département de tutelle dans le projet de loi de finances 2012, présenté en fin de semaine par le ministre de l'Economie et des finances, Nizar Baraka. En pratique, l'enveloppe budgétaire a augmenté de près de 142 MDH par rapport à 2011, soit trois fois plus que l'augmentation accordée au département, entre 2010 et 2011. Néanmoins, cela sera-t-il pour autant suffisant pour entamer le grand ménage envisagé par le nouveau ministre ? Comment le budget du ministère sera-t-il réparti ? L'heure de la mutualisation a sonné C'est bien connu, en communication (comme en politique), le secteur audiovisuel est généralement celui qui demande le plus de moyens. Or, cette année, le fonds de promotion consacré au paysage audiovisuel national ne bougera pas d'un iota : 370 MDH, soit la même somme qu'en 2011. Néanmoins, la note de présentation du budget 2012 évoque en première ligne, la «réforme du paysage audiovisuel national» qu'elle inscrit dans «la continuité». Concrètement, cela implique le lancement du projet du 3e contrat-programme entre l'Etat et le SNRT pour la période 2012-2014, visant entre autres, à améliorer la qualité de la production nationale et le renforcement de la production de la fiction Amazighe, au regard de la nouvelle Constitution. Il est également question de l'amélioration du positionnement et «de l'image de marque de la SNRT, dans le champ audiovisuel national». C'est bien la première fois qu'une loi de finances évoque «l'image de marque» du holding audiovisuel public. C'est dire si la réforme dont a besoin le pôle public est non seulement d'ordre éditorial et technologique (comme évoqué dans le texte de loi), mais également organisationnel et institutionnel. En ce qui concerne la SOREAD-2M, il est à noter que le contrat-programme triennal qui lie la chaîne à l'Etat, touche à sa fin en 2012. L'heure est donc au développement de l'apport de 2M au réseau de télévision numérique terrestre (TNT) et à l'amélioration de la programmation (plus généraliste et diversifiée). À l'ordre du jour aussi la réalisation «de l'investissement dans les moyens de captation, de postproduction, de transmission et de diffusion des programmes, afin de garantir la continuité et la qualité technique de service aux téléspectateurs, conformément aux standards technologiques internationaux», stipule la note. Autre point important, la rationalisation et la «mutualisation des moyens entre la SNRT et SOREAD-2M». Des conventions seront conclues dans ce sens entre les deux sociétés, ajoute le document. En clair, si le secteur n'obtient pas plus au niveau du fonds qui lui est attribué, c'est en activant l'investissement et en développant l'industrie de production, que le pôle public devra élargir ses ressources financières. Les priorités sont ailleurs Les différentes interventions du ministre depuis sa nomination le confirment, les priorités de son département ne s'arrêtent pas à l'audiovisuel. On comprendra pourquoi le budget consacré aux «dépenses d'investissement», est passé de 789 MDH en 2011, à plus 903 MDH cette année, soit une augmentation de 81% par rapport à l'ensemble des frais du ministère. En ce qui concerne les dépenses de matériel, l'enveloppe budgétaire accordée au ministère, a grimpé de 18% atteignant les 328 MDH. Côté dépenses de personnel, le budget reste minime, un peu plus de 64,2 MDH, soit une augmentation de 2%. Il est donc clair que le ministère compte «investir» dans le secteur, mais comment ? Dans le domaine du cinéma, on rappelle que le montant des aides à la production accordées par le Centre cinématographique marocain (CCM) vont de 20.000 à 50.000 DH pour l'écriture et à la réécriture de scenarios, de 100.000 à 500.000 DH pour les longs métrages et de 25.000 à 50.000 pour les films courts, à raison d'au moins trois sessions par an. À ce niveau, le ministère table cette année encore sur «la mise œuvre d'une stratégie cinématographique» basée sur «le développement de l'industrie de la production, du traitement, de la distribution et de l'exploitation cinématographique, moyennant l'attraction des investissements étrangers directs, dans les tournages au Maroc». Bien qu'El Khalfi ne se soit pas encore prononcé sur les ambitions de son département en la matière, on retiendra toutefois la finalisation des travaux de l'Institut supérieur des métiers de l'audiovisuel et du cinéma (ISMAC), pour un démarrage à la rentrée universitaire 2012. En matière de formation, d'ailleurs, on parle encore une fois de «rénovation des équipements» de l'Institut supérieur de l'information et de la communication. En réalité, cette rénovation ne devrait pas concerner uniquement l'aspect technique, mais aussi pédagogique avec notamment une révision des programmes de formation, de manière à ce que ceux là, soient mieux adaptés à la réalité du marché et aux évolutions technologiques que connaît le secteur. Un programme de formation au journalisme électronique serait d'ailleurs à envisager, étant donné l'intérêt du ministre à la question. Où est passée la presse électronique Diversification de l'offre, modernisation du système d'information, renforcement de la formation, mise à niveau des équipements de l'agence de presse nationale (MAP), contribution de l'Etat à la mise à niveau des entreprises de presse... Si le document du ministère des Finances a le mérite de revenir sur les différents chantiers prévus pour la presse écrite, on regrettera toutefois que le département d'El Khalfi, n'ait pas jugé utile d'introduire dans ce document préliminaire, quelques lignes relatives à ses hautes ambitions concernant le secteur électronique. D'autant que le ministre avait annoncé, lors de la journée d'étude organisée à ce sujet, la création d'une commission spéciale en charge de la réflexion dans le domaine. Qui dit commission, ne dit-il pas également frais...en plus ?