Bientôt, la très petite entreprise marocaine aura droit à sa propre stratégie gouvernementale. C'est, en effet, ce qui ressort de la participation du ministre des Affaires générales à la rencontre-débat organisée par l'Association des lauréats d'Al Akhawayne en fin de semaine. En effet, «nous avons entamé une série de concertation avec différentes parties afin de décider de la stratégie à mettre en œuvre pour soutenir les TPE», confirme Nizar Barraka. Il faut dire qu'il était temps que les pouvoirs publics s'intéressent à la mise à niveau des TPE, car aujourd'hui, ces micro-entreprises ne sont pas au bout de leur peine. Evoluant dans une conjoncture économique assez délicate, les TPE marocaines font également face à une absence quasi-totale des moyens de financement. «Face au caractère informel des TPE marocaines, il est impossible pour les banques d'accompagner ces entreprises dans leur besoin de financement», explique Rida Lemrini, ancien président de la Fédération du micro-crédit. Il est à préciser que le caractère informel peut être le fruit de plusieurs défaillances au niveau de ces entreprises, notamment l'absence de comptabilité, de registre de commerce ou encore de cotisation patronal. «Les TPE sont vulnérables en raison de l'environnement dans lequel elles évoluent. Celui-ci est marqué par la lourdeur des démarches administratives et de l'accès au financement», ajoute Mohammed Kassal, économiste et ex-président de la Fédération de la PME/TPE à la CGEM. Selon ce dernier, les TPE marocaines restent mal perçues en raison de leur caractère informel, même si aujourd'hui deux profils de promoteurs existent, notamment traditionnel et innovateur. Cependant, «les TPE innovatrices ne sont pas non plus mieux loties en face des banquiers en raison des clichés traditionnels dont elles hétiritent, notamment concernant le risque qui en découle», rajoute Kassal. C'est dans le cadre de l'accélération du rythme de la croissance du pays que le gouvernement prend le temps aujourd'hui d'étudier les problématiques des petites entreprises. «La deuxième raison qui motive cet intérêt pour la TPE est l'orientation royale insistant sur l'élargissement de la classe moyenne que peut offrir l'essor des TPE», explique le ministre des Affaires étrangères. En effet, les participants au débat sur les TPE ont fait ressortir un consensus autour du rôle des petites structures dans l'accroissement des revenus des individus. D'autant plus qu'«aujourd'hui, il y a une volonté avérée de création de TPE», insiste le ministre. Dans ce sens, et pour répondre aux problématiques qui entravent la vie des TPE, le département de Nizar Baraka s'attelle aujourd'hui à la mise en œuvre de la nouvelle stratégie. Selon le ministre, celle-ci, issue des conclusions des ateliers d'étude organisés avec différents acteurs économiques, devrait s'articuler autour de trois principaux piliers. Le premier concerne le volet fiscal. «Nous avons aujourd'hui besoin d'une fiscalité spécifique au TPE», insiste Nizar Baraka. Certes, depuis la décision du gouvernement de changer les tranches d'imposition sur l'IR, beaucoup de petits entrepreneurs sont retombés dans la tranche des 10%, cela n'empêche qu'aujourd'hui il faudrait prévoir des actions ciblant les TPE. Par ailleurs, le micro-crédit s'avère aujourd'hui comme une solution adéquate au problème de financement que vivent les TPE. En effet, les associations de micro-crédit seront au premier rang dans la stratégie gouvernementale, dans le sens où elles seront une alternative au rôle que sont censées jouer les banques. «Encore, faut-il aujourd'hui que le plafond du financement autorisé soit élargi», recommande Rida Lemrini. Cette doléance devrait être prise en compte par le gouvernement, puisque le ministre prône le relèvement de ce plafond à 150.000 DH. Aussi, sera-t-il question d'inciter les banques à offrir aux TPE des formules bancaires spécialement dédiées, quitte à mettre en place des mécanismes de garantie par l'Etat. Dans ce sens, il serait envisageable de réorienter le ciblage des fonds de garantie vers les TPE, notamment en autorisant l'élargissement de la garantie «Damane Exploitation» à l'export à cette catégorie d'entreprise. Aussi, «le problème du fonds de roulement sera bientôt résolu avec l'adoption du projet de loi sur les délais de paiement», rassure Baraka. Enfin, le gouvernement pense à proposer une couverture sociale spécifique aux TPE afin d'en réduire la cherté. Ainsi, il serait question d'inciter les organismes de couverture sociale (La CNSS) à concevoir des produits spécifiques aux auto-entrepreneurs. C'est donc toute une batterie de mesures qui viendront soutenir les TPE une fois la nouvelle stratégie adoptée. Cependant, tout cela sera-t-il suffisant devant un manque patent d'accompagnement, notamment de la part des grands groupes industriels ?