L'information en a réjouit plus d'un. Une fondation baptisée «Ahmed Tayeb Laâlej pour le théâtre, le zajal et les arts populaires» vient de voir le jour. Initiée par la famille et les amis du célèbre artiste, cette fondation a pour objectif notamment la préservation de l'œuvre plurielle du grand homme de théâtre et parolier qu'est Ahmed Tayeb Laâlej, ainsi que la publication de l'ensemble de ses écrits touchant plusieurs domaines dont des études, contes et maximes. «À travers la création de cette fondation, nous voulons rendre hommage à un grand monsieur qui a tant donné à l'art et à la culture au Maroc. C'est une mémoire nationale qu'il faut préserver», nous a confié le compositeur Moulay Ahmed Alaoui, membre fondateur de ladite fondation. Les initiateurs de ce projet notamment Mustapha Kabbaj, Abdelâti Amana, Hassan Laâlej et Moulay Ahmed Alaoui, ont déjà une idée sur les modalités de fonction de la fondation. On envisage en effet, de mettre en place une bibliothèque réunissant l'œuvre intégrale de cet homme de théâtre et de littérature et de créer une banque de données et œuvres documentaires destinées aux chercheurs afin de préserver une des mémoires culturelles et artistiques du Maroc. «Un concours destiné aux jeunes sera également au menu», précise Alaoui. Cette nouvelle structure sera donc une occasion de découvrir l'un des grands qui ont façonné le théâtre dans notre pays. Aux côtés de Tayeb Saddiki, Ahmed Tayeb Laâlej demeure parmi les figures de proue qui ont permis au théâtre national de vivre son âge d'or. Flashback Nous sommes dans les années 1960 et 1970. La scène théâtrale foisonne durant cette période. Talentueux, Laâlej produit de nombreuses pièces de théâtre qui restent à jamais gravées dans la mémoire des Marocains. Rappelez-vous de la troupe «Maâmora» qui a permis à bon nombre de jeunes comédiens, aujourd'hui confirmés d'exprimer leurs talents. La liste des pièces à grand succès sont là pour nous rappeler la réussite de cette expérience. «Wali Allah», «Al Haj Adama», «Aâmail Joha», autant de pièces adaptées de la manière la plus géniale qui soit. Tayeb Laâlej n'est pas seulement un homme de théâtre, mais également une encyclopédie vivante. Un touche-à-tout, grâce auquel la chanson marocaine a, par ailleurs, trouvé un nouveau souffle. C'est d'ailleurs ces multiples facettes de l'artiste que compte promouvoir la Fondation. Dramaturge, parolier, adaptateur et interprète, Ahmed Tayeb Laâlej est un perfectionniste, doublé d'un comique à toute épreuve. Dans les années 1960, il avait écrit notamment les paroles du célèbre tube de Abdelwahab Doukkali, «Ma ana ila bachar», repris à l'époque par la star libanaise Sabah. Adoptée par le public arabe, cette chanson nous a prouvé que là où Laâlej met la main, le succès est assuré. Un autodidacte chevronné Pour atteindre le sommet, Ahmed Tayeb Laâlej qui a contribué au financement de la Fondation a dû trimer. Apprenti menuisier à Fès où il a vu le jour en 1928, Laâlej a compris dès son plus jeune âge qu'il était doté d'un talent artistique hors pair. Que faire ? Laisser tomber ce don et se contenter de la vie simple qu'il menait aux côtés des siens ? Ambitieux, il se prend d'abord en charge, fouine et tente par tous les moyens de donner forme à ses talents. Autodidacte, il déniche même des stages à l'étranger afin de peaufiner ses connaissances. Bien outillé, il s'attaque aux pièces du grand Molière, en l'occurrence «Tartuffe», «Les fourberie de Scapin», «Le bourgeois gentilhomme». Les adaptations de ces pièces qui font partie du patrimoine théâtrale universel, étaient un succès. Soutenu par le public, il adapte d'autres pièces de Jules Romain et de Bertolt Brecht. Côté chanson, Laâlej a enrichi le patrimoine. Il est en effet l'un des rares paroliers à avoir su de façon ingénieuse, donner un charme inégalé au dialecte marocain qu'il a présenté d'une façon plus captivante, tout en respectant la morale, les sensibilités. En matière de théâtre, comme en chanson, ses travaux représentent un capital inestimable et constituent pour la culture marocaine et arabe, un trésor que le temps ne peut entamer. «Khouyi, Khouyi» interprétée par Latifa Raâfat fait également partie de la longue liste de ses chansons. A l'instar de «Mana ila Bachar», ce tube peut se prévaloir d'avoir été à la tête des hit-parades des années durant. Aujourd'hui et grâce à cette fondation, l'œuvre de Ahmed Tayeb Laâlej est à la disposition des jeunes générations. Toutefois rien n'a été encore fait, souligne Alaoui. «Cette fondation existe, mais il faut que le ministère de la Culture ainsi que d'autres organismes nous soutiennent pour concrétiser nos objectifs».