Les observateurs l'annonçaient comme le feuilleton de l'été 2010. Les récentes évolutions de l'affaire finiront par leur donner raison. Les péripéties de ce qu'on appelle désormais «l'affaire ONDA» n'ont, en effet, pas fini d'interpeller l'opinion publique. Un directeur de cabinet interdit de quitter le territoire, quinze responsables de l'Office convoqués par le Procureur général de la Cour des comptes et un ex-directeur général, également interpellé par les hommes d'Ahmed Midaoui, mais qui a fait l'objet, en plus, d'un véritable lynchage médiatique. Tel est le bilan à ce jour de la «cueillette» à l'ONDA, déclenchée en début d'année, juste après la publication du second rapport d'audit 2008 de la Cour des comptes d'une soixantaine d'établissements publics. Un rapport qui a particulièrement dénoncé les gestionnaires de l'Office national des aéroports (le contrôle de la gestion de l'ONDA a été axé sur la période 2003-2007). Les conclusions de ce document ont révélé l'existence de dysfonctionnements, d'irrégularités et de dépenses injustifiées. Abdelhanine Benallou, ex-directeur général de l'Office, a été limogé deux mois avant sa publication officielle. Mais, nombreuses sont les lectures qui disaient à l'époque, que c'est justement suite aux conclusions de la Cour que «tout a commencé». Selon certains observateurs, tout a démarré le 2 février 2010, suite au départ de Benallou après sept ans de services à la tête de l'ONDA, au cours desquels le polytechnicien avait pour mission de faire respecter la politique sécuritaire de l'Etat au niveau des frontières aériennes (terrorisme, trafic de drogues, etc.) et de mettre à niveau les aéroports du Royaume. Un projet suivi de près par les hautes sphères du pays. Si l'ancien responsable de l'ONDA a, plus ou moins, réalisé avec succès le premier chantier, le second, lui a, par contre, coûté sa place. «Le rapport de la Cour des comptes n'a été que le coup de grâce», explique notre source. D'autres parlent plutôt des retards accumulés au niveau du projet de réaménagement de l'aéroport d'Oujda, sur lequel le Roi avait un regard particulier. Sans parler d'autres dysfonctionnements au niveau de plusieurs autres aéroports. En tout cas, une fois débarqué de son poste, Abdelhanine Benallou a eu droit à une bonne campagne de «lynchage médiatique» et l'on présageait déjà que son limogeage donnerait suite à des poursuites judiciaires. Les médias et l'opinion publique réclamaient des têtes... Interdiction de quitter le territoire Qu'en est-il de l'interdiction de quitter le territoire dont a fait l'objet Ahmed Amine Barkallil, ancien directeur de cabinet de Abdelhanine Benallou ? Fait-elle suite aux conclusions du rapport de la Cour des comptes ? Partant, Benallou a-t-il été, lui aussi, interdit de quitter le Maroc ? Des informations parues dans la presse l'ont rapporté sur un ton affirmatif, citant des sources judiciaires. Mais, contacté, l'ex-directeur de l'ONDA a catégoriquement nié : «Je n'ai reçu aucune information dans ce sens», a-t-il déclaré. Qu'en est-il de Barkallil? Des sources informées nous ont confirmé son cas. L'ex-directeur de cabinet s'est, en effet, vu signifier, le 29 juillet dernier, par la Police des frontières de l'aéroport Mohammed V, qu'il ne pouvait quitter le territoire marocain, parce qu'il fait l'objet d'une enquête judiciaire. Contrairement à ce qui a été publié dans la presse, l'interdiction de quitter le territoire ne fait pas suite aux conclusions du rapport de la Cour des comptes, nous confie une source au parquet général de l'instance. En effet, selon les premiers éléments dont nous disposons, elle n'a pas encore donné une suite judiciaire au dossier de l'ONDA «car il est encore entre les mains du Procureur général», explique-t-on. Rappelons que le Procureur général du Roi près la Cour des comptes avait établi une liste de 17 responsables de l'ONDA qu'il avait convoqués pour audition. La semaine dernière, il a envoyé des convocations personnelles à une nouvelle dizaine de responsables, dont Abdelhanine Benallou et Ahmed Amin Barkallil. Une information confirmée par le premier. Selon lui, aucune date n'a encore été précisée. La Cour des comptes passe à la vitesse supérieure Le fait que le Procureur général de la Cour des comptes convoque les mis en cause est une première. Le premier rapport de cette juridiction financière n'a, en effet, pas donné lieu à l'ouverture d'une quelconque enquête ou audition de hauts responsables. D'autant plus que dans le cas de l'ONDA, le Procureur général de la Cour a ouvert une enquête deux mois seulement après la publication du rapport. Une enquête dite de «discipline budgétaire», qui donnerait lieu à des sanctions administratives ou à de grosses amendes (le Procureur de la Cour des comptes est habilité à le faire). Si l'on constate des infractions d'ordre pénal, le dossier est transmis à la justice. Pour ce qui est des différents responsables de l'Office des aéroports, on en est encore à la première étape, celle des auditions, devant le procureur du Roi près la Cour des comptes. Selon Benallou, aucune date n'a encore été fixée pour la deuxième vague des auditions. Mais ce qui est sûr, c'est qu'à la fin, les différents mis en cause retiendront leurs souffles: si le dossier atterrit sur le bureau de Mohamed Habib Naciri, l'affaire prendrait des tournures différentes. Le ministre de la Justice, après examen, aura ensuite à charger le procureur du Roi, près la Cour d'appel de Casablanca de déclencher une enquête judiciaire autour de l'affaire. À en croire nos sources, le dernier scénario serait fortement envisageable. Demain dans l'épisode II: La version de Abdelhanine Benallou (Interview).