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Tunisie : Révolution... ère
Publié dans Les ECO le 17 - 01 - 2011

●Après 23 ans de règne, le régime de Ben Ali est tombé sous le coup d'une révolution sociale ●Une première dans le monde arabe ●Au-delà des raisons apparentes, la chute du président tunisien a dévoilé les limites d'un modèle de développement classé parmi les meilleurs de la région
La date du 14 janvier 2011 restera à jamais gravée dans les annales de l'histoire du peuple tunisien et de toute la région du Maghreb. Ce jour-là, alors que rien ne semblait le présager, malgré les multiples alertes, le soulèvement populaire entamé un mois plus tôt à partir de ce qui aurait dû être un simple fait divers, a eu raison d'un des régimes les plus autoritaires de la région. Après 23 ans de règne sans partage, le régime de Ben Ali est tombé un peu comme il a été conçu, confirmant la célèbre maxime qui dit: «Qui a vécu par l'épée périra par l'épée !». Cet épilogue a soulevé beaucoup d'interrogations, de par le monde, en raison précisément du déroulement des événements, mais aussi et surtout parce qu'il a eu lieu dans un pays considéré comme l'un des exemples de la région en matière de développement économique. Aujourd'hui encore, alors que la chute de Ben Ali n'a pas livré tous ses détails, l'épisode tunisien considéré déjà comme une véritable révolution, est perçu comme une leçon instructive pour les pays arabes.
La crise d'un modèle de développement
Selon l'économiste Mohamed Tahar Bensaada, le simple fait que les évènements aient eu lieu en Tunisie, «est à lui seul instructif, puisqu'il s'agit d'un modèle de développement considéré comme le meilleur de la région selon les critères des institutions économiques et financières internationales». Cela d'ailleurs ne se dément pas car, en cette ère encore en proie aux effets néfastes de la récente crise économique qui a marqué le monde durant les trois dernières années, la Tunisie affichait des indicateurs «arrogants», nettement en avance sur ses voisins. Pour illustration, selon les prévisions de l'OCDE, la Tunisie serait en mesure d'accéder au rang des pays développés à l'horizon 2035, grâce notamment à la progression que connaîtra «l'indice de rattrapage», qui atteindra 36% d'ici deux ans, à condition que soit maintenu d'ici 2014 un taux de croissance moyenne de 5,5%. Le revenu annuel par habitant devrait se situer d'ici là autour de 13.500 dollars. Le miracle tunisien n'est-il finalement qu'une illusion ou bien a-t-il simplement montré les limites d'un système fortement arrimé sur une insertion touts azimuts à l'économie internationale. Cette hypothèse semble plus plausible car déjà, en 2009, la Tunisie a été l'un des pays qui avait le plus pâti de la conjoncture économique, les pays développés exceptés, avec une croissance qui a chuté jusqu'à 3%. De fait, et c'est là où l'histoire est assez surprenante, c'est précisément sur la base de revendications sociales et économiques qu'est partie la contestation, qui a fini par se transformer en revendication politique. Cette révolution sociale a fini par cristalliser tous les griefs qui apparaissent aujourd'hui au grand jour. L'option économique prônée par le modèle tunisien a en effet été bâtie sur trois piliers, qui ont permis de provoquer un afflux conséquent d'investisseurs, en particulier européens. Il s'agit de la loi de 1972 sur les industries offshore, le tourisme et l'accord d'association avec l'UE signé en 1995. Malheureusement, cette option a eu son revers de médaille, dont la principale manifestation sur le terrain a été la fracture croissante entre les classes sociales. Le paradoxe du modèle tunisien a ainsi été l'écart sans cesse grandissant et parallèlement aux avancées qu'enregistrait le pays sur le plan macroéconomique, des inégalités sociales. Alors qu'une minorité de citoyens, tournant autour du clan présidentiel contrôlait l'essentiel du maillon économique et financier du pays, grâce à la bénédiction d'un système autoritaire et répressif des plus efficaces, la majorité des citoyens végétaient dans la précarité. Pour preuve, le pays affichait un des taux les plus élevés de chômage, surtout chez les jeunes, qui représentent plus de 23% de la population totale du pays. Alors qu'il n'est que de 9,1% en 2009 au Maroc, il frôlait les 13,3% en Tunisie. Cette tendance se confirme encore plus chez les diplômés, alors que la Tunisie était un des pays reconnus pour la qualité de son système d'enseignement et le nombre d'étudiants diplômés sortant des établissements d'enseignement supérieur et de formation professionnelle comme le plus conséquent de la région. En plus, outre les inégalités profondes entre les couches sociales, le développement industriel axé sur des secteurs spécifiques (industrie, tourisme, service,...) a favorisé celui de certaines régions surtout côtières, au détriment de celles du sud du pays (l'hinterland). Le même déséquilibre se constate également au niveau des villes avec des disparités criardes sur tous les plans entre les zones urbaines et rurales, favorisant ainsi des flux migratoires vers les régions industrielles à fort potentiel économique. Un véritable méli-mélo donc, que constitue cette pépinière de frustrations sociales, qui a fini par exploser le 14 janvier dernier comme une cocotte qui bouillait depuis longtemps, mais qui malheureusement n'a pas eu la soupape de sûreté nécessaire pour laiser éhapper le «trop plein». En effet, en plus de ces facteurs économiques et sociaux, le peuple tunisien était fortement encadré par un système politique autoritaire, entre les mains de «la classe bourgeoise» qui dirigeait le pays.
Leçons d'histoire
Le soulèvement du peuple tunisien est un symbole, en plus d'être une leçon pour la région. Selon le professeur Najib Mouhtadi, «la force de ce changement réside dans la spontanéité du mouvement social qui s'est généralisé en trois semaines, et sa faiblesse en l'absence d'une force politique de cohésion et d'intégration, par delà les intérêts de classe». Pour Taoufik Rahmouni, de l'université Hassan II de Casablanca, le peuple tunisien a démontré au monde entier qu'il connaît bien son hymne national : «Lorsqu'un jour, le peuple aspire à vivre, le destin se doit de répondre ! Les ténèbres se dissiperont ! Et les chaînes se briseront !». Soulignant que chaque peuple n'a que le dirigeant qu'il mérite, Rahmouni précise qu'«un gouvernant qui crée le vide autour de lui pour s'accaparer les pleins pouvoirs ne fait que creuser sa propre tombe et saper les fondements même de son autoritarisme». C'est pourquoi les régimes politiques qui cherchent à exclure la contestation et l'opposition pour des raisons «sécuritaires» sont «des régimes sans légitimité, condamnés à être destitués». En fin de compte conclut-il, les atteintes perpétrées contre les libertés d'expression et d'opinion ne peuvent que maximiser les sentiments de frustration et de marginalisation qui, à leur tour, engendrent le radicalisme et l'extrémisme.
Et demain, quelle Tunisie ?
Il est incontestable que le peuple tunisien vit, à travers cet épisode, l'un des moments les plus douloureux de son histoire, malgré les joies du moment. Certes la page Ben Ali est tournée, mais le nouveau chapitre qui s'ouvre est encore lourd de défis. Si personne ne semble regretter la chute du «tyran de Carthage», à part la voix discordante du Libyen Mouamar Khadaffi, des raisons d'inquiétude subsistent encore. Des inquiétudes somme toute légitimes, après les tergiversations des premières heures avant que le Conseil constitutionnel tunisien ne corrige samedi dernier le tir avec la décision d'activer l'article 56 de la Constitution au lieu de l'article 57 qui selon Taoufik Rahmouni est «une sagesse politique, qui permettra aux Tunisiens de bien établir les bases d'une transition certaine vers la démocratie tant attendue». Mais la transition saura t-elle surmonter tous les défis ? Et c'est là où le peuple tunisien aura à confirmer sa maturité. Les actes de pillage et de vandalisme qui ont émaillé les journées de vendredi et de samedi ne sont pas de nature à garantir un bon début pour la période transitoire. Najib Mouhtadi prévient que maintenant que la boîte de Pandore est ouverte, tous les espoirs sont certes permis, mais tous les risques pèsent aussi sur le devenir de la nation tunisienne.
Chronologie
➤ 17 décembre : l'immolation, le 17 décembre d'un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, qui protestait contre la saisie de sa marchandise par la police déclenchera la série des contestations sociales contre la vie chère à Sidi Bouzid.
➤ Le 24 décembre : le mouvement de contestation s'élargit et la police tire sur la foule des manifestants au sein de la deuxième ville révoltée, Menzel Bouzayane.
➤ Le 28 décembre : la première sortie médiatique officielle du président Ben Ali ne donne pas raison aux revendications de la rue et y voit une politisation accrue de demandes purement sociales.
➤ 2 janvier : les protestations prennent une autre forme, avec la mise à feu de bâtiments officiels et la montée de l'insécurité. 6 villes seront concernées par les émeutes durant toute la première semaine de l'année 2011.
➤ 10 – 11 janvier : les émeutes atteignent pour la première fois la capitale tunisienne et le président adresse un discours dans lequel il promet de châtier d'une main de fer les «voyous cagoulés» et la résorption du chômage et de la marginalité.
➤ 12 janvier : le limogeage du ministre de l'Intérieur, la libération des personnes arrêtées arbitrairement n'ont pas eu l'effet escompté. Le bilan s'alourdit parmi les manifestants (50 morts à Tunis et dans sa banlieue.)
➤ 13 janvier : Ben Ali demande à l'armée de se retirer de la capitale et fait un autre discours dans lequel il dit avoir «compris le message des Tunisiens et qu'il n'y a pas de présidence à vie». Il s'engage à quitter le pouvoir en 2014.
➤ 14 janvier : les manifestants changent de slogan et semblent ne pas vouloir accorder les 3 années supplémentaires demandées par Ben Ali. Mohamed
Ghannouchi se présente aux médias comme assurant l'intérim de la présidence en remplacement de Ben Ali.
➤ 15 janvier : le conseil constitutionnel délègue les fonctions de la présidence temporaire au président du Parlement tunisien Fouad Mebezaa, au titre de l'article 57 de la Constitution.
Les Echos quotidien : L'épilogue du soulèvement populaire que vient de connaître la Tunisie était-il prévisible ?
Najib Mouhtadi : Les phénomènes sociaux comme les secousses telluriques ne sont pas prévisibles, même si nous disposons d'indices plus ou moins parlants. Dans le cas de la Tunisie, le magnifique soulèvement populaire, qui a eu lieu en ce début d'année, était attendu de longue date. Personnellement, je croyais le dispositif sécuritaire plus intelligent, plus ingénieux et craignais plutôt le chaos après Zine El Abidine Benali, du fait que toutes les forces d'opposition ont été laminées en règle. Cette révolution est donc salvatrice à plus d'un titre, en ce sens qu'elle anticipe le mal. Alors comment le changement a-t-il pris forme sur de simples revendications sociales ? Il me semble qu'il y ait deux choses. D'abord, la chape de plomb a tellement pesé lourd que l'explosion était virtuellement plausible, parce que toutes les issues étaient verrouillées. Ensuite, le système Benali a anormalement duré dans le temps, au point qu'il s'est enlisé et ses mécanismes dévoilés ont fini par révéler la face ignoble d'un système rapace et corrompu qui a induit la déliquescence du pouvoir et la décrépitude de l'Etat.
Après la Tunisie, les regards se portent vers d'autres pays de la région. Peut-on craindre un effet domino ?
Il y a une tendance somme toute naturelle à la suite d'un événement euphorique, et qui veut que les gens souhaitent toujours la reproduction d'un événement quand il est heureux, bien que cela ne soit pas toujours possible, car la réalité est récalcitrante. En effet, il y a un espoir chez de larges couches sociales dans le monde arabe, au Maghreb et au Machreq, pour se défaire de leurs gouvernants autoritaires. Hélas, les révolutions ne s'exportent pas. Le changement social a sa propre logique et le changement part principalement des conditions internes qui s'avèrent souvent plus déterminantes dans tout processus de mutation. Ceci étant dit, il n'est pas exclu que le phénomène entraîne, à plus ou moins brève échéance, des remous dans certaines parties du monde arabe, en particulier dans les pays de la région à histoire similaire.
Quelles sont les principales leçons à tirer de cet épisode tunisien ?
La plus grande leçon à tirer est l'humilité face à la volonté du peuple. Voilà un pays que la plupart des analystes considéraient comme paisible et donc plutôt docile, à comparer avec ses voisins immédiats. Seulement, en 54 ans d'indépendance, les Tunisiens n'ont connu que deux hommes à la tête de leur Etat ! Bourguiba et Benali, dont les vies se sont entremêlées d'ailleurs, puisque Benali a assumé des fonctions régaliennes, avant de déposer «le père de la Nation», et continué le même chemin, le seul que les Tunisiens n'aient jamais connu, par dépit. Deux hommes, c'est très réducteur pour l'expression libre et plurielle de tout un peuple.
Quelle que soit la nature du régime, l'alternance politique et un jeu franc et loyal des acteurs autour d'un consensus historique qui scelle les divergences idéologiques, les rivalités de tous ordres, sont la soupape de sécurité permettant au peuple d'exprimer sa volonté, sa satisfaction ou sa colère.
Les autres pays du Maghreb ont beaucoup à apprendre de cette explosion de colère dans un pays frère, ami et voisin.
Toufik R. El Idrissi, Pr. à l'Université Hassan II de Casablanca
Les Echos quotidien : Comment peut-on expliquer une telle issue à partir de simples revendications sociales ?
Toufik Rahmouni El Idrissi: En réalité, il ne s'agit pas de simples revendications sociales, ou du moins, ces revendications ne sont que le prétexte apparent qui sert à couvrir l'aspect évènementiel des manifestations. Le malaise social couve depuis des années, rendant les inégalités plus criantes entre la plus grande partie du peuple, démunie et fragilisée par les crises et la précarité, et la minorité des acolytes du régime, qui s'approprient richesses et privilèges et font main basse sur le pays. Cette situation sociale a été aggravée par d'autres facteurs, non moins importants, qui ont servi d'amplificateurs, notamment les atteintes flagrantes aux libertés publiques et aux droits de l'homme, un pluralisme politique affaibli, un système d'information propre à un régime totalitaire et enfin les effets de la crise économique. Le facteur le plus déterminant est néanmoins le vide politique créé par le palais de Carthage, en muselant tout mouvement contestataire et en privant le système politique de toute opposition capable de traduire les aspirations populaires et de les canaliser sous forme de revendications sociales. Au lieu de cela, la rue a pris le dessus et la violence s'est imposée comme seule alternative.
Peut-on envisager un effet de contagion sur d'autres pays de la région arabe ?
L'effet de contagion est indéniable. La révolution tunisienne restera marquée dans les annales de l'histoire des peuples arabes, mais aussi dans les esprits de leurs dirigeants. Plusieurs aspects de la vie communautaire rassemblent les pays arabes, surtout maghrébins: la culture, la religion, l'histoire, la géographie, la structure sociale, la logique du management politique ... Nul doute que les répercussions de cette révolte se feront sentir dans d'autres contrées où l'autoritarisme continue à étouffer les aspirations populaires et où le népotisme et l'arrivisme politique ravagent et altèrent le tissu social.
Quelles perspectives se profilent pour la Tunisie ?
Cela dépend de l'issue des événements qui sont en cours. Pour le moment, c'est une équation à plusieurs inconnues. D'abord la position pour laquelle optera l'armée dans le rapport des forces en présence, mais également la question de savoir si le gouvernement de transition pourra bénéficier de la légitimité nécessaire pour mener à bien les projets de réforme, surtout ceux concernant l'amendement de la Constitution. Ensuite, il sera question du rôle de l'opposition, qui est passée par des cycles répressifs incessants et éprouvants. Disposera-t-elle du potentiel combatif minimum pour affronter les défis d'un changement politique aussi vaste que brusque? dimensions pacifiques et encadrées? Nul doute que la Tunisie a besoin actuellement d'un temps de répit pour panser ses blessures et penser l'avenir d'une manière sereine.
Le pouvoir magique d'Aljazeera
Par Samir Chaouki
Les événements de la Tunisie ont démontré, encore une fois, la force de l'image, la puissance des médias et l'ouverture de ce monde. Depuis une semaine, la chaîne qatarie Aljazeera a devancé tous ses concurrents, y compris les médias français, et a relégué tout le reste au second plan.
La chaîne de télévision, bien qu'interdite dans la Tunisie de Ben Ali, s'est mobilisée 24H/24H pour relayer le mouvement populaire et transmettre aux Tunisiens, sur leur petit écran, appels et recommandations des personnalités de l'opposition. Depuis une semaine, Aljazeera a pris le dessus sur la chaîne TV officielle qui matraquait de la propagande du régime. Un régime qui s'en est rendu compte et a commencé à contacter la chaîne pour transmettre ses messages. D'ailleurs, quelques minutes après l'ultime discours de Ben Ali, le ministre de la Communication appelait Aljazeera pour l'exhorter à communiquer la version officielle et à ne pas se contenter du seul discours de l'opposition. Un intérêt tardif à un moyen de communication redoutable qu'est Aljazeera, car quoiqu'on ne soit pas d'accord avec la ligne éditoriale de cette chaîne, nul ne peut ignorer son rôle à mobiliser l'opinion publique arabe. De plus, ce n'est pas un hasard si elle a battu la puissante machine de la propagande américaine CNN en Irak, si elle est devenue la source d'information des plus célèbres chaînes TV du monde et enfin si l'institution de l'armée tunisienne y communiquait des numéros de téléphone pour dénoncer les éléments subversifs après la fuite de Ben Ali. Il n'est plus un secret que la force des médias est devenue une arme redoutable dans toute guerre ou bataille et gare à ceux qui ne l'auront pas compris. Ben Ali en est l'exemple le plus frais !


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