Le Maroc se veut précurseur sur le continent africain concernant la finance verte. Il figure dans les premiers 15 pays dans le monde sur 44, à avoir émis des green bonds. D'ailleurs, 5 émissions marocaines ont totalisés pas moins de 4 MMDH depuis 2016, année de la COP22. Masen, pourrait réitérer l'expérience dès cette année. Le Maroc se place d'ores et déjà sur l'échiquier mondial de la finance verte. C'est un fait que met en exergue la présidente de l'Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), Nezha Hayat lors de la rencontre organisée par la Chambre de commerce britannique sur le thème de la «Green Finance : où en est le financement de la croissance verte au Maroc ?». La conférence-débat a eu pour objectif de décrypter les perspectives de la finance verte aussi bien sur le plan national qu'international. Il faut dire que le potentiel y est. Ce sont plus de 160 milliards de dollars de fonds qui ont été levé via l'émission de 1.540 Green bonds à travers le monde en 2018, contre à peine 1,2 milliard de dollars en 2007. Il reste encore plusieurs milliers de milliards de dollars à mobiliser d'ici 2030 pour résoudre la problématique du réchauffement climatique. Au Maroc, le défi de la finance verte a été envisagé depuis plusieurs années, mais la COP22, organisée à Marrakech en 2016, a marqué le démarrage effectif de l'expérience. Le Maroc s'est, en effet, illustré comme précurseur en termes de financements verts en Afrique. En 2016, 5 émetteurs de différents secteurs ont levé pas moins de 4 MMDH de Green bonds. Sur les 44 pays qui s'intéressent à la finance verte, le royaume a fait partie des 15 premiers pays à avoir émis un Green bond. L'approche flexible et innovante que l'autorité a suivie a permis non seulement de mettre en place ces nouveaux instruments mais a également positionné le Maroc comme une référence et un leader en Afrique dans le domaine. «Nous sommes continuellement sollicités par différents pays du continent, et même d'Europe qui s'intéressent à ce type de financement», souligne la présidente de l'AMMC. Le régulateur a bien sûr joué un rôle fondamental dans la promotion de ce type de financement au Maroc et sur le continent africain. «Nous avons anticipé les premières émissions aussi bien de Green bonds que de Social bonds en produisant des guides instituant un cadre clair, précis et aux meilleurs standards internationaux qui ont permis d'accompagner efficacement le lancement de ce nouveau segment de marché», a déclaré Nezha Hayat. L'AMMC avait publié, avec le soutien de la Société financière internationale, le guide Sustainability bonds, qui actualise les principes et règles relatifs aux Green bonds, introduit les Social bonds et les Sustainability bonds et vise à ouvrir davantage d'opportunités en matière de financement de la durabilité. Un guide qui amorce d'autres chantiers relatifs à la sensibilisation des acteurs du marché pour ce type de financements. Puisqu'en plus de pouvoir lever des fonds sur le marché, l'émission d'instruments durables devrait permettre à l'émetteur de bénéficier de certains avantages additionnels par rapport à une émission d'obligations classique. Un «label vert» qui devrait permettre aux émetteurs marocains d'apparaître davantage sur les radars des investisseurs internationaux. Les TPEPME sont également concernées par cette initiative. D'ailleurs, la feuille de route élaborée par Bank Al-Maghrib, en collaboration avec l'ensemble des acteurs de la finance (le ministère des Finances, les banques, les assurances, l'ensemble des régulateurs du système financier), apporte une attention particulière à cette catégorie d'entreprises qui sont appelées à s'aligner sur les enjeux environnementaux et sociaux et s'adapter à intégrer les enjeux climatiques dans leur processus de fonctionnement et de production. En échange, les banques de financement doivent s'adresser davantage à cette catégorie d'entreprises pour leur apporter les financements nécessaires afin d'encourager les projets verts et durables. La Circulaire d'appel public à l'épargne, une fois validée par le ministère des Finances, devrait également représenter une opportunité à saisir pour ces entreprises. D'ailleurs, «la plus petite levée de fonds sur le marché des capitaux a été de 15 MDH», assure Nezha Hayat. De son côté, la Bourse de Casablanca, qui a lancé son premier indice ESG (indice de référence Environnement, Social et Gouvernance) se prépare pour mettre en place un marché alternatif dédié aux PME dès que le nouveau règlement général de la Bourse est publié au Bulletin officiel. De leurs côtés, les émetteurs présents à la conférence-débat n'ont pas manqué de manifester leur enthousiasme quant aux opportunités offertes par la finance verte. Pour assouvir ses besoins en financement et soutenir son développement, Masen a réussi à lever un premier Green bond d'1,5 MMDH. «Une expérience enrichissante qui nous a pris une année pour constituer notre dossier», a précisé Tarik Hamane, le directeur du Pôle Développement qui a mis en avant un gain moyen d'environ 20% par rapport à une opération de financement classique. Selon Hamane, une seconde émission «verte» serait même programmée prochaînement. Du côté du Groupe Al Omrane, son président Badre Kanouni a insisté sur l'importance qu'a eue le financement vert dans sa mission de production en logement tout en réduisant sa facture énergétique. Le premier opérateur public à procéder à un financement green et social, vient même de créer une unité Recherche & Développement en vue de «produire plus vite, moins cher et mieux». Effet de mode ou véritable alternative de financement ? Le segment en est encore à ses débuts tant au niveau national qu'international. L'écosystème financier s'adapte encore aux notions de développement durable, aux enjeux climatiques et aux risques financiers liés au changement climatique. Plusieurs défis restent encore à relever (notamment en termes de fiscalité) afin de booster cette finance verte et la transformer en réelle opportunité.