Tout en reconnaissant que la coopération de Rabat est essentielle pour freiner la migration, Bruxelles envoie des messages aux autorités marocaines à propos de la mise en service de l'accord de rapatriement des migrants, selon le modèle italo-libyen. Le dossier migratoire a été largement débattu lors de la réunion des ministres européens de l'Intérieur, jeudi dernier. L'Espagne y a mandaté sa secrétaire d'Etat aux migrations, Consuelo Rumi, la responsable espagnole qui maitrise le plus ce dossier surtout dans son volet relatif à la coopération avec le Maroc. «L'Espagne souffre une pression migratoire particulière» a souligné d'emblée le Haut-commissaire aux affaires de la migration, Dimitris Avramopoulus. Selon ce haut responsable communautaire, la route Maroc-Espagne est devenue la principale porte d'entrée des migrants irréguliers vers l'Europe, après la fermeture de celle au départ de la Turquie et les îles grecques ainsi que le trajet reliant la Libye à l'Italie. Durant cette réunion, Bruxelles a laissé entendre qu'elle ne laissera jamais tomber son partenaire. «L'Espagne n'est pas seule et jamais elle sera seule. L'UE l'appuie politiquement et financièrement». Toutefois, et de l'aveu de ce dirigeant communautaire, la clé réside dans le renforcement de la coopération avec le Maroc. «Nous mettons les bases pour une étroite collaboration avec le Maroc (… )140 millions d'euros ont été approuvés pour appuyer la gestion de la frontière. Le Maroc œuvre déjà pour renforcer le contrôle de sa frontière et a déjà évité un grand nombre de sorties (…) je salue les efforts des autorités marocaines», a-t-il souligné. Celui-ci a ajouté que les premiers paiements ont été versés et des appels d'offres lancés pour l'acquisition d'équipements nécessaires à cette lutte. De fait, le message lancé à demi-mot par le commissaire européen suppose une réactivation du traité sur le rapatriement des migrants vers le Maroc. C'est-ce que les médias espagnols ont cru comprendre des déclarations du haut responsable européen en charge de ce dossier. En atteste d'ailleurs le décryptage fait par le grec Avramopoulus de la situation migratoire auprès des autres routes empruntées par les migrants. À ce propos, le conservateur européen a présenté le modèle de la coopération entre l'Italie et La Lybie, comme un exemple à suivre. C'est de la sorte que Bruxelles a formulé le souhait que Madrid et Rabat renforcent davantage leur coopération dans ce sens. En d'autres termes, permettre le refoulement vers le royaume des migrants irréguliers dès qu'ils soient interceptés. Chose à laquelle s'oppose farouchement le Maroc. Concrètement et en 2018, les arrivées via la route maroco-espagnole ont progressé de 131 % en comparaison avec 2017, pour atteindre presque 65.000 migrants irréguliers, selon les derniers chiffres dévoilés durant cette réunion de travail. Cette tendance sera maintenue à la hausse depuis début 2019, à en croire les estimations et concernerait, principalement, l'arrivée des migrants marocains. Cependant, le commissaire européen a tenu à démentir l'alarmisme général en Europe sur la «déferlante migratoire» en mettant en garde contre les fakes news tout en précisant que ces arrivées sont loin des vagues migratoires qu'a connues le Vieux Continent en 2015.