Pour obtenir une carte de séjour valable cinq ans, un Marocain résidant en Côte d'Ivoire doit débourser la rondelette somme de 6.000 DH. Une question se pose : peut-t-on parler de retour d'ascenseur de la politique d'accueil du Maroc qui se traduit par des dizaines de milliers de cartes de séjour fournies à des migrants subsahariens en cinq ans ? C'est une question qui fait rarement débat dans le royaume et pourtant, il y a beaucoup à dire sur le quotidien des Marocains résidant dans les pays pourvoyeurs de migrants. Si au Sénégal, l'un des pays qui compte les plus fortes communautés dans le royaume, et vice versa, les MRE s'y sentent plus ou moins comme chez eux. En Côte d'Ivoire, un autre gros fournisseur de migrants au Maroc et où vivent 5.000 Marocains, c'est une autre histoire. Pour éviter toute équivoque, les rapports sociaux entre Ivoiriens et Marocains sont cordiaux, tient à souligner d'emblée, le président de l'Assemblée du Conseil des Marocains en Côte d'Ivoire (ACMRCI). Dans l'interview accordée aux Inspirations ECO dans le cadre de la 11 ème édition du Forum mondial sur la migration et le développement tenue à Marrakech du 5 au 7 décembre, Ouazzani Chahdi a expliqué que là où le bât blesse, c'est au niveau «de la carte de séjour». Pour obtenir un permis de séjour dans le pays d'Alassane Ouattara, un Marocain doit débourser la rondelette somme de 6.000 dirhams, si on croit le président et fondateur de l'ACMRCI. Une discrimination ? Rien de discriminant envers les Marocains, dans les faits. La Côte d'Ivoire, étant un Etat souverain et membre de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), applique cette mesure pour tout ressortissant dont le pays d'origine n'est pas membre de l'organisation intergouvernementale ouest-africaine. Seul hic, les Français sont de cette même catégorie d'étrangers, mais ne sont pas concernés pas cette mesure, mise en place par les autorités ivoiriennes. «En tout cas, les ressortissant français payent moins, environ 150.000 Fcfa, soit la moitié de ce que donnent les Marocains pour avoir une carte de séjour valable pendant cinq ans», explique Ouazzani Chahdi. Pour le MRE qui vit à Abidjan depuis plus de 20 ans, «cette situation est anormale» dans la mesure où le Maroc et la Côte d'Ivoire sont des pays partenaires comme le sont ces derniers et la France. Condamnés à la clandestinité «Les Ivoiriens résidant au Maroc ne se ruinent pas pour obtenir une carte de séjour», souligne notre interlocuteur, précisant que «ces derniers payent moins de 100 DH pour régulariser leur situation, alors que la majorité de nos compatriotes sont condamnés à vivre clandestinement dans ce pays de l'Afrique de l'ouest parce qu'ils ne peuvent pas débourser le montant exigé pour l'obtention de la carte de séjour». «6.000 DH pour tous les cinq ans, dit comme ça ce n'est rien, mais quand on a une famille nombreuse le montant devient lourd à supporter», a-t-il estimé. Et pourtant, tout cela ce n'est rien comparé à la galère que vivent les Marocains de Côte d'Ivoire qui recherchent un emploi. «Tout Marocain qui veut travailler dans une société ivoirienne en Côte d'Ivoire, doit obligatoirement avoir la nationalité ivoirienne. La carte de séjour seule ne suffit pas», regrette, non sans amertume, Ouazzani Chahdi. «Nos enfants qui font des études sur place sont obligés, une fois diplômés, de rentrer au Maroc ou aller ailleurs en Europe, par exemple, pour obtenir du travail». Faute de quoi, ils sont contraints à prendre la nationalité ivoirienne. C'est la condition sine qua non pour leur insertion professionnelle dans ce pas ouest-africain qui, grâce à son dynamisme économique, attire plus d'IDE. Les entreprises marocaines s'intéressent particulièrement à ce marché ouest-africain aux énormes débouchés, mais elles sont obligées de recruter leur personnel marocain depuis le royaume, si elles ne trouvent pas sur place les talents dont elles ont besoin, indique-t-on. Impossible, ou presque, pour les entreprises marocaines de faire travailler des Marocains en Côte d'Ivoire qui n'ont pas la nationalité ivoirienne. Une consolation peut-être, «la très probable» adhésion du royaume à la CEDEAO qui devra permettre de changer la donne. Mais quand ?