Les biscuits made in Morocco n'ont plus la même saveur. Cela fait, en effet, bien longtemps que la situation n'a pas été rose pour le secteur. Toutefois, l'année 2011 devrait se clôturer sur une note positive. Les professionnels s'attendent en effet à une croissance variant de 5 à 8% en 2011 par rapport à l'année précédente sachant qu'en 2010, le chiffre d'affaires du secteur de la biscuiterie marocaine avait atteint près de 1,8 MMDH. En face, les secteurs de la confiserie et de la chocolaterie connaissent une croissance comprise entre 10 et 12%. En somme, si l'Association des biscuitiers, chocolatiers et confiseurs (AB2C) estime que le secteur est globalement dynamique, il n'en reste pas moins que la biscuiterie progresse moins vite. Cela étant, l'augmentation de la consommation et les freins mis aux importations ont permis à la production locale de se relever. Par ailleurs, le secteur est partagé entre une dizaine d'opérateurs de la biscuiterie et la pâtisserie industrielle. Près de 50% du marché est détenu par Bimo, filiale gérée par Centrale laitière. Pour les autres 50 %, ils se répartissent équitablement entre les grands noms comme Gaumar et Henry's et les plus petits comme Pastor, Bipan et Excelo. Montagnes russes En 2006, l'AB2C avait mené une étude dont le but était de faire la lumière sur les points faibles entravant le développement de la filière. Au final, il en est ressorti que le secteur manquait cruellement de compétitivité. Entretemps, les importateurs de la place en ont profité pour introduire la concurrence étrangère turque, égyptienne ou encore espagnole. Venue s'exposer sur les étalages des commerçants, celle-ci n'a pas eu de mal à se faire une place avec ses prix défiant toute concurrence. La signature de différents accords de libres échanges n'a pas été non plus très bien vécue par les professionnels marocains. «Nous avons perdu 25% de parts de marché à cause de l'ouverture des frontières et des accords de libre-échange», souligne Abdelaziz El Alaoui, directeur de l'AB2C. Les industriels étaient insuffisamment préparés à ces bouleversements. Seules les structures les plus solides, notamment celles qui exportaient, ont su maintenir leur activité. «Nous ne sommes pas contre l'ouverture des frontières mais à condition que nous soyons traités sur un pied d'égalité», revendique El Alaoui. La réplique des opérateurs marocains «L'invasion turque a tout de même secoué nos cocotiers», affirme El Alaoui. Depuis, les professionnels marocains ont retroussé leurs manches. «Ils ont fait preuve d'innovation en lançant de nouveaux produits et de nouveaux packaging. Cela a redynamisé la production locale. «Celle-ci est dorénavant de grande qualité. Les Marocains font du bon», s'enthousiasme El Alaoui. Pour y arriver, les industriels locaux ont dû réaliser d'importants investissements. Aujourd'hui, le secteur peut se targuer d'aller de l'avant. «Cela ne veut pas dire que la situation est confortable, mais elle est de plus en plus supportable» , estime El Alaoui. De leur côté, les autorités ont également pris la mesure de l'enjeu. C'est ainsi que des instruments ont été mis en place pour protéger la production locale d'une concurrence jugée «déloyale» par les industriels. L'une des mesures phares portait sur la mise en place par la Douane de prix d'alertes. Ces derniers consistent à détecter toute importation dont la valeur est déclarée trop faible et à en interdire pratiquement l'accès sur le marché local. La mesure, qui a été instauré en 2005, aurait apporté un peu de souffle aux industriels locaux. «Elle a contribué à juguler les importations et à calmer les ardeurs des importateurs», note un membre de l'AB2C. Poudre d'œuf et graisses végétales sont trop taxées Le potentiel de croissance de ce secteur continue à être largement freiné par la persistance de problématiques jugées intolérables par les industriels. Décrié depuis bien longtemps, le maintien des droits de douane sur les intrants tels que les graisses végétales en est une des plus importantes. «Il est inadmissible que les professionnels continuent de payer 17,5% de droits d'importation sur les graisses végétales» défend ainsi El Alaoui. Originaires principalement de Malaisie, ces graisses végétales sont un intrant stratégique pour la fabrication des biscuits, et notamment pour le fourrage de ces derniers. Les industriels militent pour un démantèlement depuis plusieurs années. En 2011 encore, plusieurs réunions ont été tenues à ce propos. Sans succès. Egalement concernée, la poudre d'œuf utilisée dans la pâtisserie industrielle est actuellement imposée à hauteur de 50%. «Les producteurs locaux pourraient bien nous en fournir mais cela n'intéresse personne. C'est pourquoi, nous l'importons d'Europe essentiellement», révèle un opérateur. Selon ce dernier, «les accords de libre échange ne nous sont d'aucune utilité dans ce domaine». Pour faire valoir leur revendication, les professionnels devront attendre que le nouveau ministre de tutelle Abdelkader Aâmara, prenne effectivement ses fonctions. Pistes de réflexions Stratégie à l'international En 2008, les confiseurs et chocolatiers Michoc, Maghreb Industries et Aiguebelle se mettaient d'accord pour former un consortium d'exportation sur recommandation de leur association AB2C. Les biscuitiers, de leur côté, n'ont toujours pas défini leur propre stratégie en la matière. «Beaucoup d'efforts restent à faire au niveau local. Mais il est clair qu'il nous faut également une véritable stratégie à l'international. Pour cela, il faut d'abord que nous nous en donnions les moyens. Les opérateurs sont encore trop petits», nous explique Abdelaziz El Alaoui, directeur de l'AB2C. Evolution des prix Près de 80% du chiffre d'affaires du secteur de la biscuiterie est réalisé grâce au marché à la pièce. «Cela fait 25 ans que le marché à la pièce s'est imposé. Le paquet à 1 DH est resté à 1 DH. Or, il faudrait vraiment qu'il y ait une évolution des prix. La marge des industriels s'est réduite et nombreux sont ceux qui ont fait des efforts d'investissement qu'ils doivent pouvoir compenser d'une manière ou d'une autre», estime El Alaoui. Baisse de la TVA Gérée par la Fédération nationale de l'agroalimentaire (Fenagri), la question de la baisse de la TVA sur les produits agroalimentaires a déjà été présentée à la CGEM. Mais les tractations n'aboutissent toujours pas. Actuellement fixée à 20%, elle est l'une des plus élevées de la région MENA. C'est pourquoi les industriels militent pour un rabais qui la ferait éventuellement passer à 14%. Formation La formation professionnelle est un chantier sur lequel l'AB2C est d'ores et déjà concentrée. «Nous avons besoin de gens plus pointus. Pour l'instant, le personnel est formé sur le tas. Or, nous devons préparer les investissements de demain», précise El Alaoui. Cela passe d'abord par une étude pour identifier les profils nécessaires et les relier aux compétences qu'ils doivent avoir. Enfin, les actuels programmes de formation de l'OFPPT ou des universités doivent être mis en adéquation avec les réels besoins des industriels.