Fouad Zaidi. Directeur du pôle digital de Barid Al-Maghrib Pour relever les grands défis économiques qui l'attendent, le Maroc mise gros sur le digital en lançant un ambitieux programme de numérisation de son service public appelé Plan Digital 2020. Mais bien avant le lancement de ce projet, des bouleversements majeurs induits par les nouvelles technologies commençaient déjà à secouer le pays. Fouad Zaidi, le directeur du pôle digital de Barid Al-Maghrib est au coeur de cette transformation digitale. Il nous parle des tenants et aboutissants de ce gigantesque chantier. La transformation numérique est sans doute l'une des plus grandes tendances des économies émergentes ? À l'instar de nombreux pays africains, le Maroc est-il, lui aussi, victime de cette mode ? La culture du numérique est bien ancrée dans la société marocaine et cela ne date pas d'aujourd'hui. Mieux, nous avons franchi de nombreuses étapes dans le processus de digitalisation de notre administration publique. D'ailleurs, nous sommes en train de casser des barrières dans l'objectif de relever de nouveaux défis, mettre en place un système d'information créateur de valeurs ajoutées afin d'offrir à nos citoyens un service public de qualité. Vous êtes un haut responsable de la Poste, laquelle entreprise fait partie des acteurs majeurs de la transformation digitale de notre service public. Quelle a été, justement, votre contribution dans cette transformation numérique ? Nous avons compris depuis cinq ans que la révolution numérique apporte, sans aucun doute, de la valeur à notre économie. La Poste, qui est depuis toujours un opérateur de communication, a apporté à travers ses activités un maillon de confiance. Le premier produit que nous avons mis en place dans l'écosystème digital est le barid E-sign, première autorité de certification agréée par l'Etat. Tous les documents signés par les services de la poste sont opposables auprès des tribunaux. Pour dire qu'on met de l'ordre dans l'interaction au sein de l'écosystème digital. Ceci instaure inéluctablement un climat de confiance entre les opérateurs, les fournisseurs, les donneurs d'ordres et les différents usagers de manière générale. D'après votre raisonnement, on peut finalement dire que le Maroc est sur la bonne voie ? Le programme de digitalisation de l'administration marocaine est sur la bonne voie mais il n'est pas à l'abri de quelques améliorations notamment sur certains axes. Dans un premier temps, il est primordial de prendre en compte la dimension transversale du digital. Celui-ci doit être intrinsèquement créateur de valeurs et d'emploi et ceci avec une approche purement industrielle. Il y a une autre dimension liée à la bonne gouvernance à prendre en compte également. Autrement dit, il faut mettre en place un cadre juridique pour encadrer et accélérer le processus de digitalisation. Il faut une gouvernance de très haut niveau pour une transformation stratégique et numérique de notre administration. Vous dites que le Maroc est sur la bonne voie. Ce parcours est-il mesurable ? Le développement du digital au Maroc est mesurable. Quand notre pays gagne 30 points d'une année à une autre dans le classement mondial du doing business de 2018, cela veut dire que les efforts du Maroc dans sa transformation numérique commence à porter ses fruits, quand on a mis en place une plateforme collaborative pour l'inscription en ligne des auto-entrepreneurs et qu'en moins d'une année et demie on a atteint les 100.000 inscrits, c'est que nous sommes sur la bonne voie. Le fait d'ouvrir les marchés publics à la soumission électronique totale de bout en bout avec l'ensemble des opérateurs qui sont intéressés par ce service là encore…Nous avons un ensemble de gains mesurables et d'impacts palpables sur la société marocaine et l'environnement des affaires dans notre pays. Mais on est encore très loin du tout digital ? Nous avons de grands défis à relever. À ce propos, pensez-vous que nous avons les ressources humaines nécessaires pour atteindre nos objectifs en matière de transformation digitale ? Nous avons des ressources humaines de qualité mais elles ne sont pas suffisantes, c'est pour cela que je trouve pertinent le projet de formation de 700.000 jeunes marocains dans les domaines des nouvelles technologies et de l'information. Seulement, il faut comprendre que le Maroc ne peut pas et ne doit pas compter seulement sur ses ressources humaines pour réussir sa transformation numérique. C'est un projet ambitieux qui demande une forte collaboration avec le reste des pays du continent.