Rachid Naanani, président du Cluster Efficacité énergétique des matériaux de construction Les Inspirations ECO : C'est la seconde participation du Cluster efficacité énergétique des matériaux de construction au Forum EMSI Entreprises. Pourquoi ce choix ? Rachid Naanani : Parce que le concept de ce forum répond parfaitement à nos attentes. Il est composé d'une exposition ainsi que d'un forum de réflexion et d'échanges où l'on retrouve des acteurs de la formation, de la recherche-développement, de l'innovation et de la création d'entreprises. On y retrouve notamment des étudiants qui sont souvent des porteurs de projets, des enseignants universitaires, des centres de recherche et d'innovation parmi lesquels des clusters, des représentants d'institutions publiques chargés d'accompagner les TPE et TPME, des représentants de banques, etc. Par ailleurs, son organisateur, je veux parler de l'EMSI, est un exemple d'établissement de formation à suivre. Non seulement, ils ont des lauréats qui sont très demandés sur le marché de l'emploi, mais en plus son équipe pédagogique encourage fortement l'innovation où l'école est aujourd'hui reconnue au-delà du Maroc. Vous voyez, tout ceci fait que nous nous retrouvons dans ce forum. Que vous a inspiré le thème du forum axé sur l'innovation au service du développement durable ? J'étais doublement content de prendre part à la troisième et dernière table ronde de ce forum axé sur le thème de l'innovation au service du développement durable. D'abord pour les raisons que j'ai déjà évoquées. Ensuite parce qu'on était au cœur du métier du Cluster EMC dont le quotidien porte sur comment trouver des solutions innovantes pour améliorer l'efficacité énergétique des matériaux de construction et le confort de tout un chacun dans sa maison. Justement, quelles sont les réalisations que le Cluster EMC a fait dans ce sens ? Avant de vous exposer nos réalisations, permettez-moi de préciser un aspect dans la démarche d'innovation de ce cluster qui, à mon sens, revêt une grande importance. C'est qu'au niveau du Cluster EMC, nous privilégions les innovations qui portent sur des projets collaboratifs. Autrement dit, nos innovations sont collectives, elles constituent des synergies des innovations individuelles de nos membres. C'est dans ce cadre que nous avons lancé le logement à énergie positive (LEP), dont le logement pilote a été inauguré par sa majesté le roi Mohammed VI, le 27 janvier 2016. Construit au sein du Centre de formation aux métiers du BTP de l'OFPPT à Settat, ce premier logement social à énergie positive répond parfaitement aux exigences du cahier des charges marocain en matière de logement social. Non seulement il est entièrement autonome par rapport à ses besoins énergétiques mais de plus, il dégage un surplus de production électrique pouvant être injecté dans le réseau. Par ailleurs, c'est un genre d'habitations qui garantit un confort thermique et un respect des normes de santé et de confort à ses habitants. Dans la même foulée, le Cluster EMC a également réalisé la première mosquée-école à énergie positive (MEEP) qui a été présentée lors de la COP22 et inauguré en novembre 2016. Situé en milieu rural à Tadmamet dans le Grand Atlas à 60 km de Marrakech et à environ 3.500m d'altitude, le projet a été mené en collaboration avec la GIZ (Coopération technique allemande), l'association Tadmamt pour le développement, plusieurs bénévoles ainsi que l'ensemble des membres et partenaires du Cluster. À travers cet ouvrage piloté par la Commission sélection et labellisation du projet (Bureau Veritas Maroc), nous avons mutualisé le savoir-faire des membres autour d'un projet à grande valeur sociale et conforme à la RTBM (Réglementation thermique du bâtiment au Maroc. Je signale que nous sommes en train de finaliser un logement social à énergie positive (LEP) à Laâyoune. Bref, à travers ces deux projets pilotes, les membres du Cluster EMC veulent montrer qu'on peut bien faire du social partout sur le territoire marocain tout en respectant les principes de la RTBM. D'ailleurs, nous sommes en train de finaliser un important programme dans ce domaine, programme qui, nous l'espérons beaucoup, incitera les promoteurs immobiliers à changer leur démarche de construction. À côté de ces deux projets très innovants, nous sommes également engagés sur d'autres chantiers. Je citerai pêle-mêle notre projet collaboratif de réalisation d'un laboratoire de caractérisation des matériaux de construction avec le CETEMCO (Centre technique des matériaux de construction) et l'Université Hassan 1er de Settat ; la construction d'un centre de vulgarisation de l'action d'efficacité énergétique, en collaboration avec la SIE (Société d'investissement énergétique), la construction d'une école rurale à économie de ressources, un concours d'architecture pour les étudiants de l'ENA, sans oublier les études en cours ainsi que les nombreux séminaires, conférences, actions de conseil et formations que nous avons organisés, depuis notre création en 2013, y compris lors de la COP22. Vous avez pris part à la COP22 ? Oui, très activement et ceci à plusieurs niveaux. Nous avons participé en tant qu'exposant, ce qui nous a permis à travers notre stand dans la zone verte de présenter le cluster, ses membres et ses réalisations à des milliers de personnes qui ont visité la COP22. Nous avons également organisé, en partenariat avec le cluster français Advancity, un séminaire très suivi sur le thème de «la transition énergétique dans les territoires», autour de trois tables rondes où les experts des deux écosystèmes ont débattu de l'état des travaux et des enjeux en matière de transition énergétique. Des entreprises y ont également présenté leurs projets innovants et les solutions opérationnelles qu'elles mettent en oeuvre sur les territoires français et marocain. À cette occasion, nous avons signé une convention de partenariat avec Advancity. Lors de la COP22, nous avons, par ailleurs, participé à la journée sur «l'énergie dans l'industrie et dans le bâtiment» et au side event sur «l'eau : un enjeu majeur». Revenons à la RTBM. Que pensez-vous de ce dispositif que certains qualifient de prématuré ? D'abord, la RTBM devrait être appréciée comme une opportunité et non comme une contrainte par les intervenants dans l'acte de bâtir. En effet, le secteur du bâtiment reste parmi les activités les plus énergétivores dans ses exploitations et une telle réglementation est un moyen de cadrer cette problématique dans notre pays puisqu'avec elle, les orientations pour les promoteurs immobiliers sont dorénavant précisées quant au niveau d'isolation thermique à assurer par zone climatique. Aussi pour ces promoteurs, l'isolation thermique constitue un véritable attribut confort à mettre en exergue dans la commercialisation. Concernant les industriels des matériaux de construction, la RTBM constitue inéluctablement un gisement de développement de nouveaux produits destinés à accompagner ce cadre réglementaire. D'ailleurs, c'est cette démarche que nous avons adoptée au sein du cluster EMC où certains de nos membres ont développé des solutions constructives répondant aux exigences de cette nouvelle réglementation. Vous voulez dire que vous avez créé des startups ? Oui. Nous comptons à ce jour six startups dans différents domaines, notamment le conseil et l'ingénierie dans l'efficacité énergétique mais également dans la production d'énergies renouvelables. Nous sommes également partenaire d'un grand projet lancé par l'Université Hassan 1er de Settat qui est la Cité de l'innovation. Composé de divers laboratoires, d'un fablab et de pépinières de startups, ce complexe offre un cadre privilégié aux porteurs de projets et aux entreprises existantes pour mener à bien leurs projets de recherche-développement.