Le nouveau régime accuse le désormais ex-président de la Gambie, Yahya Jammeh, d'avoir pillé les caisses de l'Etat avant son exil. En plus de la précarité sécuritaire, l'absence de ressources financières viendrait compliquer le début de mandat d'Adama Barrow. Avant de partir en exil samedi, l'ancien président gambien Yahya Jammeh a volé des millions de dollars dans les caisses de l'Etat. L'accusation émane d'un conseiller de son successeur, Adama Barrow, le jour même où une mission militaire ouest-africaine a été déployée pour sécuriser le territoire. «Au moment où nous prenons en main le gouvernement, la Gambie est en détresse financière», a ainsi affirmé Mai Fatty, un proche conseiller du nouveau chef de l'Etat gambien, toujours réfugié à Dakar. La même source affirme ainsi que «les caisses sont pratiquement vides». Selon l'entourage du nouveau président, en l'espace de deux semaines, 500 millions de dalasi (monnaie locale) ont été retirés par Yahya Jammeh, soit près de 11 millions de dollars. Si ces accusations s'avèrent justes, cette «détresse financière» financière viendrait à son tour compliquer la situation dans ce pays à l'économie déjà fragile et à la population majoritairement pauvre. Retour de Barrow Hébergé par le Sénégal, à Dakar, depuis la mi-janvier, le nouveau président, Adama Barrow souhaite, pour sa part, rentrer «dès que possible». Toutefois, la sécurité en Gambie est encore jugée fragile. Le successeur de Jammeh souhaite ainsi que les forces de la Micega (la Mission de la Cedeao en Gambie) restent dans le pays jusqu'à ce que la situation générale sur le plan de la sécurité y ait été globalement rétablie. Selon un haut responsable sénégalais de la Micega, le chef de l'armée gambienne, Ousman Badjie, aurait déjà annoncé son ralliement au nouveau président. Marcel Alain de Souza, haut responsable de la Cedeao, a cependant affirmé que le pouvoir «ne pourra pas rester ainsi vacant» trop longtemps: Adama Barrow devra prendre ses fonctions «le plus rapidement possible», a-t-il indiqué. 7.000 hommes Sous d'intenses pressions diplomatiques, notamment de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao, 15 pays), l'ex-président gambien Jammeh a finalement accepté de se retirer, après 22 ans de pouvoir, et s'est envolé de Banjul pour Conakry samedi soir. Selon des sources officielles guinéennes et la Cedeao, il a ensuite pris un autre avion pour la Guinée équatoriale. Mais les autorités de ce pays restaient silencieuses dimanche soir sur sa présence sur leur sol, alors que le principal parti de l'opposition, la CPDS, a dénoncé la décision d'accueillir «l'ex-dictateur de Gambie». Depuis l'éclatement, le 9 décembre, de la crise politique gambienne, de multiples initiatives avaient été prises pour que Jammeh cède la place. Des troupes de la Micega avaient ainsi pénétré le territoire gambien dès jeudi après-midi, après la prestation de serment d'Adama Barrow à Dakar, mais elles avaient rapidement suspendu leur progression pour laisser agir la diplomatie, selon la Cedeao, qui comptait alors mobiliser jusqu'à 7.000 hommes de cinq pays. Finalement, les derniers efforts menés vendredi par la Guinée (membre de la Cedeao) et la Mauritanie (non membre de la Cedeao), ont abouti. Fiche pays GAMBIE Taille 1,849 million de consommateurs Monnaie dalasi PIB/Hbt 472 dollars Croissance 2,7% Région économique CEDEAO Doing business 2017 145e/189 Un cas d'école pour l'Afrique ? La Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'Union africaine (UA) et les Nations Unies ont félicité les dirigeants africains pour leur «réussite dans le rétablissement de la démocratie en Gambie» et se sont engagés à assurer les droits de l'ancien président du pays, Yahya Jammeh. Selon un communiqué de l'ONU publié dimanche, la CEDEAO, l'UA et l'ONU ont salué dans une déclaration «la bonne volonté et le sens de l'Etat» de l'ancien président Jammeh pour sa décision prise «dans l'intérêt du peuple gambien, et dans le but de préserver la paix, la stabilité et la sécurité de la Gambie». Les trois organisations se sont notamment engagés à collaborer avec le gouvernement gambien pour «assurer et garantir la dignité, le respect, la sécurité et les droits» de l'ancien président Jammeh, «en tant que citoyen, dirigeant de parti et ancien chef de l'Etat», et de sa famille, des membres de son cabinet, des responsables gouvernementaux, des responsables de la sécurité et des militants de son parti et des loyalistes.