Une étude de l'ONDH et de la Banque mondiale sur le développement de la petite enfance, dont les résultats viennent d'être rendus publics, accable les pouvoirs publics. Malgré les efforts déployés, les inégalités persistent tant sur le plan socio-économique que sur celui territorial. Le Maroc gagnerait à investir dans le développement de ses enfants dès leur naissance. Le royaume peut, en effet, mieux faire en matière de développement de la petite enfance (DPE). Jusque-là, en dépit des avancées enregistrées au cours des dernières années, les indicateurs montrent que le Maroc fait moins bien que d'autres pays de la région, comme la Tunisie. Les enfants souffrent des inégalités des chances en raison des circonstances de leur naissance. Le constat est dressé par une étude de la Banque mondiale et de l'Observatoire national de développement humain (ONDH), qui a porté sur deux volets: le développement de la petite enfance et l'inégalité au cours du temps et l'impact de l'initiative de développement humain sur cette tranche d'âge de la population. L'étude s'avère être de la plus haute importance. Il faut dire que peu d'enquêtes au Maroc ont passé au crible la situation de la petite enfance, une phase critique et déterminante du développement humain. Les disparités sont flagrantes au niveau national, aussi bien sur le plan socio-économique que sur celui territorial. On n'a pas enregistré d'améliorations constantes dans les niveaux de développement humain ou de diminution de l'inégalité au cours du temps, même si le Maroc a connu une bonne croissance et une réduction substantielle de la pauvreté. Un constat alarmant, d'autant plus que l'inégalité à la petite enfance agit comme un mécanisme déterminant pour l'inégalité à l'âge adulte. «Les disparités tendent à persister voire à s'aggraver». Il s'agit d'un cercle vicieux. Cette inégalité dans l'enfance est déterminante dans la transmission de la pauvreté entre les générations. Le niveau d'instruction des parents est un élément-clé, surtout celui de la mère. Et c'est là où le Maroc est à la traîne par rapport à des pays similaires comme l'Egypte et la Tunisie. Selon l'étude, l'enfant le moins favorisé est celui dont la mère et le père n'ont reçu aucune éducation, né dans un des 20% des ménages les plus pauvres dans le milieu rural de la région de Tensift. En revanche, l'enfant le plus favorisé est celui dont les parents ont atteint l'enseignement supérieur, qui a vu le jour dans un des 20% de ménages les plus riches dans une zone urbaine de la région du centre. Les inégalités sont importantes en matière d'accès aux soins précoces et de nutrition (risques de souffrir du retard de croissance et d'insuffisance pondérale). Les chiffres en témoignent. Les enfants les moins favorisés ont un risque de 33% d'avoir un retard de croissance contre un pourcentage de 5 % pour les plus favorisés. Même au niveau du développement social, affectif et cognitif, les inégalités sont des plus grandes et des plus persistances. À titre d'exemple, les enfants les plus favorisés ont 79% de chance de bénéficier d'activités de développement en 2011 contre 18% pour les moins favorisés. Les déficits et les inégalités ne sont pas une fatalité. Les pouvoirs publics peuvent y remédier en investissant dans le développement de la petite enfance, comme le soulignent les auteurs de l'étude. Les investissements doivent porter particulièrement sur la période prénatale et dans les premières années. Le lancement de programmes de qualité dédiés à la petite enfance pour les plus pauvres est susceptible de conduire à des gains importants dans la vie des enfants défavorisés et de réduire les disparités économiques plus tard. La promotion de la scolarisation et la sensibilisation des parents s'avèrent également d'une grande utilité. La production des données sur les progrès et les défis peuvent aider à identifier les programmes et les politiques qui fonctionnent, ainsi que ceux qui ne fonctionnent pas en vue d'opérer le changement escompté. L'Initiative nationale pour le développement humain pourrait créer un programme spécifique axé sur le développement de la petite enfance. D'après l'étude, alors que l'INDH a conduit à certaines améliorations des résultats économiques, ses impacts ne sont pas perceptibles au niveau du développement de la petite enfance en termes de santé (soins prénataux et d'accouchement), d'éducation (enseignement préscolaire) ou de nutrition. «Ajouter des cibles spécifiques de DPE au programme de l'INDH pourrait aider le programme à améliorer non seulement le DPE, mais aussi le développement humain et économique et réduire la pauvreté et les inégalités». Selon l'étude, le ciblage du DPE à travers l'INDH pourrait être un moyen d'avoir une plus grande incidence sur le développement humain à long terme. Les investissements dans le développement de la petite enfance donnent, en effet, toujours des taux de rendement élevés et les interventions de DPE affichent toujours des impacts positifs. Un exemple de programme de développement communautaire mis en œuvre en Indonésie pourrait être suivi par l'INDH. Après avoir constaté que ce programme ne donnait pas les fruits escomptés en matière de santé et d'éducation, il a été décidé de s'atteler à ces deux secteurs en octroyant des subventions aux collectivités participantes pour atteindre les objectifs liés à la santé et à l'éducation maternelles et infantiles. Le montant de la subvention pour l'année suivante sera conditionné par les résultats obtenus. Tags: INDH Petite enfance Banque mondiale inégalités Maroc Tunisie