Invité du Conseil régional de Casablanca-Settat, Moulay Hafid Elalamy est revenu sur les grandes lignes de son projet de charte de l'investissement, les mesures fiscales en faveur de l'industrie et le bilan du Plan d'accélération industrielle. Après l'avoir présenté en Conseil des ministres, le 23 juin dernier, Moulay Hafid Elalamy prend son bâton de pèlerin pour expliquer son projet de charte de l'investissement. Le ministre de l'Industrie, du commerce, de l'investissement et de l'économie numérique a été l'invité, mardi dernier, du Conseil régional de Casablanca-Settat pour un débat autour des nouveautés du document. Car, justement, le projet fait la part belle à la région dans la mise en œuvre de la nouvelle doctrine de l'Investissement. «L'un des éléments essentiels de la réflexion autour de ce sujet est que la mise en œuvre verticale d'un plan doit avoir une dimension régionale, surtout dans la nouvelle organisation territoriale du pays. Sinon, les chances de réussite diminuent sérieusement», précise d'emblée le ministre. Pour lui, la charte de l'investissement actuelle, qui date de 1995, a fait son temps. Un toilettage s'impose en y introduisant des mesures incitatives en faveur du secteur industriel. «L'agriculture, l'immobilier, le tourisme... tous ces secteurs ont bénéficié d'avantages fiscaux dans le passé. Aujourd'hui, le vent n'est pas favorable à ces branches, et c'est probablement irréversible. L'industrie doit avoir sa chance, car c'est l'un des rares vecteurs de développement dont dispose le pays», avance Moualy Hafid Elalamy. Incitations L'impôt sur les sociétés (I.S) à 0% pour les industriels en création pendant une durée de cinq années s'inscrit dans ce cadre. Mesure phare de la nouvelle la charte, cette exonération a suscité de vives réactions de la part des opérateurs économiques qui ont pris part à cette rencontre. «Oui, mais durant les premières années, l'entreprise fait des résultats très moyens quand elle n'est pas déficitaire. Donc l'impact de cette mesure restera minime», lance l'un d'entre eux. «Ceci dans le cas où la déclaration d'impôt est transparente», répond du tac au tac Elamaly. Mais généralement, ce n'est pas le cas, ce qui fait que, lorsque la société s'adresse à la banque pour solliciter un crédit, ses bilans ne sont pas bancables. «Nous voulons éviter ce genre de situation et partir sur de bonnes bases», ajoute le ministre. Quid alors des entreprises industrielles déjà existantes? «Elles devaient également bénéficier de cet avantage. Mieux encore, mon souhait était de réduire l'IS de 50% sur les 15 ou 20 ans qui suivent. Mais on s'est rendu compte que les moyens financiers du pays ne le permettent pas. J'ai poussé au maximum et c'est tout ce que j'ai pu obtenir. Mais ce n'est que partie remise...», explique Moulay Hafid Elalamy. Les autres mesures du pack (le développement d'au moins une zone franche par région, l'octroi d'un statut «Zone franche» aux grandes industries exportatrices se trouvant hors zone franche, l'octroi du statut «Exportateur indirect» aux sous-traitants et la mise en place d'appuis diversifiés au profit des régions les moins favorisées» ont en revanche été favorablement accueillies par les opérateurs. Accélération Le ministre a profité de son passage pour donner un aperçu sur l'état d'avancement de son Plan d'accélération industrielle. Et d'après le bilan arrêté à mi-juin dernier, le plan semble prendre sa vitesse de croisière: 41 écosystèmes lancés couvrant 12 secteurs, 427.000 emplois engagés sur la période 2014-2020 et 160.000 contractualisés entre 2014 et 2016, 17,3 MMDH engagés (sur les 20 MMDH du Fonds de développement industriel)...Trop beau pour être vrai? En tout cas, le bilan a suscité quelques interrogations. «Vos chiffres sur l'emploi me laissent perplexe. D'après le HCP, l'économie marocaine a créé 33.000 emplois entre 2014 et 2015. Comment expliquer ce décalage?», demande énergiquement Abdellilah Hifdi, président de la Fédération nationale du transport. Réponse du ministre: «Les enquêtes du HCP se font auprès des ménages. Mes chiffres, quant à eux, sont recueillis auprès des entreprises; c'est du concret». Moulay Hafid Elamaly, Ministre de l'Industrie, du commerce, de l'investissement et de l'économie numérique L'objectif ultime est que toutes les stratégies convergent vers le citoyen pour lui offrir ses services de qualité et une ouverture sur le monde. Et pour arriver, nous partons du constat qu'il y a une forte corrélation entre le niveau de l'investissement et le taux de croissance. La charte de l'investissement actuelle, qui remonte à 1995, est illisible, et même les gens de l'administration ont des difficultés à s'y retrouver. Le toilettage de ce texte propose un tronc commun à tous les secteurs d'activité, des offres sectorielles et d'autres territoriales. Le tout avec des mesures incitatives à même de donner un nouvel élan aux investissements». Mustapha Bakkoury, Président de la Région de Casablanca-Settat La nouvelle charte de l'investissement consacre le rôle central de la Région dans la mise en œuvre des stratégies et plans sectoriels. Une région comme Casablanca, qui représente 60% de l'industrie du royaume, 34% des services, 12% de l'agriculture et 47% des exportations, est une véritable locomotive si on arrive à régler les problèmes qui entravent l'investissement. Les opérateurs économiques font en effet face à des obstacles liés à la logistique, au climat des affaires, à la lenteur de l'administration...Et tout cela ralenti la croissance et la création d'emplois».