«Le Brexit : Une opportunité ou une menace pour le Maroc ?» Telle est la question shakespearienne que se pose le monde des affaires au Maroc. Eléments de réponses. Que signifie le Brexit pour la Grande-Bretagne et pour notre économie ?», s'interroge Karen Betts, l'ambassadrice du Royaume-Uni au Maroc, devant un parterre d'opérateurs économiques venus nombreux assister à la conférence sur l'effet du Brexit pour le Maroc, organisée par la Chambre de commerce britannique au Maroc (BritCham) le 19 juillet à Casablanca. Et la diplomate tente une réponse : «À l'heure actuelle, je ne peux vous donner une réponse exhaustive, ce que je sais est que le Royaume-Uni sortira de l'Union européenne (UE) et se forgera un nouveau rôle dans le monde». Pour le moment, l'agenda et les modalités de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne n'ont pas été fixés par les deux parties, le flou persiste sur ces deux points. Seule certitude : «Brexit veut dire Brexit ; et il n'y aura pas de deuxième référendum», c'est l'engagement de Theresa May, le nouveau Premier ministre de l'Angleterre. Les deux parties disposent de deux ans pour clôturer ce processus. Une période propice pour le Maroc et le Royaume-Uni pour préparer le nouveau cadre d'échanges commerciaux et juridiques entre les deux pays. Des zones d'incertitude Christophe Bachelet, partenaire-pays au cabinet d'avocats international DLA Piper a apporté son expertise sur les impacts pour les contrats commerciaux ou financiers entre opérateurs des deux pays. L'avocat d'affaires identifie quatre contrats concernés par ce changement de statut du Royaume-Uni. Tout contrat faisant référence à l'UE comme territoire référence, les contrats avec une contrepartie au Royaume-Uni, les contrats avec un arbitrage à Londres ou impliquant un actif dans ce pays et les contrats soumis au droit anglais devront être impactés par le Brexit. «Cette liste est non limitative», précise Bachelet. L'impact juridique sur ces quatre contrats devrait amener les opérateurs marocains à surveiller les clauses qu'ils contiennent. Sept clauses (voir schéma) devront préoccuper les hommes et femmes d'affaires marocains opérant avec le Royaume-Uni. Plus précisément, les clauses de risque de change font partie des points à manier avec précaution. Le Brexit peut s'accompagner dans les prochains mois par une dépréciation de la Livre sterling et affecter la valeur économique et financière du contrat. Pour cette raison, l'avocat d'affaires recommande «de mettre en œuvre un instrument de couverture du risque». S'il existe déjà dans un contrat signé avant le 23 juin, date du vote britannique, la couverture du risque de change doit être reconsidérée, compte tenu du nouveau contexte politique et économique. Une autre clause à surveiller de près est celle du droit applicable dans les contrats. «Il y aurait une remise en question du droit anglais comme droit régissant le contrat du fait de sa probable sortie du droit européen», prévoit Bachelet. Avant de tempérer : «Cependant, le droit anglais est omniprésent dans le cadre des projets et financements internationaux et imposé par les grandes institutions financières dont certaines basées à Londres». Face à ces risques juridiques et zones d'incertitudes, la diplomate britannique se veut rassurante et plaide pour un partenariat commercial dans le cadre d'un futur accord de libre-échange (ALE). Vers un ALE Maroc-UK ? Actuellement, le Maroc est le septième marché d'exportation du Royaume-Uni et accueille 1% des investissements britanniques dans le monde. Les échanges bilatéraux de biens et de services s'élèvent à 2 milliards de Livres sterling par an ; aujourd'hui ils portent principalement sur les services financiers, l'aéronautique, l'énergie, les mines et l'ingénierie avancée. «J'affirme depuis bien longtemps qu'il y a encore de vraies possibilités d'amélioration, il y a effectivement de nombreuses opportunités concurrentielles des deux côtés», souligne Karen Betts. La sortie du pays aurait un effet sur les échanges commerciaux qui sont régis par l'ALE Maroc-UE. En tant qu'ardent défenseur du libre-échange, le Royaume-Uni multipliera ces accords, y compris avec le Maroc. «Nous savons qu'après le Brexit, nous allons devoir conclure des ALE avec nos partenaires partout dans le monde. Notre nouveau ministre du Commerce international, Dr Liam Fox, estime que la liberté de conclure des accords bilatéraux est pour le Royaume-Uni une opportunité de devenir un centre de commerce international ouvert. Il considère que c'est une chance pour façonner l'avenir plutôt que de réagir au passé». Karen Betts Ambassadrice du Royaume-Uni au Maroc Le Royaume-Uni et le Maroc ont eu des relations commerciales qui remontent à plusieurs siècles. Notre relation avec le Maroc demeure inchangée. Notre engagement restera aussi fort qu'il l'a toujours été afin de renforcer nos liens bilatéraux, qu'ils soient politiques, économiques, sécuritaires ou culturels. Le Royaume-Uni continuera à considérer la sécurité et la prospérité du Maroc comme étant liées à sa propre sécurité et prospérité. C'est le bon moment pour célébrer notre solide amitié et les relations commerciales entre nos deux pays. Ce nouveau départ représente une belle opportunité de capitaliser sur nos réussites».