La baisse des taux immobiliers appliqués aux acquéreurs se confirme. Quelle est sa portée, et quels sont ses impacts ? Analyse. Les incitations fiscales octroyées par l'Etat, notamment pour le logement social ont, certes, relancé le secteur de l'immobilier en 2010, mais ce modèle s'est essoufflé quelques années plus tard. C'est ce qui fait, d'ailleurs, que plusieurs grands groupes immobiliers connaissent de nos jours des difficultés entraînant dans leur sillage des entreprises de construction, alors même que le modèle en question est derrière leur réussite. La cadence de mise en chantier est au ralenti et l'Etat n'arrive pas à trouver la formule pour que le moyen standing attire les investisseurs afin de relancer le secteur. Aujourd'hui, les banques tentent par tous les moyens de limiter les «dégâts» en proposant des taux d'intérêt de crédit immobilier incitatifs aux acquéreurs. «C'est en 2015, grâce à la campagne agressive d'une des banques de la place qui proposait un taux fixe de 4,5% HT, que la tendance a été amorcée. La tendance de baisse des taux immobiliers a démarré en juin 2015 grâce au Crédit du Maroc qui avait ouvert la marche avec sa campagne «Imposta7il». Cette dernière a permis de casser une barre, celle des 5%. Les acquéreurs voyaient un taux qui était affiché de 4,5% et qui était accessible à tous», nous explique Yassine Lahlou, directeur général de Meilleurtaux.ma. Au début, les banques concurrentes n'ont pas cédé à la tentation. Une deuxième campagne est venue confirmer la tendance de baisse un taux variable de 3,99%. Ce même taux, batprisé «taux capé», pouvait évoluer dans une fourchette de 3,5% à 5,5% hors assurance. Enfin, en septembre dernier, un important promoteur immobilier a lancé une campagne de commercialisation de biens immobiliers haut de gamme avec un taux fixe à 3,99% hors assurance qui a confirmé que la baisse des taux était une réalité. Au dernier trimestre 2015, les banques à capitaux étrangers ont été particulièrement agressives en offrant d'excellentes conditions de taux afin de capter notamment de très bons dossiers. Les plus grandes s'adaptent Cependant, ces différentes offres, très attractives, n'ont pas complètement modifié le paysage des conditions de crédits au Maroc. En effet, la plupart des grandes banques détenant les plus importantes parts de marché continuaient de proposer des taux autour de 5,80% hors assurance. Après avoir résisté durant le deuxième semestre 2015, les directives de début d'année des différents sièges des grandes banques de la place ont été beaucoup plus agressives, notamment chez les leader du marché (BCP, Attijariwafa bank). «Quand les banques ont vu que le marché était en train d'évoluer et que les clients avait intégré cette nouvelle donne, elles se sont adaptées. Nous avons ainsi vu que les autres banques, notamment les trois plus grandes banques marocaines, ont créé des offres plus ou moins similaires. Aujourd'hui, le marché s'est regroupé autour d'une offre dans le fixe qui est à 50 voire 60 points moins chère qu'il y a un an et demi», nous confie Yassine Lahlou. Aujourd'hui, toutes les banques se retrouvent en compétition dans le fixe, dans une fourchette comprise entre 4,5% et 4,7% pour les très bons dossiers et entre 5% et 5,15% pour les moins bons. Dans le variable, les taux sont encore plus bas. On parle d'un taux plancher de 3,80%. Un bel impact sur la demande Plusieurs éléments ont plaidé en faveur de la baisse des taux immobilier depuis mi-2015, à commencer par les deux baisses successives opérées par Bank Al-Maghrib qui ont induit un coût de l'argent plus bas. Deuxièmement, la conjoncture actuelle marquée par la baisse de la quantité de crédits aux entreprises fait plus que jamais du crédit immobilier l'outil numéro 1 du développement des portefeuilles bancaires. Aussi, la baisse des transactions immobilières place les acheteurs en position de force et leur permet de prendre leur temps avant de signer un compromis de vente d'une part et de chercher le meilleur crédit de l'autre. La baisse de la demande va ainsi conduire les banques à se concurrencer, à se battre pour attirer de nouveaux clients. En effet, l'agressivité commerciale des banques était moins soutenue, jusqu'au moment où le Crédit du Maroc a lancé sa campagne. Par ailleurs, la baisse des taux immobiliers a eu un bel impact sur la demande de crédits immobiliers acquéreurs. En effet, «Certes, le prix du mètre carré n'a pas baissé, mais c'est le coût d'acquisition de ce mètre carré qui diminue sensiblement. Vu que la majorité des acheteurs financent leurs acquisitions à travers le crédit bancaire, cela a permis de relancer la demande», nous explique Lahlou. L'expert demeure optimiste. La demande de crédits immobiliers devrait s'accentuer pour le reste de l'année en cours. La tendance pour le deuxième semestre S'agissant de la tendance des taux immobiliers pour le reste de l'année, elle est plus difficile à prévoir, surtout que l'on n'a jamais eu accès à des taux aussi peu élevés. En effet, «Les taux sont déjà bas et à un niveau intéressant. La Banque centrale aide comme elle peut les banques en matière de taux, parce qu'elle souhaite une relance économique, mais en même temps elle doit gérer une inflation. Elle a déjà fait un énorme effort qui a eu son impact puisque les banques ont suivi. Je ne pense pas qu'on ira vers une autre vague de baisse ou à des taux comme ceux appliqués en France (ndlr: taux à 2,5%)», nous explique notre expert. Pour lui, le marché marocain devrait se stabiliser entre 4,5 et 5% pour le reste de l'année. «Il est intéressant de voir qu'on peut déjà faire des économies très importantes sur le coût d'acquisition par rapport à l'année dernière. Personnellement, je pense que si quelqu'un a l'opportunité d'acheter aux taux d'intérêt actuels, il ne faut pas attendre. Ce sont des niveaux historiques; il y a 15 ans, nous étions à 12%» affirme Lahlou. Soulignons également que, pour se différencier, certaines banques proposent des produits de financement immobiliers innovants qui offrent une certaine flexibilité aux clients et qui s'adaptent à leurs besoin. Il est vrai qu'entre deux crédits similaires sur le plan du taux, c'est celui qui offrira le plus d'avantages en termes de flexibilité et qui sera le plus adapté à la situation du client qui sera retenu par ce dernier. En revanche, entre un crédit flexible et un autre moins cher qui n'est pas flexible, le client va automatiquement choisir le deuxième. Nous sommes souvent sur un marché où le coût l'emporte sur les options du crédit.