Lamia Tazi : DG de Sothema Lors de la visite royale en Russie, Sothema a fait partie des entreprises marocaines qui ont conclu des partenariats avec leurs homologues russes. De retour de Russie, la DG du laboratoire marocain nous livre les détails de ce mémorandum d'entente, les perspectives de développement vers les marchés africains, du Moyen-Orient et les pays du Golfe. Lamia Tazi regrette que la préférence nationale n'ait pas été appliquée sur les marchés publics du médicament. Interview. Les Inspirations ECO : En quoi consiste le mémorandum signé entre Sothema et le laboratoire russe Biocad ? Lamia Tazi : Cette convention permettra un transfert de technologie de pointe pour la fabrication de produits anticancéreux au Maroc. Il s'agit de produits de traitements du cancer qui pourront être mis sur le marché à des prix compétitifs. Cette convention nous permettra également de distribuer ces produits dans le reste de l'Afrique, où Sothema est déjà présente, entre autres, à travers sa filiale West Afric Pharma. Combien de temps ont pris les préparatifs de cet accord ? La signature de ce contrat a nécessité deux ans de préparation. La biotechnologie est un domaine pointu où la sécurité des médicaments est très importante. Un échange d'expertises et des discussions avec notre partenaire russe ont été nécessaires pour maîtriser cette technologie. Un plan de formation de nos équipes est également prévu. Comment a évolué l'activité de Sothema ces deux dernières années ? Suite à la baisse des prix des médicaments et face à un marché en stagnation, Sothema a pu récupérer le gap grâce au lancement de nouveaux produits. Comment évolue votre activité en Afrique francophone ? Notre présence en Afrique francophone se fait à travers notre filiale au Sénégal ainsi qu'avec la promotion directe dans les autres pays. La même stratégie de lancement de produits au Maroc est poursuivie dans le reste de l'Afrique. Ainsi, le développement de nos produits se fait avec la même vitesse dans tous les pays. Globalement, l'activité sur le continent se développe bien. Par contre, l'activité connaît une évolution différente, selon les pays. La filiale sénégalaise avec sa composante industrielle a plus de mal à atteindre l'équilibre. Nous travaillons avec le gouvernement sénégalais pour des mesures d'accompagnement, afin de favoriser la production locale. Comptez-vous prospecter de nouveaux pays ? Nous sommes en train de prospecter la partie lusophone de l'Afrique. En Angola, nous devons signer un partenariat pour réaliser la promotion de nos produits dans ce pays. Pour la partie anglophone, c'est un marché difficile, où nous avons démarré la prospection. Comment évolue votre activité dans la région MENA ? Ce marché prometteur a été impacté négativement par l'instabilité politique de cette région. Malheureusement, trois pays (Libye, Irak et Yémen) où nous distribuons nos produits sont touchés par la guerre. La situation sur place avec les difficultés logistiques font que le CA à l'export dans cette région est très variable. Vous venez d'enregistrer un produit dans un pays du Golfe. Quelles sont vos ambitions sur ce marché ? Exactement, nous venons de lancer une activité export dans les pays du Golfe. Nous sommes le premier laboratoire marocain à enregistrer et à lancer un produit 100% marocain aux Emirats. L'enregistrement a été réalisé en janvier, un autre est en cours : le process de généralisation dans la région du CCG a déjà été initié. Pour nous, c'est un exploit, car il n'est pas facile d'obtenir des enregistrements dans ces pays où le taux de pénétration des médicaments princeps est élevé et où l'industrie locale couvre les besoins régionaux. Le fort pouvoir d'achat local ne laisse pas de place aux génériques. Cette région est un vrai challenge pour nous. Nous avons pour projet d'y installer un bureau régional. Sothema s'oriente vers la sous-traitance au profit de laboratoires internationaux, pourquoi ce choix ? Nous disposons d'une longue expérience et d'un outil industriel de six usines. Ces atouts nous permettent d'assurer une sous-traitance de grande qualité pour des laboratoires européens. Cette orientation fait partie de notre stratégie de développement pour diversifier nos activités, surtout que le marché national connaît une stagnation avec une croissance de 0,9%. Votre laboratoire s'est battu pendant de longues années pour la préférence nationale, cette mesure est-elle acquise sur les marchés publics du secteur ? Rien n'a été fait concrètement sur le terrain, il n'y a pas eu de préférence nationale. Nous avons essayé de nous battre sur ce dossier mais nous n'avons pas réussi. Cette mesure n'a pas été mise en place pour le moment. Notre combat était sur le dossier de l'insuline avec la requête anti-dumping contre l'importateur. Nous avons eu gain de cause sur ce dossier et nous avions été épaulés par les ministères de l'Industrie et de la Santé, en appliquant des droits de douane à ce laboratoire européen. Comment le ministère de la Santé peut-il mettre en place la préférence nationale sur ces marchés publics ? Le secteur médicament est spécifique. D'abord, les appels d'offres sont nationaux et non pas internationaux comme c'est le cas pour d'autres secteurs : le médicament doit être enregistré au Maroc par une entité marocaine pour participer à un appel d'offres. Ces critères compliquent la mise en place de cette préférence nationale. Mais la vraie bataille est celle entre le médicament fabriqué localement et celui importé. Nous plaidons pour une préférence à la fabrication locale. Les écosystèmes élaborés par le ministère de l'Industrie vont dans ce sens. Tags: Industrie pharmaceutique