Le secteur bancaire devrait reproduire des tendances globalement similaires à celles de 2015, avec à nouveau une faible croissance des crédits et une croissance des dépôts proche de son rythme tendanciel à moyen et long termes. Une nouvelle baisse du coéfficient d'emploi est attendue. L'année 2015 a été mitigée pour le secteur bancaire marocain. En effet, le secteur a connu d'une part une nouvelle décélération de la croissance des crédits et d'autre part une poursuite de la hausse des dépôts. Les créances en souffrance (CES) ont connu une décélération de leur rythme de croissance à 7% contre +20% en 2014. En 2016, le secteur bancaire devrait reproduire des évolutions globalement similaires à celles observées en 2015 à en croire les analystes de CFG Bank. «Dans un contexte économique mitigé, marqué d'une part par une faible croissance économique et d'autre part par la poursuite de l'amélioration des finances publiques et de nos échanges extérieurs (hausse de nos réserves en devises), le secteur bancaire devrait reproduire des tendances globalement similaires à celles de 2015, avec à nouveau une faible croissance des crédits et une croissance des dépôts proche de son rythme tendanciel à moyen et long termes», prévoient les analystes de la banque dans une note d'analyse. Faible croissance des crédits Pour rappel, si les dépôts ont affiché une croissance soutenue en 2015, pour la deuxième année consécutive, avec une hausse de 6,4%, les crédits ont, eux, pâti de la persistance d'une faible demande, affichant une croissance de 2,7%. «La hausse des crédits a été notamment tirée vers le bas par la baisse des crédits aux promoteurs immobiliers (-9,4%), en lien, entre autres, avec la stratégie de désendettement de certains gros promoteurs», expliquent les mêmes experts. L'encours des crédits de trésorerie a aussi contribué négativement à l'évolution des crédits au Maroc, affichant une baisse de 4,7%. Cette situation s'expliquerait, à en croire nos analystes, en partie par l'amélioration de la liquidité chez certains opérateurs en lien avec l'accélération des règlements des arriérés de paiement de l'Etat, en particulier dans le cas des distributeurs de produits pétroliers qui ont perçu l'ensemble de leurs créances sur la Caisse de compensation courant 2015. De leur côté, les crédits à l'équipement et les crédits à la consommation affichent une décélération à +0,6% et +4,9% respectivement contre +3,7% et +9,2% en 2014, alors que les crédits à l'habitat se sont inscrits en hausse de 5,4%. Notons que les créances diverses ont connu un accroissement de 17%, tiré par la hausse de 20% des crédits à caractère financier, en raison d'un rebond significatif de l'encours octroyé aux OPCVM à 33,3MMDH (contre 16,7 MMDH en 2014). Décélération des créances en souffrance Parallèlement, le secteur bancaire a aussi connu un ralentissement de la croissance des CES à 56MMDH, soit une croissance de 6,9% contre +20,2% en 2014 et +23,8% en 2013, représentant un taux de créances en souffrance de 7,16% contre 6,9% en 2014. La hausse des créances en souffrance a été tirée par le segment des entreprises (+11,3% à 32,7MMDH) et dans une moindre mesure par les ménages (+1,3% à 22,8MMDH). «Notons que la persistance d'une croissance soutenue des CES au niveau des entreprises comparativement aux ménages est due en grande partie à certains dossiers spécifiques tels que le raffineur Samir et le développeur immobilier Alliances», soulignent les analystes de CFG Bank. Toutefois et malgré cette augmentation, le taux de CES reste inférieur à la moyenne constatée sur les dix dernières années (10,2%). Au final, ces réalisations se sont traduites par une contraction du coefficient d'emploi, qui passe de 99,2% en 2014 à 95,8%. Nouvelle baisse du coefficient d'emplois En 2016, le secteur bancaire devrait reproduire des tendances globalement similaires à celles de l'année dernière. Selon les calculs des analystes de CFG Bank, le rythme d'accroissement des encours de crédits devrait s'établir à +2%. Cette évolution devrait être le fruit d'une conjonction de facteurs, à savoir une stabilité des crédits de trésorerie à 172MMDH contre une baisse de 4,7% en 2015, une faible croissance des crédits à l'équipement de 1%, suite à une faible croissance de l'investissement, mais aussi une légère accélération des crédits immobiliers à 2,8%, grâce au crédit à l'habitat (+6%) et malgré une légère baisse des crédits aux promoteurs (-2%). Ajouter à cela que les analystes s'attendent à une hausse des crédits à la consommation de 4%. Pour leur part, les créances en souffrance devraient croître de 7%, soit une hausse du taux de CES de 37 points de base à 7,57%. De leur côté, les dépôts devraient s'établir à 863MMDH, en progression de 5,4%. La hausse des dépôts rémunérés restera plus soutenue que la progression des dépôts non-rémunérés. «Nous estimons la part des dépôts rémunérés à 43,5% contre 43,2% en 2015. Ces évolutions des dépôts et crédits devraient conduire en 2016 à un coefficient d'emploi de l'ordre de 92,1%, soit son niveau le plus bas depuis 2007», considèrent les analystes. Potentiel de croissance certain Plus globalement, ces derniers estiment que les niveaux de pénétration du secteur bancaire marocain devraient se stabiliser, voire légèrement augmenter à moyen terme. Actuellement, le secteur bancaire marocain montre des signes de maturité, compte tenu d'un taux de bancarisation relativement élevé par rapport aux pays comparables. En effet, le Maroc est l'un des pays les plus bancarisés de la région MENA et en Afrique, l'encours des crédits bancaires (hors crédits accordés aux sociétés financières) s'établissant aujourd'hui à 85% du PIB. Plus particulièrement, les crédits accordés aux ménages sont de l'ordre de 30,8% du PIB, contre 31,3% en 2014, soit un niveau supérieur à des pays comme la Turquie (20%), la Tunisie (22%) et proche de celui de l'Afrique du sud (33%). Au niveau du segment des entreprises, les crédits bancaires accordés aux sociétés non financières représentent 53% du PIB. En intégrant la dette obligataire et la dette extérieure des entreprises nationales, cette proportion passe à 70% contre 74% en 2014 (baisse des crédits aux entreprises en 2015), un niveau légèrement plus bas que celui de la Tunisie (75%), et supérieur à l'Egypte (29%). Compte tenu de ces paramètres, les analystes de CFG Bank estiment que la croissance tendancielle du secteur bancaire marocain devrait être contenue à un niveau proche de la croissance nominale du PIB, soit autour de 5% à 6%. L'Afrique s'impose «Face à cette situation, la stratégie d'expansion des trois premières banques marocaines en Afrique subsaharienne et au Maghreb se justifie pleinement», confient-t-ils. En effet, la part de l'international dans les résultats des banques opérant en dehors du Maroc (ATW, BCP, BMCE) à travers 40 filiales a augmenté, s'établissant à 22% en moyenne au premier semestre de l'année dernière (BMCE : 35%, ATW : 16% et BCP : 15%). «Nous avons la conviction que cette proportion devrait augmenter sur les prochaines années, compte tenu de la faible pénétration des services bancaires dans cette région, emblématique d'un fort potentiel de croissance, ainsi que du bon positionnement des banques marocaines dans la région, les trois groupes bancaires marocains implantés en Afrique de l'Ouest faisant partie du top 5 en termes de parts de marché», affirment les mêmes experts. Par ailleurs, à en croire ces derniers, la stratégie d'amélioration continue des process et la rationalisation des coûts qu'adoptent les banques marocaines au niveau de leurs filiales africaines, devraient se traduire par une baisse des coefficients d'exploitation permettant l'amélioration de la rentabilité de ces dernières. Neutre sur ATW Bien que les analystes de CFG Bank soient neutres sur le secteur bancaire dans son ensemble, ils ont émis une recommandation sur Attijariwafa bank. Et pour cause, celle-ci continue selon eux de présenter un intérêt boursier certain. Parmi les arguments évoqués par les analystes, le fait que cette banque se différencie nettement de son secteur d'activité par ses ROA et ROE plus élevés, la structure diversifiée de son PNB en termes de sources de revenus et de répartition géographique et son taux de couverture des CES largement supérieur à celui du secteur bancaire national. Cela conforte la conviction de ces analystes sur la capacité du groupe à revenir plus rapidement que les autres groupes bancaires marocains à un coût du risque normatif, à l'image des performances réalisées en 2015 avec une baisse de 27% du coût du risque tout en améliorant le taux de couverture des CES à 72%. L'ensemble de ces facteurs a poussé les analystes de CFG Bank à recommander la valeur à l'achat, avec un cours cible de 388DH par action (+18%).