290.000 m2 d'immobilier de bureau sont aujourd'hui inoccupés à Casablanca. L'obsolescence de ce parc de plateaux de bureau serait aujourd'hui la plus grande menace qui plane sur le secteur. Des programmes de reconversion, d'adaptation voire de démolition doivent être explorés. L'immobilier de bureau vit l'un de ses moments les plus difficiles à Casablanca. Alors que l'offre connaît une explosion, la demande demeure atone. Après une absence de 4 ans, la dernière étude de Lazrak Immobilier sur le marché du bureau dans la métropole vient mettre la lumière sur la situation du secteur. Après une période de production intensive ces 10 dernières années, le marché de bureaux exclusifs a cumulé en 2015 à plus de 1,6 million de m2 contre 1,2 million de m2 estimés en 2011 à l'occasion de la première édition de son enquête sur le marché du bureau à Casablanca. Autrement dit, le secteur aurait connu une augmentation de 400.000 m2, soit l'équivalent de 100.000 m2 de production annuelle. Face à cette déferlante, la demande s'est plutôt dirigée vers des déménagements depuis des bureaux en centre-ville ne répondant plus aux exigences de leurs locataires ou propriétaires vers de nouveaux centres de gravité notamment, à la Marina de Casablanca et à Anfa Place. Sur les 400.000 m2, près de 25% sont des livraisons effectuées par ces deux centres. À eux seuls, ces plateaux ont cumulé l'équivalent de 100.000 m2. De la vacance à l'obsolescence Selon les experts de Lazrak Immobilier, la plupart des nouveaux locataires étaient situés dans d'autres quartiers à Casablanca, et leur déménagement risque de causer quelques soucis. «La sonnette d'alarme, nous la tirons par rapport à l'immobilier qui sera désormais vacant et qui menace d'obsolescence», prévient Karim Tazi, directeur général adjoint à Lazrak Immobilier. Sur l'ensemble du parc bureau à Casablanca, 290.000 m2 seraient aujourd'hui vacants, soit environ 20% de celui-ci. Le rallongement des délais d'écoulement de ce type d'offre n'est pas de nature à arranger les choses. Dans certains quartiers de la ville, le rythme d'écoulement d'un immeuble de taille moyenne peut aller jusqu'à 24 mois (voir tableau). Selon la nouvelle étude, cette situation oblige les propriétaires des biens à repenser stratégiquement leurs portefeuilles et à étudier des valorisations différentes (reconversion en résidentiel, restructuration, rénovation...), certains immeubles pouvant même devenir des valeurs foncières à titre exclusif. «Ainsi, les stratégies de gestion de l'obsolescence doivent intégrer plusieurs dimensions: dynamique de marché, attractivité future de l'adresse et enfin le volet technique lié à l'actif», explique Youssef Lailani, directeur investissement à Lazrak Immobilier. Sur la partie technique, plusieurs options s'offrent pour l'amélioration des performances: le réaménagement pour les immeubles de moins de 10 ans, la rénovation pour ceux de plus de 10 ans et des restructurations pouvant aller à la démolition et le changement d'usage pour des immeubles de plus de 25 ans. L'étude considère qu'environ 15% du parc, soit environ de 240.000 m2, nécessite des restructurations lourdes ou un changement d'usage. Le reste devrait prévoir du rafraîchissement ou de la rénovation. «Le manque d'esthétisme et de modernité des immeubles fait aussi partie de l'obsolescence, car aujourd'hui les entreprises sont sensibles à l'image qui peut être véhiculée à travers leurs locaux», explique également l'étude. La PME, laissée pour compte Il faut dire que peu de plateaux de bureau sont aujourd'hui adaptés à la demande des TPE/PME. La quasi-absence de cette composante fondamentale du tissu économique marocain dans le marché de l'immobilier de bureau s'explique aussi par le difficile accès au crédit auquel fait face cette catégorie. En outre, les propriétaires doivent prendre en considération la question des primes de risque surtout avec la recrudescence des défaillances d'entreprises durant ces dernières années. «Pourtant, c'est peut-être grâce à la PME que se réglera le problème du parc potentiellement obsolète pour peu que les propriétaires proposent un loyer plus accessible», présage Tazi. Pour ce faire, une prise de conscience doit également être faite auprès des promoteurs et propriétaire: «Ce n'est pas la crise, en tout cas pas encore, mais les promoteurs doivent prendre conscience qu'ils ne peuvent plus faire des marges de l'ordre de 50%», poursuit-il. La construction freine Cette suroffre du marché de l'immobilier de bureau s'est accompagnée d'un ralentissement des demandes de permis de construire pour ce type d'immeuble à Casablanca et plus particulièrement en centre-ville. Selon les estimations de Lazrak Immobilier, près de 50.000 m2 auraient fait l'objet de report, d'abandon ou de reconversion en résidentiel par des promoteurs «opportunistes» se positionnant sur de la promotion simple dans le cadre de projets medium size. Compte tenu du contexte de la suroffre actuelle, de la vacance croissante, de l'émergence de nouvelles zones dédiées (corniche, CFC), les estimations de Lazrak Immobilier présageant d'un taux de rendement s'établissant à plus de 10% pour les immeubles ne répondant pas aux critères du marché. Ils s'établiront cependant à moins de 8% prochainement pour les immeubles stabilisés dans les nouvelles zones.