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Rendement de l'investissement : Lahlimi tacle encore le gouvernement
Publié dans Les ECO le 18 - 01 - 2016

Pour le Haut-commissaire au plan, la déprogrammation de l'investissement est un mauvais choix. Au lieu, il fallait agir sur les facteurs de productivité à améliorer et les réforme à mener aux niveaux, institutionnel et humain.
Au Maroc, l'investissement doit progresser de 7 points, pour pouvoir récolter un point supplémentaire de croissance. Ce chiffre est mesuré par ce que les économistes appellent l'indice ICOR (Incremental Capital Output Ratio). C'est ce qu'a révélé Ahmed Lahlimi Alami, mercredi à Rabat, lors de sa présentation du rapport sur le rendement du capital physique. Le Haut-commissaire au plan a critiqué le manque de rendement du capital, contrairement à des pays, comme la Corée du Sud où l'ICOR est à 3. Dans les années 90, la Chine réalisait un ICOR entre 2,5 et 4,5, expliquant sa fulgurante ascension économique. Ce qui n'est plus le cas, depuis 3 ans.
Le sujet est d'une extrême importance si l'on apprend que l'investissement au Maroc représente 30% de la demande intérieure. Son rôle dans la création de la richesse est indéniable, mais il bute contre l'obstacle de son financement. À plus forte raison que l'épargne n'est pas à son niveau souhaité. L'investissement doit aussi être considéré à travers le prisme de son impact sur la création d'emplois et sur les revenus des citoyens, pas seulement les personnes actives. Une autre approche consiste à mesurer l'intensité capitalistique. C'est le stock de capital, requis par personne active, combiné à la productivité globale des facteurs pour évaluer la productivité du travail. C'est-à-dire la richesse nationale par citoyen ayant contribué à sa création. C'est au niveau de cette productivité globale des facteurs que des efforts sont encore nécessaires.
En effet, les facteurs humains, institutionnels et matériels doivent agir, de manière optimale et efficace, pour tirer le maximum de bénéfice du capital physique qu'est l'investissement. Nous en sommes encore loin. Car, comme l'explique savamment Lahlimi, le capital peut être faible, mais avec des facteurs de productivité bien utilisés, le rendement sera meilleur. C'est ce qui nous amène à la troisième approche qui est celle de la croissance endogène. C'est la capacité d'un pays à puiser dans ses propres facteurs existants pour réaliser une meilleure exploitation capitalistique. Ainsi, la non-maîtrise des facteurs endogènes peut pousser un gouvernement à des choix inattendus. Et c'est là que le Haut-commissaire au plan a fait un clin d'œil au gouvernement qui, à un certain moment, a choisi de déprogrammer 15 MMDH d'investissement.
Pour Lahlimi, le choix de baisser les investissements est inopportun sachant qu'il fallait agir sur les facteurs de production existants en les améliorant et en apportant les réformes institutionnelles nécessaires. Et de conclure que le Maroc dispose encore de beaucoup de marge de manœuvre pour augmenter les capacités propres de financement de l'investissement. Toutefois, l'on constate qu'il y a au Maroc des secteurs à bonne valeur ajoutée, mais où l'on investit peu et vice-versa. Pour illustration, l'intensité capitalistique, dans le secteur des services, a progressé de 5,2% depuis 2000, de 4,9% dans l'industrie et de seulement 1,2% dans l'agriculture. Cela s'explique par le fait que ce qui est gagné dans l'agriculture est investi ailleurs principalement dans l'immobilier. Cette fuite du capital physique est remarquée aussi dans l'industrie. Ce qui explique en partie les pertes phénoménales d'emplois dans le secteur industriel allant jusqu'à 16.500 postes en 2013 et 2014. Depuis 2000, 13.600 emplois par an sont également perdus dans l'agriculture.
Par contre, le secteur des services continue de créer de l'emploi et de compenser, en quelque sorte, la contreperformance des autres. Pour renverser la vapeur, Lahlimi appelle gouvernement et privé à investir encore plus dans l'agriculture. Certes en matière d'infrastructures agricoles, le Maroc a fait des pas de géants grâce, notamment, à la politique des barrages, mais l'investissement dans les process de production et dans l'amélioration du rendement laisse toujours à désirer. Lahlimi va encore plus loin en exhortant le gouvernement à compter davantage sur les ressources endogènes du pays, au lieu de recourir systématiquement à l'endettement ; même si c'est pour alimenter l'investissement. Sur une note plus humaine, le Haut-commissaire au plan veut que l'investissement dans l'homme soit pris au sérieux dans l'objectif d'en faire un partenaire réel dans la prise de décision.
La croissance trop lente !
Il est loisible de rappeler que les années 2000, caractérisées par une politique volontariste d'investissement, ont connu une nouvelle dynamique du processus d'accumulation du capital physique. Et ce, en rupture avec les tendances passées. Le taux d'investissement passe ainsi de 24,8% du PIB en 1999 à 35,1% en 2010 et à 32% en 2014. Le stock de capital s'accroît de 6,2% par an, au lieu de 4,6% observés dans les années 80-90, pour représenter ainsi trois fois le PIB, et 3,4 fois, durant les cinq dernières années de cette phase. Malgré cet effort d'accumulation du capital durant la décennie 2000, la croissance économique, bien qu'en nette amélioration, par rapport aux années 80-90, dominées par le Programme d'ajustement structurel (PAS), n'a pas connu le même rythme d'évolution que l'investissement. Avec un taux moyen annuel de croissance de 4,4% par an, durant cette période et celui de l'investissement de 6,2%.


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