Othman Khalil El Alamy Directeur adjoint à la Direction des assurances et de la prévoyance sociale (DAPS) Les ECO : Qu'est-ce qui a motivé de la mise en place d'une nouvelle mouture du Code des assurances ? Othman Khalil El Alamy : Dans un environnement en perpétuelle évolution et face à l'émergence de nouveaux risques, le secteur de l'assurance doit s'adapter afin d'améliorer sa compétitivité et renforcer son rôle de soutien à l'économie. Ainsi, il a fallu modifier la loi n° 17-99 portant Code des assurances. Les amendements proposés par le projet de loi, qui a été transmis au Parlement, visent plusieurs objectifs dont principalement la conformité avec les normes internationales en matière de règles prudentielles applicables aux entreprises d'assurances et de réassurance, en instaurant le principe de la solvabilité basée sur les risques, en améliorant la gouvernance desdites entreprises et en renforçant leur transparence. Il s'agit aussi de mettre en place un cadre juridique pour l'exercice de l'assurance Takaful, sachant que ce type d'assurances constitue actuellement un élément important de la sphère financière islamique et mérite d'être développé, d'autant plus que le besoin pour ce type de produits est de plus en plus ressenti par les opérateurs dans le secteur des assurances, mais également de renforcer la protection des tiers et la sécurisation des investissements à travers l'instauration de l'obligation d'assurance pour certains risques afférents à la construction, à savoir la «tous risques chantier» et la responsabilité civile décennale prévue par l'article 769 du dahir formant Code des obligations et des contrats. Cette loi vise également à mettre en place un cadre légal pour l'assurance islamique «Takaful»... Le projet de loi donne des définitions précises pour certains concepts de l'assurance Takaful, tels que «Assurance Takaful» et «Avance Takaful». D'autres définitions ont été complétées pour tenir compte de la particularité de cette assurance. Par ailleurs, certains principes de base concernant ce type d'assurances ont été introduits. Il s'agit du fonctionnement de l'opération d'assurance Takaful conformément aux préceptes de la Charia, de la participation dans cette opération sur la base du don et de l'entraide entre les participants et enfin de la couverture du risque par la collectivité des participants. Le principe de la gestion de l'assurance Takaful par l'entreprise d'assurances et de réassurance a été également introduit. Dans ce cadre, le projet oblige l'entreprise d'assurances gestionnaire de l'opération d'assurance Takaful à combler, par des avances sans intérêts, les déficits éventuels générés par cette opération. Ces avances sont récupérables sur les excédents futurs. De même, les excédents techniques et financiers réalisés dans le cadre de l'assurance Takaful sont répartis entièrement entre les participants après déduction, le cas échéant, des avances Takaful. La répartition de ces excédents techniques et financiers ne peut avoir lieu qu'après constitution des différentes provisions et réserves. Le projet de loi prévoit également que la conformité à la Charia des opérations d'assurance Takaful soit prononcée par le Comité Charia pour la finance, créé au sein du Conseil supérieur des Oulémas. Par ailleurs, d'autres dispositions du projet portent sur l'amendement de certains articles du Code des assurances afin de tenir compte des spécificités de l'assurance Takaful. Il s'agit, notamment, de la spécialisation des entreprises d'assurances agréées pour pratiquer les opérations d'assurance Takaful et du système de contrôle interne qui doit porter sur le risque de non-conformité aux préceptes de la Charia. La loi portant création de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale a été votée. Pourquoi l'autorité n'est-elle pas encore opérationnelle ? La loi n° 64- 12 portant création de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) a été publiée au Bulletin officiel du 20 mars 2014. Toutefois, cette loi ne devra prendre effet qu'à compter de la date d'entrée en fonction effective des organes de l'autorité, à savoir le président et le conseil. Au moment où la loi n° 64-12 précitée est sortie, la loi organique relative à la nomination aux fonctions supérieures n'était pas encore adoptée. Cette loi organique, qui classe l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale parmi les établissements publics stratégiques dont la nomination du président, et sera effectuée par Sa Majesté le Roi sur proposition du chef du gouvernement, n'a été publiée qu'au cours du mois de juin 2015. Toutes les étapes législatives étant achevées, le démarrage effectif de l'autorité aura lieu incessamment avec la nomination du président et la mise en place dudit conseil. Quelles sont les évolutions réglementaires que connaîtra le secteur des assurances ? À côté du projet de modification du Code des assurances qui a été transmis au Parlement, deux autres textes sont actuellement en cours de discussion au Secrétariat général du gouvernement ; il s'agit du projet de loi instituant un régime de couverture des conséquences des événements catastrophiques (ce projet est presque finalisé et sera transmis incessamment pour approbation au Conseil du gouvernement) et du projet de loi modifiant le livre IV du Code des assurances relatifs aux intermédiaires d'assurances. De plus, le démarrage effectif de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale nécessitera la mise en place des circulaires de l'autorité nécessaires à sa mission de supervision, y compris celles définissant l'étendue du contrôle des entités et opérations nouvellement soumises au contrôle de l'autorité, tels que les organismes pratiquant les opérations de retraite fonctionnant par répartition ou par répartition et capitalisation.