C'est une véritable tragédie qu'a vécu Paris, vendredi 13 novembre. Quelle lâcheté que de s'attaquer à la culture et à un lieu historique de la musique comme le Bataclan. Les cris de joie des mélomanes venus applaudir les tant attendus Eagles of Death Metal se sont transformés en cris de détresse face à l'impensable. Retour sur l'histoire du Bataclan, haut lieu de la musique où aimaient se retrouver les amateurs de musique. Ce soir-là, les Eagles of Death Metal jouaient à guichets fermés. Ils étaient attendus, très attendus. La plupart des fans ont rêvé de ce soir sans imaginer ce qui les attendait. Le vendredi 13 novembre, en plus de s'attaquer à la liberté, des fanatiques se sont introduits au Bataclan et ont tiré à la kalachnikov sur des êtres humains qui profitaient des joies d'un concert. Un moment de musique anéanti, des vies bafouées et des traumatismes à vie pour les épargnés. Pour l'amour du Rock Salle mythique, le Bataclan était connu des fins connaisseurs, critiques de musique, musiciens et mélomanes, pour être le coin à fréquenter en vue de découvrir des perles ou profiter de concerts historiques comme ceux de The Police, de Prince, du Velvet Underground ou de Dream Theater, déjà passés par là. Entre Bastille et République, ce magnifique bâtiment de deux étages respire la culture de partout. L'établissement, qui a ouvert ses portes en 1865, était à l'origine un grand café-concert d'architecture chinoise, avec le café et le théâtre au rez-de-chaussée, et un grand dancing au premier étage où y étaient représentés des vaudevilles de Scribe, Bayard, Mélesville ou Dumersan, et proposait également des concerts. On raconte même que pendant la guerre de 1870, le Bataclan servait de mini-nurserie, et ses tables de billard étaient utilisées comme ambulances. Tantôt théâtre, tantôt cinéma, la salle est ravagée par un incendie en 1933 mais elle réussit à renaître de ses cendres en 1969, rénovée et redevenue cinéma. La salle ne retrouvera sa vocation de salle de spectacle qu'en 1983 avec une programmation très orientée Rock/Punk, tout en restant ouverte à d'autres styles musicaux. De Jane Birkin à Stromae en passant par The Cure, The Police, Prince et les Stray Cats. En septembre 2015, le Bataclan est racheté par Lagardère Unlimited Live Entertainment, filiale du groupe Lagardère SCA, dirigé par Arnaud Lagardère. Elle accueille également plusieurs sessions d'enregistrement de groupes qui, séduits par l'acoustique, décident de sortir des albums enregistrés au Bataclan comme le mémorable Live from Bataclan de Jeff Buckley en 1996, pour ne citer que lui. Un vendredi 13 plein de fausses notes «J'étais presque en transe, en train de profiter de mon groupe préféré. On en était à la 5e ou 6e chanson quand j'ai entendu du bruit. Un son qui ressemble à celui des pétards. Je pense d'abord à une mise en scène puis je vois le groupe effrayé, je ne réalise pas encore ce qui se passe», confie un spectateur qui souhaite rester anonyme. Emu, il en reste là parce que la suite est terrifiante. Odeur de poudre, corps à terre, prise d'otage, coups de feu, morts, incertitude. Heureusement, ce dernier fait partie de ceux qui ont fui avant la prise d'otage. D'autres témoins nous révèlent que ce qui les a le plus choqué chez les terroristes, c'est leur capacité à rire pendant qu'ils tiraient. L'acteur Ayoub Layoussoufi, à Paris au moment des faits, n'arrive même pas a s'exprimer. «J'ai perdu une amie dans ces attentats, voilà tout ce que je peux vous dire», continue ce dernier, en état de choc, face à une ville de Paris qui se métamorphose en champ de bataille. «Nous étions dehors, nous avons eu du mal à rentrer, les métros s'étaient arrêtés, les endroits commençaient à fermer, Paris se métamorphosait sous nos yeux», continue l'acteur qui a pu regagner son domicile parisien des heures plus tard. Mais face à ce qui se passait au Bataclan et alentour, non loin de République, Salah, un Marocain qui vit à Paris depuis plus de 12 ans, raconte: «J'étais au Mc Do' en face du café Carrion, victime des attentats, je m'apprêtais à passer commande quand les coups de feu ont commencé», explique Salah, encore sous le choc. «Je pensais à des pétards mais en plus fort, et on ne se rendait pas compte de ce qui se passait jusqu'au moment où des gens effrayés sont entrés au McDo pour se cacher et nous ont révélé qu'il y avait des tirs, des morts». C'est à ce moment-là, que, calmement, tout le monde monte à l'étage pour se réfugier. «La nouvelle que la police était sur les lieux est vite arrivée, on pouvait sortir; une fois dehors, il y avait des policiers qui ont vite maîtrisé la situation, la rue était plutôt vide à ce moment-là, on voyait des blessés au niveau du café, mais sans pouvoir soutenir le regard». Salah, Ayoub et bien d'autres ont été les victimes de la peur dans la ville où ce mot n'existait pas il y a encore quelques mois. Paix aux âmes des victimes, pensée à leurs familles et à leurs proches, courage aux survivants qui tentent d'oublier, et surtout... une minute de silence pour la musique, et deux pour l'humanité.