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Sarkozy et Marine Le Pen jouent l'électoralisme
Appel à l'union nationale de Hollande
Publié dans Albayane le 16 - 11 - 2015

L'appel à l'union nationale lancé par le président Hollande après les pires attentats jamais commis en France se heurte à une opposition critique sur sa politique sécuritaire et sa stratégie en Syrie, à l'approche de rendez-vous électoraux.
En janvier, les attaques contre le journal Charlie Hebdo et une supérette casher (17 morts), avaient suscité une unité politique - brève mais quasi totale - et des cortèges de solidarité dans tout le pays. Au lendemain des attaques qui ont ensanglanté Paris vendredi soir, le chef de l'Etat a de nouveau appelé solennellement le pays à cette «unité indispensable». Il recevra dimanche le président du parti d'opposition de droite Les Républicains, Nicolas Sarkozy, ainsi que tous les chefs de partis représentés au Parlement, dont la dirigeante du parti d'extrême droite Front national, Marine Le Pen. «Ce que nous défendons, c'est notre patrie, mais c'est bien plus que cela. Ce sont les valeurs d'humanité et la France saura prendre ses responsabilités et je vous appelle à cette unité indispensable», a déclaré François Hollande, dénonçant un «acte de guerre» commis par «l'armée terroriste» de «Daech», le groupe Etat islamique. Mais le contexte politique a changé. Malgré des mois de bombardements, en Irak et en Syrie, la coalition internationale a échoué à faire reculer Daech, suscitant des appels de l'opposition en France à une action de plus grande ampleur, coordonnée avec la Russie et même, selon certains, avec le pouvoir de Bachar al-Assad. Qui plus est, à un an et demi de l'élection présidentielle de 2017, les partis sont en campagne pour un scrutin régional en décembre qui s'annonce comme une déroute pour les socialistes au pouvoir.
«La France et les Français ne sont plus en sécurité», a lancé Marine Le Pen, selon qui «la France a été rendue vulnérable, elle doit se réarmer». Nicolas Sarkozy, qui a pris la parole quelques minutes seulement après François Hollande, a quant à lui exigé des «inflexions majeures» pour que «la sécurité des Français soit pleinement assurée». «Nous soutiendrons toutes les décisions qui iront dans le sens d'un renforcement drastique des mesures de sécurité», a-t-il ajouté, dans un soutien en forme d'injonction. Tout en appelant à «faire bloc» derrière l'exécutif, même le très pondéré Alain Juppé, ex-Premier ministre et candidat aux primaires à droite, a exhorté à «aller plus loin» en renforçant les «moyens technologiques» des services de renseignement et les «moyens humains» dévolus à l'armée, la police, la justice. Pour le politologue Jérôme Sainte-Marie, François Hollande ne peut espérer renouer avec le soutien quasi inconditionnel exprimé après la première vague d'attentats de janvier 2015. A l'époque, la cote de popularité du chef de l'Etat, au plus bas, avait effectué un spectaculaire rebond, qui s'est effrité depuis, puisque moins d'un Français sur trois en a aujourd'hui une opinion favorable. Cette fois, après un «réflexe immédiat de solidarité de l'opinion», le président risque «un effet de retour peut-être très douloureux», juge M. Sainte-Marie. «La répétition des choses peut provoquer une réflexion politique sur les choix élyséens, des critiques. D'une part sur l'efficacité de la prévention, l'aspect sécuritaire, mais également l'aspect diplomatique, est-ce que les choix français en matière diplomatique sont les bons?», estime-t-il.
Critique sur la stratégie de François Hollande en Syrie, Nicolas Sarkozy l'avait appelé à «travailler» avec la Russie, jugée «incontournable» à la résolution de la crise, quitte à renoncer à faire du départ de Bachar al-Assad une condition préalable à toute solution politique. Samedi, Alain Juppé a lui aussi jugé «indispensable de clarifier les objectifs de la coalition internationale (en Syrie), qui aujourd'hui n'est pas efficace». «J'étais sur la ligne du gouvernement, ni Daech ni Bachar. Aujourd'hui (...) il y a des hiérarchies, il y a des priorités, il faut écraser Daech», a déclaré M. Juppé sur la chaîne France2.
Les attentats qui ont frappé Paris vendredi soir ont été menés en six lieux différents, faisant au moins 129 morts, sans compter sept assaillants tués, et des centaines de blessés, selon un bilan provisoire. Les attaques se sont déroulées près du prestigieux Stade de France, dans la banlieue nord de Paris, et dans l'Est parisien, aux bars très fréquentés le week-end, non loin de la place de la République où avaient convergé 1,5 million de personnes après les attentats de janvier.
Stade de France, porte D: 1 mort
A 20H20 GMT, une première explosion retentit aux abords du Stade de France où se déroule un match amical France-Allemagne. François Hollande, qui assiste à la rencontre, est immédiatement évacué. Les entrées et sorties du stade sont bouclées jusqu'à la fin du match. Un passant est soufflé par l'explosion d'un kamikaze qui porte une ceinture explosive. Les deux sont retrouvés morts.
Rue Alibert: 15 morts
Dans le Xe arrondissement, une fusillade éclate à 20H25 GMT à l'angle des rues Alibert et Bichat. Des personnes attablées au bar Le Carillon et au restaurant Le Petit Cambodge sont victimes de tirs de fusils d'assaut de type kalachnikov de la part de suspects arrivés à bord d'un véhicule noir, Seat Léon. Quinze personnes trouvent la mort, dix sont grièvement blessées. Sur place une centaine de douilles, notamment de calibre 7,62 mm, est découverte. «C'était surréaliste, tout le monde était à terre, personne ne bougeait», a relaté une femme, qui souhaite conserver l'anonymat.
Stade de France, porte H
Deuxième explosion au Stade de France, à 20H30 GMT, cette fois porte H, à quelques mètres de la première. Un kamikaze armé d'un gilet explosif de même nature se fait sauter dans cette rue commerçante bordant le stade. Aucune autre victime n'est à déplorer.
Rue de la Fontaine au Roi: 5 morts
Deux minutes plus tard, à 20H32 GMT, retour au coeur de Paris, à l'angle des rues de la Fontaine au Roi et du Faubourg du Temple (XIe arrondissement), où une fusillade éclate au bar Bonne Bière. Cinq personnes sont abattues par plusieurs rafales de fusils mitrailleurs.
A nouveau, les auteurs des tirs arrivent à bord d'une Seat noire et laissent derrière eux une centaine de douilles 7,62 mm.
«Il y a avait au moins cinq morts autour de moi, du sang partout. J'ai eu beaucoup de chance», témoigne un rescapé, Mathieu, 35 ans.
Rue de Charonne: 19 morts
A l'est du XIe arrondissement, 92 rue de Charonne, de nouveaux tirs retentissent à 20H36 GMT. 19 personnes attablées à la terrasse de La Belle Equipe périssent sous les balles d'hommes apparus encore dans une Seat noire. Neuf sont toujours très gravement blessés.
Un homme dit avoir entendu des tirs pendant «deux, trois minutes», «des rafales». «J'ai vu plusieurs corps à terre, ensanglantés. Je ne sais pas s'ils étaient morts», lâche-t-il. Une centaine de douilles de calibre 7,62 mm sont retrouvées sur place.
Boulevard Voltaire
Boulevard Voltaire un kamikaze se donne la mort à 20H40 GMT avec une ceinture explosive identique. Une personne présente est grièvement blessée.
Bataclan: 89 morts
Trois hommes armés, à bord d'une Volkswagen Polo noire, se garent à 20H40 GMT devant le 50 boulevard Voltaire (XIe arrondissement). A visage découvert, ils font irruption dans la salle de spectacle du Bataclan où se produit le groupe de garage rock américain Eagles of Death Metal et tirent en rafale, évoquant «la Syrie et l'Irak». Une prise d'otages de près de trois heures a lieu. Au moins 89 personnes sont tuées, des centaines d'autres blessées. «Ils ont tiré dans le tas, des gens essayaient de s'enfuir par la scène mais ils disaient: +Si vous bougez, on vous tue+», explique Philippe, 35 ans. Ce juriste a entendu les assaillants déclarer: «Ce qui vous arrive, c'est de votre faute. On vient venger nos frères de Syrie.» L'assaut est lancé par la police peu avant 23H20 GMT et se termine vers 00H00. Les trois assaillants trouvent la mort, deux en actionnant leur ceinture d'explosifs.
Stade de France, rue de la cokerie
A 20H53 GMT, troisième et dernière explosion aux abords du Stade de France, avec un même mode opératoire. Seul le corps d'un kamikaze est découvert.
Le bilan des attentats de Paris s'élevait samedi soir à 129 morts et 352 blessés, a annoncé le procureur de Paris, François Molins, assurant que les «terroristes» avaient opéré en trois équipes et que certains avaient évoqué la Syrie et l'Irak.
Le bilan «malheureusement provisoire et évolutif» des attentats de vendredi soir est de 129 morts et 352 blessés, «dont au moins 99 sont en état d'urgence absolue», a déclaré François Molins lors d'une conférence de presse.
«Sept terroristes sont morts au cours de leur action criminelle», et non huit comme indiqué jusque là, a-t-il également précisé, dont six se sont fait exploser. Le communiqué de l'Etat islamique (EI) revendiquant l'attaque mentionnait une action menée par «huit frères portant des ceintures explosives et armés de fusils d'assaut (...)».
Selon le procureur, les «terroristes» qui ont perpétré l'attaque de la salle de spectacle du Bataclan à Paris ont évoqué la Syrie et l'Irak.
Au total, plusieurs centaines de douilles, la plupart de calibre 7,62 mm (calibre de kalachnikov) ont été retrouvées sur chacune des scènes des attaques.
Il y avait «très vraisemblablement trois équipes de terroristes» au total, a-t-il souligné.
D'après le procureur, un des auteurs de la prise d'otage du Bataclan a été formellement identifié. Il est né en novembre 1985 en banlieue parisienne.
De nationalité française, il «est connu pour des délits de droit commun puisque son casier judiciaire porte mention de huit condamnations entre 2004 et 2010». Il avait fait l'objet en 2010 d'une fiche de renseignement pour radicalisation «mais n'avait jamais été impliqué dans un dossier de filière ou d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste», selon le procureur.
A proximité de l'un des trois kamikazes qui se sont faits exploser au Stade de France «a été découvert un passeport syrien au nom d'un individu né en septembre 1990 en Syrie», a-t-il ajouté, mais cet homme «n'était pas connu de services de renseignement français».
Au moins deux véhicules ont été utilisés lors des attentats, «un véhicule Seat de couleur noire et un véhicule Polo lui aussi noir immatriculé en Belgique», a poursuivi le procureur Molins.
Ce dernier véhicule a été loué par un homme de nationalité française résidant en Belgique, qui a «fait l'objet ce matin d'un contrôle routier à la frontière belge, à bord d'un autre véhicule (...) à bord duquel se trouvaient deux autres personnes elles aussi résidant dans la région de Bruxelles».
Tous trois ont été interpellés, dans le cadre d'une enquête ouverte par le parquet fédéral belge, confiée à un juge d'instruction antiterroriste bruxellois. Il s'agit d'individus qui résidaient en Belgique et «ne sont pas connus des services de renseignement français».
Le procureur français a précisé avoir saisi le parquet fédéral antiterroriste belge de quatre demandes d'entraide pénale internationale, dont une visait «le véhicule Polo retrouvé devant le Bataclan, donc loué» par l'homme contrôlé à la frontière belge.
Au moins 20 étrangers ont été tués vendredi soir lors des attentats de Paris au lourd bilan provisoire de 129 morts et 352 blessés. Parmi les tués figurent :
- Au moins trois ressortissants belges, un couple originaire de Liège (est), Elif Dogan, ingénieur de 47 ans, et Milko Jozic, qui vivaient à Paris depuis quatre mois, selon la presse, et un homme ayant également la nationalité française, a annoncé Bruxelles.
- Un Espagnol de 29 ans, Alberto González Garrido, selon les autorités espagnoles. Le jeune Madrilène assistait, selon sa soeur, au concert du Bataclan.
- Deux Portugais: un homme de 63 ans qui résidait à Paris et travaillait dans le transport de passagers, selon les autorités portugaises. Il serait mort alors qu'il se trouvait aux abords du Stade de France au nord de Paris. Le gouvernement portugais fait état d'une deuxième victime portugaise, née en France en 1980, titulaire de la double nationalité. Elle a été tuée au Bataclan.
- Deux ressortissants roumains, selon le ministère des Affaires étrangères à Bucarest.
- Un ressortissant britannique, a indiqué le Foreign Office évoquant également des blessés dont le nombre n'est pas précisé.
- Deux jeunes Tunisiennes, des soeurs qui vivaient l'une à Paris et l'autre au Sénégal, et dont les parents sont installés au Creusot (centre-est) et fêtaient à Paris un anniversaire, selon des sources concordantes.
- Trois Chiliens figurent parmi les victimes au Bataclan : une femme, Patricia San Martin, 55 ans. «C'est la nièce de notre ambassadeur Ricardo Nunez», a déclaré la sénatrice du Parti socialiste chilien Isabel Allende, fille de l'ancien président Salvador Allende. Sa fille Elsa Delplace a également été tuée, ainsi qu'un autre Chilien, Luis Felipe Zschoche Valle, musicien professionnel, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères.
- Deux Algériens, une femme de 40 ans et un homme de 29 ans, selon l'agence APS, citant des sources diplomatiques algériennes.
- Une étudiante américaine de 20 ans, de l'université d'Etat de Long Beach, en Californie. Nohemi Gonzalez se trouvait à Paris dans le cadre d'un semestre d'échange universitaire, selon son université. Plusieurs Américains se trouvent parmi les blessés, dont le nombre exact n'a pas été précisé. «Nous leur offrons toute l'assistance consulaire possible», a dit un porte-parole de la diplomatie américaine.
- un Marocain a été tué et un autre blessé à la jambe, mais ses jours ne sont pas en danger, d'après l'ambassade du Maroc à Paris.
- Deux Mexicaines à la double nationalité, l'une américaine, l'autre espagnole, ont été tuées, a annoncé le ministère mexicain des Affaires étrangères. Un Mexicain, blessé, a été opéré et récupère à l'hôpital. Par ailleurs deux Brésiliennes ont été blessées, selon la présidente brésilienne Dilma Rousseff, dont l'une est toujours hospitalisée. Un Suédois pourrait avoir été tué et un autre blessé selon un porte-parole de la diplomatie suédoise.


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