L'éducation n'est plus considérée comme une dimension qualitative de la vie ou uniquement accessible après que certains besoins de base sont pourvus. Face à la complexité grandissante de notre époque, aux multiples défis à relever, elle s'érige en condition indispensable au développement, en incontournable et prioritaire chantier à investiguer pour les Etats. En effet, l'éducation permet d'améliorer la participation démocratique, de lutter contre les inégalités et d'améliorer la croissance. D'autre part, elle remplit de nombreuses fonctions dans les sociétés modernes : formation à la citoyenneté, promotion sociale... Si dans ces sociétés, et même dans celles en voie de développement, l'éducation absorbe une part aussi importante des ressources produites chaque année, c'est parce qu'elle constitue, incontestablement, un facteur essentiel de croissance. Les réformes engagées par les Etats, le multipartisme, le suffrage universel et la liberté de vote ne suffisent aucunement au bon fonctionnement d'une démocratie : encore faut-il des femmes et des hommes capables de participer au débat sur le devenir de leur société. Il s'agit de réfléchir librement, d'échanger et de parvenir à des consensus mobilisateurs pour un développement responsable et assumé. C'est seulement lorsque chacun a eu le sentiment d'avoir été écouté, entendu et pris en compte, à défaut d'avoir eu gain de cause, que l'on évite le recours aux tensions et à la «démission sociale». Etant un système politique exigeant, la démocratie réclame des citoyens plus d'éducation, plus de maîtrise de leurs passions, plus de connaissances, de savoirs et de civisme afin de participer concrètement et sereinement à l'évolution de leur pays. Indubitablement, la démocratie se met en danger quand le débat est absent ou stérile, quand il fait fi des «contraintes du réel» ou quand il exclut une partie de la société, laquelle trouve alors dans la violence son seul moyen d'expression. De nos jours, trop de jeunes se placent, d'eux-mêmes, en marge du débat public, parce qu'ils se sentent «mal armés» pour discuter ou incompris des pouvoirs en place. Pour s'ouvrir aux raisons d'autrui et accepter «sa différence», il faut se sentir fort du pouvoir de discuter, de comprendre, de convaincre et de rassembler. Cette force-là ne peut s'acquérir sans éducation ou «sans systèmes éducatifs qui prédisposent à la vie démocratique» ou qui inculquent ses valeurs. L'éducation joue, de surcroît, un rôle essentiel dans le développement économique. Un des facteurs explicatifs importants des écarts de niveaux de vie entre les pays est tributaire de la maturation et de l'avancée de leurs stratégies éducatives. La lutte contre la pauvreté passe par la valorisation des ressources humaines, ce qui implique notamment de mettre l'accent sur les savoirs, sur la formation des jeunes et des adultes. L'éducation est la réponse la plus efficace à l'amélioration du niveau de vie des populations. Comprendre toutes les interdépendances entre elle et plusieurs secteurs de développement puis les muer en des programmes de formation pertinents, générateurs de richesses, sont les véritables vecteurs de compétitivité et d'essor économique pérenne. Progrès, démocratie et éducation sont liés. S'y ajoute la justice sociale car, sans elle, la démocratie dépérit. Une approche éducationnelle accessible à tous, promouvant la cohésion sociale en fournissant un noyau de normes communes, des normes qui consolident la confiance et les interactions entre les individus, est salutaire. Elle requiert un acte pédagogique et éthique qui favorise l'éclosion de situations d'apprentissage valorisantes, permettant aux citoyens l'entrepreneuriat et l'initiative en toute liberté. L'éducation au développement, au renforcement des acquis démocratiques, est une éducation dynamique, ouverte à la participation active et créative. Elle puise ses principes dans l'engagement et le changement. Ses effets contribuent à une citoyenneté responsable. Elle consiste à ne point «inhiber», à n' imposer aucun type de réflexion ou d'attitude, mais à offrir aux individus la possibilité de devenir responsables de leurs actes, de leur donner les moyens, par l'information, par l'appel à la réflexion et à l'action, de décider de ce qui est de nature à fonder un choix de citoyen conscient de ses droits et de ses devoirs. C'est une éducation qui ambitionne un changement des valeurs, des attitudes, en vue d'une société plus juste, dans laquelle le développement ne peut se concevoir qu'équitablement et collectivement.