Ils sont de plus en plus nombreux, de plus en plus reconnus et porter ces deux lettres, DJ, qui sonnent bien fait de vous quelqu'un de «branché». Ce sont des artistes à part entière, portés par l'art de la musique électronique. Comme tout art, le plagiat est au rendez-vous. Ne sont pas de «vrais DJ» tous ceux qui le prétendent et la vraie musique électronique n'a rien à voir avec la musique commerciale. Une passion racontée par ses anges de la nuit... les vrais ! Faire tourner un CD, disposer d'un Macbook et de quelques logiciels, faire danser les quelques pèlerins d'une soirée ne fait pas de vous un DJ. Tel est le slogan des puristes de la musique électronique, ces sonorités synthétiques nées dans les années 50. Dans les années 70, les synthétiseurs analogiques ont fait place au numérique pour qu'en 2000, d'autres instruments se rajoutent et l'évolution technologique développe la musique électronique. Comment reconnaitre, dans ce mélange de sonorités électroniques, le bon du moins bon ? «Tout dépend de l'angle sous lequel on analyse la question. Il est clair que pour un connaisseur, la différence est flagrante! Un pseudo Dj prendra des morceaux connu et les mixera aléatoirement sur son ordinateur sans aucune logique ou plutôt sa logique à lui seul. Un vrai artiste jouera des track qu'il fera découvrir au public, il retravaillera les morceaux et construira son set comme un voyage a travers différentes sonorités et émotions» explique Amine K, Dj, producteur, promoteur et fondateur de Moroko Loko qui joue principalement de la musique électronique underground, de la Deep house à la techno, en passant par de la percussive minimale et de la progressive. C'est qu'il existe des styles dans la musique électronique. «Qu'elle soit minimale ou progressive, la techno peut être utilisée de différentes façons, selon les variations rythmiques et séquentielles qui diffèrent et les DJ qui proposent des univers différents, plus ou moins rythmés par exemple, qui se rapprochent plus du disco et de la funk» explique une spécialiste de la musique électronique. «La deep house comme son nom l'indique est plus profonde et rétrospective, elle fait appel à la Soul music» continue-t-elle. Une musique électronique qui dispose de règles fondamentales que seuls les puristes connaissent. «Le plus triste c'est que 95% des gens qui vont dans les clubs ou soirée, ne font pas la différence. Et aujourd'hui avec les nouvelles technologies et les ordinateurs, n'importe qui peu être un très bon «pseudo» Dj» se plaint Driss Skali, né à Casablanca en 1979 et parti au Canada pour poursuivre ses études quand la fièvre de la musique électronique s'est emparé de lui en 1999 . «J'ai toujours joué de la musique éclectique, je ne suis jamais resté confiné dans un style particulier, j'ai dû passer en revue nombreux styles de house music, mais aujourd'hui, la musique électronique a tendance à être beaucoup plus lente qu'avant, plus raffinée et plus mélodieuse. Je ne suis jamais arrivé à définir mon style de musique, je joue ce que j'aime» continue Driss. En effet, un Dj mixe d'abord au feeling et n'a pas à avoir un genre ou un sous-genre, il a une emprunte à lui qui le démarque des autres. A l'image de Kali G qui décide, dix plus tôt de prendre la route pour Barcelone où la musique électronique bat son plein. «Pour se différencier des autres excellents DJ qui sont sur place, il fallait trouver un petit quelque chose. Le mien c'est le folkore marocain que j'intègre dans mes compositions pour ne jamais oublier d'où je viens» explique le DJ marocain. Une réalité bien installée que celle des artistes marocains qui vont vers d'autres pays pour s'exprimer musicalement. «Quand j'ai démarré il n'y avait pas de scène au Maroc et les rares fois où j'ai essayé de faire des choses, je me suis heurté à des difficultés qui m'ont découragé.En Europe et à Paris en particulier il y'a plus de clubs et un public avec une scène structurée, on peut travailler et construire sur le long terme», intervient Amnaye Nhas, DJ, producteur, ingénieur du son et entrepreneur à Paris. En effet, aller loin pour être accepté musicalement.Paris, Berlin, Montréal, il est facile d'imaginer des carrières se former et la possibilité de vivre de sa passion. Mais qu'en est-il du Maroc ? «Aujourd'hui au Maroc, la demande est de plus en plus importante et des plus diversifiée : lounge, les hôtels, en radio, en animation de soirées privées, les évènements entreprise, les festivals... Un artiste DJ polyvalent peut vivre correctement de sa passion au Maroc mais cela dépend aussi de son carnet d'adresse», explique Mar1, Dj de 31 ans qui exerce depuis une quinzaine d'années. «Beaucoup de gens se trompent en croyant qu'être DJ est chose aisée. Bien au contraire, ce travail relève en fait de la pure création artistique. Il demande beaucoup d'efforts, de concentration, de précision. Entre les mises à jour musicales, le suivi de l'actualité et le mix, il faut vraiment consacrer quotidiennement le temps nécessaire pour réussir à faire tout cela» continue le DJ qui se dit puriste et fervent défenseur du son de qualité quel que soit le style ou la tendance.Mais quand le vétéran et mentor des DJs undeground au Maroc parle de survivre, que reste-t-il à espérer ? «Plutôt que d'en vivre, je dirais survivre, si on est résident dans un club, mais faire sa production et la présenter et en vivre c'est le parcours du combattant». Un parcours du combattant que DJ Unes, résident légendaire du Platinuim de Rabat a réussi à tracer. «Les principales difficultés sont d'être reconnu comme un artiste à part entière et d'être valorisé en tant que tel. Seule la passion nous permet de continuer et quelques évènements comme Moroko loko et State of mind», continue DJ Unes. En effet, co-fondateur des évènements musicaux qui ont permis de démocratiser la musique électronique au Maroc comme le State of Mind ou la Moroko Loko, il permet avec ses acolytes Mar1 et Amine K de vivre la musique électronique comme une expérience d'une vie. Le concept rassemble plusieurs DJ nationaux et internationaux pour un échange autour de la musique électronique. «La vision du collective Moroko Loko risque de faire exploser la scène électronique au Maroc, la scène a besoin de se développer encore plus» rappelle Driss Skalli. Des jeunes passionnés, qui se battent pour vivre de leur passion. Pour certains l'appel de l'étranger est plus fort et plus tentant, mais pour d'autres le pays est plus important.