Largement inexploité, un secteur agricole modernisé et structuré pourrait bien nourrir la création de nombreuses structures PME et TPE. Miser sur le développement de l'entrepreneuriat agricole permet aujourd'hui de décliner à terme la stratégie sectorielle au niveau régional. Et si l'agriculture constituait une réelle niche d'investissement pour le tissu entrepreneurial ? La problématique de l'émergence de PME agricoles, soulevée lors du 1er forum des jeunes entrepreneurs tenu les 16 et 17 mai derniers a, en effet, mis l'accent sur le potentiel de croissance qu'offre aujourd'hui l'agriculture. Experts et analystes avancent différentes pistes de réflexion qui mènent dans l'ensemble à une même recommandation : encourager la création d'entreprises agricoles pour mieux répondre au besoin de création d'emplois dans le milieu rural. Sur le plan économique, le modèle entrepreneurial agricole reste largement inconnu. Plus que jamais, l'agriculture est aujourd'hui amenée à se moderniser et surtout à se structurer pour répondre à des impératifs économiques majeurs. Une récente étude menée par la CNUCED confirme en effet cette réalité dans différents pays en développement, dont le Maroc, mettant en avant les faibles niveaux de productivité enregistrés dans l'agriculture. Cet indicateur n'a ainsi augmenté que de 41% dans les pays en développement contre 62% dans les pays développés. D'où l'importance de la diversification des activités de ce secteur afin d'accélérer la croissance et renforcer le rôle des PME agricoles dans le développement du secteur. Comme l'explique Said Aqri, directeur du CRI de Chaouia-Ourdigha : «Miser sur le développement de l'entrepreneuriat agricole permet à terme de décliner la stratégie sectorielle au niveau régional et rural». Urgence socio-économique Pour ce faire, la mise en place d'un «contexte territorial favorable qui permette la mise à la disposition des agriculteurs d'équipements collectifs ainsi que l'accélération des filières» s'impose. Pour y parvenir, un premier niveau de blocage devra être dépassé, à savoir l'accès au foncier assez problématique, comme le souligne Jean Metge, expert en agriculture qui s'inquiète des prix aberrants du foncier agricole au Maroc expliquant qu'un «hectare de terre au niveau de la région de Meknès coûte pratiquement trois fois plus cher qu'un hectare dans le sud-ouest de la France». Aujourd'hui, le renchérissement des prix des denrées alimentaires fournit une impulsion à la production agricole, ce qui pousserait davantage d'agriculteurs à s'intéresser à l'investissement dans les terres agricoles via un mode plus structuré et modernisé. Repenser le rôle du secteur agricole dans la croissance et le développement devient par là une nécessité. À cela s'ajoutent les tendances à long terme de contraction de l'emploi agricole auxquelles les autorités doivent aujourd'hui particulièrement s'intéresser. Seule l'émergence de PME agricoles dans différentes régions peut assurer un bon niveau d'employabilité des jeunes ruraux, ce qui suppose en premier lieu l'assurance d'un bon niveau de participation du système bancaire au financement des projets agricoles. Jean Metge, Expert en agriculture Au Maroc, nous notons aujourd'hui que les chefs d'exploitation sont assez âgés, avec une moyenne de 50/55 ans. Près de 25% d'entre-eux ont plus de 65 ans. La relève des chefs d'exploitation devient donc un enjeux majeur au vu de l'importance de la modernisation des exploitations agricoles. Ce qu'il faut savoir, c'est que l'agriculture marocaine est très hétérogène et qu'une petite ou moyenne exploitation doit impérativement être protégée sur le marché. Economiquement et socialement, la modernisation des exploitations est nécessaire dans le cadre de l'installation de véritables exploitations agricoles ou entreprises agricoles. Pour ce faire, il faudra répondre à un certain nombre de facteurs personnels, à savoir le profil de l'entrepreneur, une formation de base solide, un apport financier personnel et un investissement dans la préparation d'un projet réaliste. D'autres facteurs, cette fois ci externes, doivent être pris en compte, à savoir un environnement professionnel favorable comptant des organismes engagés dans le soutien de l'installation, un accès possible au foncier ou encore des conditions de financement adaptées. Enfin, pour développer une exploitation agricole, il faut s'appuyer sur une filière donnée dans une région définie, tout en assurant l'approche filière qui revient à garantir l'amont et l'aval de la production.