La crise diplomatique risque d'éclater à tout moment si l'on se fie aux déclarations des responsables politiques de Sebta et Mélilia. C'est le sentiment que laissent prévoir les autorités des deux présides. Outre les hommes politiques qui chauffent l'atmosphère à blanc, le corps de la police s'est aussi associé à ce débat en appuyant les dires des responsables sur la montée en flèche des vagues migratoires durant cet été. Lundi, le Syndicat unifié de la police (SUP), la confédération espagnole de la police (CEP) et l'Association unifiée de la guardia civil (AUGC) se sont donné le mot pour attaquer le gouvernement de Madrid tout en dégainant quelques flèches en direction du Maroc. Selon leurs déclarations, la responsabilité est partagée par les gouvernements espagnol et marocain, lesquels devraient repousser les flux migratoires s'abattant sur l'enclave à partir du Maroc. Pour la CEP, la situation dans les centres temporaires d'accueil est «honteuse», étant donné que la capacité d'hébergement est largement dépassée et donc les conditions de séjour sont lamentables. «Il ne s'agit plus d'une affaire d'ordre policier mais plutôt politique», ont-ils martelé lors d'une conférence de presse. À l'instar des hommes politiques, la représentation syndicale accuse le Maroc de relâchement et de baisse de vigilance au niveau des frontières. La CEP demande au Maroc de mettre les bouchées doubles pour endiguer cette avalanche. Les policiers veulent que le ministère de l'Intérieur et le gouvernement espagnol mettent en place les moyens humains et techniques nécessaires pour contrôler les frontières. De surcroît, ils réclament que leur gouvernement exige à son homologue marocain davantage de collaboration. Une chose est sûre, les positions sont partagées sur la responsabilité du Maroc dans cette affaire. Car contrairement à ce discours incriminant le Maroc, l'Association de la guardia civil fait porter le chapeau au gouvernement et sa mauvaise gestion de cette affaire surtout durant le mandat du ministre de l'Intérieur sortant, Alfredo Rubalcaba. L'AUGC estime qu'il ne faut pas jeter la pierre au voisin. En outre, il semble que la crise économique soit la véritable coupable et non le Maroc comme se plaisent à le répéter certains officiels espagnols de l'opposition. Vraisemblablement, le ministère de l'Intérieur a procédé à peu de recrutements, qualifiés même de ridicules par les agents, et ce au moment où bon nombre d'agents partent à la retraite ou sont sur le point de le faire. La solution à ce conflit passe, selon le porte-parole de la guardia civil, par un renforcement des effectifs d'au moins 100% afin de mieux surveiller les frontières. De l'autre côté de la rive méditerranéenne, les associations humanitaires rejettent en bloc ces allégations insinuant une montée en puissance des arrivées. Les associations humanitaires basées en Espagne ont lancé un appel au calme mardi. Andalucia Acoge et l'association pro droits humains Andalousie ont diffusé un communiqué où elles mettent en garde les responsables de Sebta et Mélilia contre ces informations voulant faire croire à une situation désastreuse. Elles les accusent de déformer la réalité vu que les arrivées enregistrées sont loin d'être alarmantes, preuve en est qu'elles n'ont pas atteint les pics historiques. Les ONG espagnoles ont appelé à la prudence dans leurs déclarations car parler d'avalanche est exagéré. Et comme personne ne se fie aux cris des responsables des enclaves annonçant le loup, ils ont sorti un nouveau tour de magie. Mardi, les responsables des villes ont brandi la menace des immigrés mineurs. Selon la conseillère du bien-être social à Mélilia, le centre d'accueil des mineurs abrite actuellement 131 immigrés mineurs non accompagnés alors que sa capacité maximale est de 121 personnes. Selon la conseillère, chaque fois que l'enclave souffre de montées d'immigrants clandestins subsahariens et marocains adultes, cela est accompagné d'une hausse du nombre des mineurs en situation illégale, récupérés dans chaque patera interceptée. «Une fois, nous avons admis dix mineurs en une seule journée», a-t-elle déclaré. De plus, le département tente de montrer que le sujet commence à revêtir une grande ampleur vu que le profil des mineurs accédant à la ville a changé. À présent, il ne s'agit plus d'enfants provenant des régions limitrophes mais bel et bien de mineurs originaires du centre et du sud du royaume. Récession ou pas, les volontés ne se laissent pas décourager pour atteindre l'ex-eldorado.