Le hasard fait parfois bien les choses. Alors que le décret d'application de la loi N°22-10, relative à l'utilisation des sacs et sachets en plastique dégradable ou biodégradable, vient d'être rendu public dans le dernier Bulletin officiel (BO), le débat sur la viabilité des solutions alternatives fait rage. Le dernier acte provient de Symphony Environmental Technologies, une compagnie britannique spécialisée dans les sachets oxo-biodégradables, et dont la solution phare, un additif nommé d2W, est commercialisée depuis bientôt deux ans au Maroc par la société Greenberry. L'enseigne travaille aujourd'hui avec une dizaine des plus grands producteurs de sacs en plastique du royaume, à l'image d'Unibag Maghreb qui est l'un de ses principaux clients. Pourtant, la pilule de l'oxo-biodégradable semble encore difficile à faire passer chez ces derniers. Bien que fournisseurs de la plupart des enseignes du commerce en grande surface, ces derniers se disent pourtant aujourd'hui «pas certains de l'efficacité de cet adjuvant, raison pour laquelle ils réclameraient au ministère une étude d'impact sur l'environnement», selon les responsables de l'Association marocaine des producteurs de sachets et sacs en plastique (AMPSSP). «Les producteurs de sacs en plastique ne veulent pas endosser l'efficacité de cet adjuvant rendu obligatoire par cette loi et que nous ne fabriquons pas. L'action réelle de ce produit n'est toujours pas démontrée». Une contradiction déconcertante pour le commun des mortels. Elle serait d'ailleurs derrière les retards accusés par la promulgation du décret relatif à la loi 22-10, cité un peu plus haut. Le texte était en effet attendu pour le mois de janvier dernier. Mais chez Greenberry, l'on entend tout cela d'une autre oreille, loin d'être conciliante avec la thèse des opérateurs, et soucieuse de lever les incompréhensions sur son produit. «Les sacs utilisant nos additifs sont aptes à répondre à tous les critères normatifs actuellement en vigueur, permettant de garantir la parfaite sécurité sanitaire et alimentaire, la parfaite dégradation et biodégradation des produits finis utilisant nos additifs, dans les bonnes conditions d'utilisation», explique Edwin Sluismans, directeur Général de Greenberry. «Nous avons fourni aux autorités l'ensemble de ces certifications et nous pensons qu'il est important de ne pas jeter le trouble dans l'esprit du public sans fondements scientifiques», défend, intransigeant, le responsable. L'amalgame Edwin va plus loin pour lever toute équivoque, notamment par rapport à l'amalgame communément fait entre la «biodégradation» et la «compostabilité» (sachets à bases végétales). Cette dernière méthode est en effet considérée parmi les meilleures solutions en vigueur, mais «pas du tout adaptée à la réalité marocaine», selon Sluismans. Il semblerait en effet que les sachets appliquant la solution de «compostabilité» nécessitent, pour disparaître, des conditions d'humidité et de température bien spécifiques, propres au compostage industriel pour lequel ils sont principalement destinés. «Une filière de traitement inexistante au Maroc. De plus, il n'existe aucun référentiel normatif capable de garantir la disparition de ces produits en cas d'abandon dans l'environnement», complète Rim Rherras, la directrice développement de Greenberry. Ces différences entre «compostabilité» et «biodégradation» dans l'environnement sont en effet souvent ignorées et confondues. Elles sont d'ailleurs reprises dans l'enquête émise par la Communauté européenne sur l'opportunité de la mise en place de sacs biodégradables dans l'ensemble de son territoire. «Sans même évoquer les aspects économiques et techniques, les produits à base végétale ne sont donc pas du tout adaptés à la problématique actuellement posée au Maroc», renchérit le directeur général de la même boîte qui, finalement, semble avoir bien senti le filon du l'oxo-biodégradable sur le marché local. Les sacs estampillés du d2W se multiplient. Zara, Label'Vie, Inwi, Carrefour, et bien d'autres enseignes, ont déjà été séduites.