Principale actrice du commerce multilatéral, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) fête, mercredi et jeudi, ses 20 ans, à Marrakech où l'organisation est née. Un anniversaire qui sera marqué par la quête d'un nouveau souffle pour l'OMC, qui a de plus en plus de mal à peser dans les échanges internationaux. «20 ans de l'OMC : célébrations des succès et défis pour l'avenir», tel est le thème de la conférence ministérielle et parlementaire qui se tiendra, mercredi et jeudi à Marrakech. Objectif : débattre du bilan de l'OMC, de sa contribution à l'intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale et de la ratification de l'accord de Bali sur la facilitation des échanges, conclu en décembre 2013. Un regard neuf sera porté sur le système commercial multilatéral que l'OMC souhaite plus ouvert et moins inégalitaire. Ces 14 dernières années, en effet, l'économie mondiale s'est faite au grand dam de son législateur, juge et gendarme. L'OMC a été créée le 1er janvier 1995 à Marrakech pour servir de cadre de négociation sur des règles universelles de commerce, mais n'a pas tardé à se heurter aux divergences de ses membres. La libéralisation des services, les subventions et les produits agricoles divisent, entre autres, au sein de l'organisation. Et pour cause, l'OMC qui compte aujourd'hui 160 pays membres, a de plus en plus de mal à faire prévaloir le principe du multilatéralisme, tout en maintenant la démarche du consensus qui permet à tout pays de bloquer un accord. Multilatéralisme vs bilatéralisme "À l'origine, l'organisation a succédé à l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) pour répondre au besoin de normes à même de se substituer aux accords commerciaux bilatéraux", rappelle à la MAP le fondateur du think-tank EuropaNova, Guillaume Klossa. Et d'expliquer que dans l'OMC, tous les pays membres ont le droit absolu de se voir offrir les mêmes conditions commerciales, sauf exceptions qui doivent être justifiées et en même temps limitées. Prônant en principe la libéralisation des échanges, l'organisation intergouvernementale perçoit les exportations comme un moteur de croissance et de plein emploi. Son mandat, résumé par la fameuse «clause de la nation la plus favorisée», s'est révélé plus complexe que prévu : le bilatéralisme semble indéniablement prendre le pas sur le multilatéralisme, sur fond de blocages dus en partie à la règle du consensus jugée peu adapté. Des négociations de Doha à l'accord de Bali Dans le but de trouver un nouveau souffle, l'OMC avait lancé les négociations de Doha, il y a 14 ans. Aujourd'hui encore, elle a du mal à clore ce cycle de négociations plombé par les désaccords sur l'agriculture et les antagonismes Nord-Sud. Le cycle de Doha a été le tout dernier cycle de négociations commerciales entre les membres de l'OMC. Il a pour objectif de réformer en profondeur le système commercial international par la réduction des obstacles au commerce et des règles commerciales. L'un de ses principaux objectifs est aussi d'améliorer les perspectives commerciales des pays en développement. Cependant, le commerce multilatéral prôné par l'OMC bute sur la réticence des grandes puissances, qui préfèrent plutôt des accords bilatéraux. Mais l'OMC n'entend pas voir son rôle de plus en plus centré sur le règlement des différends. En décembre 2013, à Bali, le patron brésilien de l'organisation, Roberto Azevêdo, a réussi à obtenir un précieux accord sur la facilitation des échanges, lors de la conférence ministérielle. Pour l'OMC, cet accord prouve que le système multilatéral est encore en vie et qu'elle a encore du potentiel pour se dresser en bouclier contre le protectionnisme. La tâche ne sera pas de tout repos, même si de grandes puissances cherchent encore à rejoindre l'organisation, à l'instar de la Russie devenue son 156e membre en août 2012, dix ans après la Chine. Le principal acteur du commerce multilatéral cherche depuis des années à voir la lumière. La conférence de Marrakech prévue mercredi et jeudi pourrait, comme il y a 20 ans, créer une étincelle à même de permettre à l'OMC de peser à nouveau de tout son poids sur le commerce mondial.