Le Maroc et l'Algérie sont en train de cultiver une nouvelle page de l'agriculture dans la région. Le plus encourageant dans ce contexte, c'est que les deux parties ont décidé d'aller de l'avant, avec ou sans l'ouverture des frontières. On se rappelle tous de la participation massive des Algériens à la dernière édition du SIAM à Meknès. Le ministre de l'Agriculture, Rachid Abbassi, avait fait le déplacement, en personne, pour envoyer un message clair quant à l'intérêt porté désormais par son pays pour l'agriculture marocaine et particulièrement pour les ambitions et les enjeux du Plan Maroc Vert. Les exposants et les visiteurs l'ont ensuite reconfirmé à travers leurs réactions et leurs commentaires en marge du Salon. Le week-end dernier, c'était au tour de Aziz Akhannouch de rendre la courtoisie, mais il n'y est pas allé les mains vides. Il a signé trois accords de partenariat avec son homologue algérien au sujet de la protection phytosanitaire des végétaux, de la recherche scientifique, de la formation et de la vulgarisation agricole. Ce sont justement ces deux derniers volets qui intéressent particulièrement les Algériens. Lors de leur passage chez nous, ils sont même allés jusqu'à demander que des agriculteurs marocains viennent travailler de l'autre côté de la frontière pour cultiver les terres, mais surtout pour transmettre leur savoir-faire. On n'en est pas encore là bien sûr, vu que le Plan Maroc Vert n'en est qu'à ses premiers pas et qu'il aura besoin de bras pour le porter. Mais pour comprendre cet intérêt algérien pour notre agriculture et surtout le degré de sérieux de leur démarche, il faut connaître un détail très révélateur. Lors de la visite d'Akhannouch en Algérie en fin de semaine dernière, et pendant le dîner donné en l'honneur de la délégation marocaine par le ministre algérien de l'Agriculture, les participants ont eu droit à la visite surprise de Dahou Ould Kablia, le ministre de l'Intérieur et des collectivités locales, celui-là même qui se charge dernièrement de faire toutes les déclarations officielles à la place du président Bouteflika, depuis que le printemps arabe s'est déclaré en Algérie. D'ailleurs, Ould Kablia ne s'est pas contenté d'une visite furtive, mais est resté pour dîner et a même offert un présent à Akhannouch. Un gage de partenariat fructueux ? Qu'essaye-t-il de semer ? Et qu'est-ce que la partie marocaine pourrait bien gagner à se rapprocher du voisin algérien ? Il faut savoir que sur certains volets désignés par le plan Maroc vert comme prioritaires pour la prochaine étape, les Algériens sont très bien avancés et pourraient même nous servir de modèle, quand il s'agit d'agriculture saharienne (palmier dattier), d'agrumes, ou carrément de complexes agro-alimentaires et de conditionnement de fruits. Les agriculteurs qui ont fait le déplacement ont pu le constater de visu. Cela permettra certainement de dynamiser la réforme en cours. Côté algérien, c'est plutôt la formation et la recherche et développement qui les intéresse chez nous. L'autre facteur qui pourrait expliquer pourquoi, depuis avril dernier, les Algériens essayent par tous les moyens d'activer le partenariat agricole avec le Maroc, réside dans le contexte régional. Sur ce plan, historiquement, l'essentiel du travail était fait avec la Tunisie, le Maroc étant éliminé d'office du champ visuel des dirigeants, vu le climat politique entre les deux pays. Le printemps arabe, qui a frappé fort là aussi, a fait que l'Algérie regarde désormais de plus près les autres opportunités existantes et surtout les plus pérennes. C'est dans ce cadre là que le tapis «vert» est déroulé pour Akhannouch. Si l'on tient compte de toutes ces évolutions qui ne peuvent de toute manière être que positives, force est de constater que l'agriculture n'est pas le seul secteur visé par le voisin. Il y a eu, auparavant, une approche similaire avec Amina Benkhadra, ministre de l'Energie et des mines et rien n'exclut que le suivant sur la liste soit le Chami ou encore le Hejira et pourquoi pas le Zenagui... pour, in fine, forcer le destin et enfin oser mettre de côté l'ego des «politiques» pour faire le premier pas vers le... Fassi Fihri.