Quand on cite le terme halal, la première chose qui vient à l'esprit est la technique d'abattage en conformité, ou non, avec les lois islamiques. Or, d'un point de vue industriel, le terme halal renvoie, entre autres, à un ensemble d'exigences et de réglementations mises en place à l'international par certains pays, mais aussi par des opérateurs privés, spécialisés en certifications. En outre, l'existence d'un marché mondial du halal, appelé par les spécialistes le marché du «croissant vert», en référence à l'espace couvert par les pays «musulmans», et allant du sud-est asiatique à l'Afrique du nord, est une réalité. Confirmé par plusieurs rapports mondiaux, non seulement ce marché existe bel et bien, il est estimé à 2 milliards d'euros avec une croissance à deux chiffres et un développement fulgurant des transactions, ce qui pousse les spécialistes à dire que l'avenir de la finance islamique repose sur l'économie halal, mais les opportunités qu'il peut offrir sont énormes. Pour les saisir, les opérateurs doivent respecter les normes mises en place par l'Imanor, et sur une échelle internationale, se conformer à un grand nombre de normes mondiales. Au cours de la conférence-débat organisée par le club halal de l'Asmex, le 13 janvier sous le thème : «Le marché du halal : exigences réglementaires et opportunités à l'exportation», une question primordiale a été soulevée. Comment doit-on se comporter pour saisir les opportunités qui se présentent aux opérateurs marocains, le tout en conformité avec la réglementation exigée à l'international ? Les normes mises en place par l'Institut marocain de normalisation régulent non seulement l'abattage et la production des viandes, mais également tout ce qui entre dans la production des produits laitiers, les boissons gazeuses, les céréales ou le miel. Le tout en respectant le principe de l'unanimité des courants (Madahib) islamiques. Sur les marchés mondiaux, les producteurs doivent surtout relever plusieurs défis. Selon Marc Deschamps, animateur du Club Halal belge, les opérateurs doivent en premier lieu respecter le principe de la diversité en donnant au contexte économique local l'importance qu'il mérite. «Aussi, pour s'adapter avec les marchés mondiaux, les exportateurs doivent prendre en compte l'importance de la proximité dans la distribution : entre 60 et 70% des produits sont achetés dans des magasins de proximité. Ils doivent aussi respecter l'identité des produits et éviter toute confusion sur la licité (halal) ou non. En termes de qualité, la traçabilité reste également un élément essentiel à respecter. Les scandales qui ont explosé en Europe dernièrement lui ont conféré plus d'importance. Finalement les marchés doivent restés crédibles. Cela passe essentiellement par la régulation dudit marché et surtout par la certification». Du point de vue du Dr Rachid Fetouaki de Halal Control, un organisme spécialisé dans le contrôle et la certification de l'alimentation halal, une des premières conditions pour l'exportation des produits halal est la mise en place par les entreprises d'un système d'assurance Halal. Sur le terrain, parmi les pays les plus avancés dans la certification halal figurent l'Indonésie et la Malaisie. Ces deux pays, souvent donnés comme exemples concernant leur rigueur en matière de régulation, ont mis en place un bon nombre de barrières à l'entrée des produits qui ne sont pas conformes. «Cela peut aller jusqu'à renvoyer aux frontières de grands stocks de marchandises. La Malaisie a même revu l'avis favorable, donné préalablement sur l'abattage mécanique après avoir relevé un impact négatif sur la confiance octroyée par le consommateur malaisien», assure Fetouaki. Sur une échelle internationale, les normes prennent en compte des procédés de production de tout genre. En Turquie, pays fort d'une économie halal grandissante, l'étourdissement, un procédé qui consiste à rendre inconscients les animaux avant leur mise à mort, et qui est interdit au Maroc, est permis, à l'opposé de la plupart des autres pays du croissant vert, qui jugent cette pratique trop violente, bien qu'elle se base sur une assise éthique. Ce qui peut paraître encore plus controversé et que Gimdes, la norme halal phare de la Turquie, prend comme assise, c'est que «tout ce qui est halal ne peut pas être mauvais pour la santé». Il est un autre exemple qui est la conversion des lignes de production pour se conformer avec les normes halal. «Pour Halal Control, ces sociétés sont dans l'obligation de procéder à un lavage industriel spécifique de leurs lignes de production pour être conformes aux normes. Cela nécessite l'utilisation de matières abrasives dans le lavage», conclut Fetouaki.