Nouha Laaboudi, Vice-présidente de Institut juridique marocain Les Eco : Vous organisez une journée dont le thème est «L'impact du nouveau dispositif de protection des consommateurs sur le droit et la pratique du crédit immobilier». Pourquoi ce choix ? Nouha Laaboudi : La protection du consommateur est entrée dans une nouvelle phase, caractérisée par l'adoption d'un dispositif juridique édictant des mesures de protection des consommateurs. Outre la promulgation de loi 31-08, des textes d'application complétant cet arsenal juridique viennent de voir le jour, d'où le choix de cette thématique. Il est important de préciser que certes la protection du consommateur, notamment en matière contractuelle, a été auparavant encadrée à travers d'autres dispositifs juridiques, notamment le dahir de 1913 formant code des obligations et contrats (D.O.C). Cependant, la loi 31-08 constitue un tournant dans ce processus, dans la mesure où il s'agit du premier texte de loi qui a expressément édicté des mesures protégeant le consommateur «emprunteur», dans le cadre du crédit immobilier. En outre, l'emprise d'une économie de marché où les conditions d'accès au crédit, offertes à l'emprunteur peu averti, pourraient avoir des conséquences néfastes sur sa situation justifie la consolidation de cette protection. Faut-il institutionnaliser la protection du consommateur ? Certainement ! L'institutionnalisation de la protection du consommateur, notamment à travers la mise en place d'organes de consultation, contribuera à la définition et à la consolidation de la politique de l'Etat en matière de protection du consommateur. Ces organes, de par leur mission de relais entre le consommateur et les institutions créatrices de droit, peuvent constituer une force de proposition de solutions portant sur la protection du consommateur. Ces solutions peuvent éventuellement être reprises par les pouvoirs publics dans l'intérêt du consommateur. C'est ainsi que la loi 31-08 a prévu dans ses articles 204 et 205 la création d'un Conseil consultatif supérieur de la consommation, dont la mission principale consiste à proposer et à émettre un avis sur les mesures à même de promouvoir une culture consumériste au Maroc. Un projet de décret fixant les modalités de son fonctionnement a également été soumis au secrétariat général du gouvernement pour observation. Comment promouvoir l'action associative de protection du consommateur au Maroc ? Il y a une urgence à soutenir le mouvement consumériste, car il assume des missions essentielles de proximité : vulgarisation du droit, information, sensibilisation, etc. Pour cela, un travail de professionnalisation des associations s'impose. Il faut aussi les aider à s'organiser pour constituer réellement une force de proposition. Il faut également leur procurer un cadre juridique adéquat, leur permettant d'agir judiciairement pour la défense des intérêts des consommateurs. Sur ce plan malheureusement, les textes d'application de la loi sont restrictifs et soumettent cette possibilité à des conditions draconiennes pour l'accès à l'utilité publique. L'Institut juridique marocain vient d'être mis en place. Quelles sont ses missions et la particularité de son action ? L'Institut juridique marocain est une institution à but non lucratif, fondée par une équipe de juristes. Il a pour mission d'accompagner le processus de modernisation du droit positif marocain et d'œuvrer à la promotion des droits économiques, sociaux et culturels. La particularité de sa mission est de constituer une force de veille et de proposition pour la modernisation et le progrès du droit et de contribuer ainsi au rapprochement de la législation nationale avec les législations des pays partenaires du royaume.