Le torchon brûle toujours entre les armateurs de la pêche hauturière et le ministère de l'Agriculture et des pêches maritimes. Ils ont adressé une lettre au département de tutelle, pour l'informer de leur «refus de sortie» prévue pour le 20 juin prochain, une date qui coïncide avec la reprise de la campagne de pêche des céphalopodes. Une décision prise à l'unanimité à l'issue de l'assemblée générale de l'Apapham (Association professionnelle des armateurs de la pêche hauturière du Maroc), tenue lundi. En cause, la baisse cette année des quotas réservés à la filière (10.000 tonnes au lieu de 12.000 en 2009). Le ministère a, en effet, réduit les quotas des armateurs de la filière sur la base des recommandations de l'Institut national de la ressource halieutique (INRH), soit 24 tonnes par navire. Une réduction due au manque des ressources céphalopodières, selon une source informée au département de tutelle. Selon Rachid Benkirane, président par intérim de l'Apapham, la raréfaction de la ressource n'est que le résultat de l'échec des politiques suivies jusqu'à maintenant pour la reconstituer, notamment le plan d'aménagement des pêcheries poulpières, daté de 2004, dont «les dispositions ne sont pas appliquées», indique Benkirane. Selon ce dernier, les membres de l'Apapham ne demandent pas une augmentation des quotas octroyés. «Nous savons que la ressource n'est pas au rendez-vous, et ce pour la simple raison que d'autres facteurs ont fait qu'elle ne s'est pas reconstituée», explique-t-il. Benkirane fait allusion à la pêche illicite et au laxisme des autorités de contrôle (Office national de la pêche, Marine royale...). Les professionnels indiquent également que la réduction des quotas menace la viabilité économique de leurs sociétés. «Les quotas fixés par le ministère ne sont pas rentables», souligne-t-on. Selon les estimations des professionnels, un navire de pêche hauturière en activité dépense quotidiennement près de 20.000 DH. D'autant plus que les prix du poulpe à l'international ne sont pas attractifs (6.000 dollars la tonne). Les professionnels parlent également de «manque de visibilité favorisé par les décisions du ministère». «Les annonces des quotas ne sont faites qu'une semaine avant la reprise de la campagne de pêche. Un manque de visibilité qui impacte à chaque fois les prévisions des opérateurs», souligne cet armateur. Aujourd'hui à Agadir, les professionnels de l'Apapham devraient se réunir avec les représentants du ministre de l'Agriculture et des pêches maritimes, Aziz Akhanouch. Ce dernier a en effet délégué Zakia Driouech, directrice de la Pêche et de l'aquaculture, pour recueillir les doléances des professionnels de l'Aphapam. «Nous allons recevoir Mme Driouch, mais nous maintenons notre souhait de rencontrer le ministre pour trouver une solution à la crise qui sévit dans la filière», insiste le président par intérim de l'Apapham. Selon lui, la réunion d'aujourd'hui devrait déterminer les futures actions de l'Apapham. Le président parle d'une conférence de presse pour sensibiliser à la crise du secteur et d'une lettre adressée au Roi. Rappelons que la décision de l'Apapham intervient dans un contexte particulier. Le ministère peaufine en effet actuellement un «projet de restructuration de la pêche hauturière», basé sur la réduction des navires céphalopodiers. Un plan qui a suscité beaucoup de remous, notamment du côté du Syndicat national des marins et officiers pêcheurs. Ce dernier avait tenu un sit-in vendredi dernier devant le siège du département de tutelle. Selon lui, ce plan de restructuration menacerait 4.000 postes d'emploi dans le secteur.