Depuis plus de trois ans qu'on en parle, le projet de loi sur l'assurance contre le terrorisme et les catastrophes naturelles vient enfin d'être validé par le conseil de gouvernement. Devrait suivre dans les mois à venir l'aval du conseil des ministres et du Parlement pour que ce dispositif entre pleinement en vigueur. En quoi consiste-t-il ? Le projet de loi porte sur deux aspects : un volet assurance et un volet solidarité. Concernant le premier point, le projet prévoit une couverture obligatoire pour les personnes disposant d'une assurance. Concrètement, dès l'entrée en vigueur de la loi, toute personne ayant un contrat d'assurance, automobile ou habitation par exemple, devra souscrire obligatoirement une assurance terrorisme et catastrophes naturelles. Deux domaines sont néanmoins exceptés de cette obligation. L'assurance-vie, d'une part, qui ne regroupe que des produis d'épargne et qui n'a donc pas à être couplée à une garantie contre les catastrophes naturelles, selon les concepteurs de la loi (la Société centrale de réassurance -SCR- et la Direction de l'assurance et de la prévoyance sociale -DAPS- du ministère des Finances). Et l'aviation, d'autre part, un secteur qui au vu de la nature de son activité se prémunit déjà contre les mêmes risques. La tarification du dispositif sera réglementée. «On ne peut opter pour une libre concurrence entre les compagnies à ce niveau pour deux raisons majeures : l'inexistence de périodicité des risques et l'absence de statistiques au niveau des compagnies leur permettant d'établir des grilles tarifaires», explique-t-on à la DAPS. À ce titre, il est à préciser que pour établir la tarification, la DAPS et la SCR ont pris en considération, pour les catastrophes naturelles, l'historique du Maroc en la matière sur le siècle passé. Il devrait en résulter une carte des risques pour chaque commune. S'agissant des actes terroristes, les concepteurs du projet de loi se sont inspirés des pratiques internationales. Tout cela permettra d'établir une prime d'équilibre laquelle sera annoncée ultérieurement par les textes d'application. Pour ce qui est de la gestion du risque par les compagnies d'assurance, le schéma retenu prévoit une prise en charge partielle, à savoir que les assureurs nationaux se réassureront auprès d'opérateurs étrangers dans la limite d'un plafond. Le reliquat sera couvert par la SCR. Celle-ci serait aussi systématiquement sollicitée en cas de non-disponibilité de certaines couvertures sur le marché international de la réassurance. Cela dit, en cas de dépassement des capacités de la SCR, c'est l'Etat qui devra venir à la rescousse. Un fonds dédié sera constitué à cet effet. Par ailleurs, afin de préserver à long terme l'équilibre financier du système, le montant de l'indemnisation des victimes sera plafonné. Toutefois, ce pourrait être dépassé si l'assuré paie une surprime. Fonds de solidarité pour les non assurés En ce qui concerne le deuxième volet, celui de la solidarité, le projet de loi prévoit que les victimes qui n'ont pas d'assurance, qu'elles soient marocaines ou étrangères, soient indemnisées pour tous les types de dégâts, aussi bien matériels que corporels. À cet égard, il sera créé «un fonds de solidarité contre les événements catastrophiques» alimenté par les primes d'assurance, les taxes prélevées sur le même secteur, en plus d'un apport étatique. Dans ce système de solidarité, comme dans le schéma de l'assurance, et toujours dans le souci de pérenniser le système, l'indemnisation des victimes sera également plafonnée. Ainsi, en cas de perte d'habitation, la victime sera dédommagée selon sa qualité de propriétaire ou de locataire. Dans le premier cas, elle bénéficiera d'un capital de 250.000 dirhams, soit le prix d'un logement économique. S'il s'agit d'un locataire, le projet de loi prévoit le versement d'une année de loyer afin de permettre son relogement rapide. Signalons enfin que le projet de loi prévoit la création d'une commission de suivi chargée de formuler un avis sur l'opportunité de déclarer un état de catastrophe par voie d'acte administratif. Et ce n'est que lorsque cette commission déclare l'état de catastrophe que tout le dispositif d'assurance se met en place. Marché vierge En parcourant les statistiques publiées annuellement par la DAPS (Direction de l'assurance et de la prévoyance sociale -DAPS- du ministère des Finances) l'on découvre bien l'existence de quelques assurances garantissant contre les catastrophes naturelles et qui sont commercialisées par les compagnies nationales. Mais pour ainsi dire, la part de ces garanties dans le chiffre d'affaires global du secteur des assurances est marginale voire insignifiante. À preuve, en 2009, l'assurance «éléments naturels» a généré 631.000 dirhams de souscription et la garantie «mortalité du bétail» n'a drainé que 152.000 dirhams. C'est dire qu'avec un peu plus de 6 millions de dirhams de souscription, l'assurance «grêle ou gelée» se démarque très nettement. Mais même ce volume paraît négligeable au regard du chiffres d'affaires total du secteur des assurances : 21 milliards de dirhams. La raison de ce flop tient selon les compagnies d'assurance au caractère facultatif de ces polices d'assurance. Ce à quoi devrait remédier le projet de loi pour l'assurance contre les catastrophes naturelles.