Le taux d'investissement au Maroc est parmi les plus élevés au monde. Il est supérieur de 6% du PIB par rapport à l'épargne nationale. L'investissement impacte peu le rythme de croissance économique. Un des paradoxes, peut-être le plus important d'ailleurs, relevé par la Banque africaine de développement (BAD) dans son rapport «Diagnostic de croissance du Maroc: analyse des contraintes à une croissance large et inclusive», rendu public il y a quelques jours, a trait au décalage, à la faible corrélation entre le niveau de l'investissement et de celui de la croissance. Le constat n'est certes pas nouveau, il n'est pas moins pertinent pour autant. Le Haut commissariat au plan (HCP) a déjà eu à souligner ce phénomène dans son rapport «Prospective Maroc 2030 : les sources de croissance économique», publié en septembre 2005. Le FMI, dans un rapport de novembre 2011 au titre de l'article IV, attirait lui aussi l'attention sur cette question et voici ce qu'il y écrivait : «Bien que, en proportion du PIB, l'investissement ait nettement progressé au Maroc ces dix dernières années, cela ne s'est pas traduit par une croissance économique plus forte (…) Ce décalage tient peut-être en partie à la qualité et à l'efficacité des projets d'investissement». Plus complet est le travail que le HCP est en train de finaliser cette fois exclusivement sur le thème de l'investissement et les raisons de sa faible efficacité. On en saura davantage lors de sa publication. En attendant, il faut savoir que le taux d'investissement, selon les estimations du HCP pour 2014, s'établit à 31,8% du PIB, en baisse de 2,4 points par rapport à 2013. Malgré tout, il reste élevé comparé à des économies proches de celle du Maroc. En Egypte par exemple, le taux d'investissement était de 16% du PIB en 2012, en Slovénie de 17,4%, au Mexique de 20,7%, en Jordanie de 25%… Surtout, le taux d'investissement est élevé par rapport à l'épargne nationale qui, elle, se situe à 25,8% du PIB en 2014, soit un écart (donc un déficit de financement de l'économie) de 6% du PIB. C'est le lieu de rappeler ici qu'en 2012, ce déficit avait été de près de 10% du PIB. Inutile de préciser que ce déficit est financé par…l'endettement contracté à l'international. Mais lorsque l'investissement ne donne pas lieu à une progression du PIB proportionnelle, cela ne signifie pas que le potentiel de croissance n'existe pas. Ce que cela montre, c'est «l'existence de facteurs d'inefficacité dans le processus de production», analysait le FMI dans son rapport de 2011. Mais ces facteurs d'inefficacité sont dépassables, selon l'institution de Breton Woods, grâce à une panoplie de réformes structurelles, en particulier «l'amélioration de la qualité institutionnelle et le renforcement du capital humain(…)».