En dépit de la baisse de 6,7% du bénéfice global de la cote au titre de 2013, le marché se maintient en hausse, à près de 5%. Des analystes attribuent la tendance aux résultats annuels qui témoignent malgré tout d'un redressement de la situation. D'autres qualifient la hausse de brutale et considèrent qu'elle n'est pas justifiée économiquement. Le comportement du marché boursier continue de surprendre. La rupture avec le cycle baissier est sur toutes les lèvres depuis le début de l'année et les professionnels n'attendaient que la publication des résultats 2013 des sociétés cotées, prévus en légère baisse, pour pouvoir confirmer ce constat. Finalement, les bénéfices de la cote sont en net recul de 6,7% par rapport à 2012, ce qui aurait dû naturellement renverser la tendance haussière des cours entamée depuis plusieurs mois. Il n'en est rien! L'indice général du marché se maintient en hausse. Le 15 avril, le Masi affichait une performance de près de 5% alors qu'à la même date de l'année dernière, il était à -1% pour des résultats 2012 en repli de 10%. Cette hausse est-elle justifiée ? Traduit-elle un redressement de la situation des sociétés cotées et des anticipations favorables des investisseurs ou plutôt un simple mouvement mécanique après plusieurs années de baisse ? Les explications des analystes interrogés sont pour le moins divergentes. D'abord, s'il y a un élément qui continue de perturber les investisseurs, au-delà des résultats et du contexte économique, c'est bien la liquidité du marché. En effet, la récente reprise ne s'est pas accompagnée d'un redressement du volume des transactions. Avec une moyenne quotidienne de 86,5 MDH échangée depuis le 1er janvier sur le marché central, le volume est en baisse de 5% par rapport à 2013, année durant laquelle il était déjà très faible. On est donc loin des niveaux atteints lors des années fastes de la bourse. «Le marché actions est certes en train de se redresser, mais cette reprise est sans grande profondeur. Il suffit qu'une poignée de spéculateurs s'échangent quelques actions durant une séance boursière pour que le marché soit tiré à la hausse ou à la baisse», se désole un analyste. Quoi qu'il en soit, la trajectoire ascendante du marché n'a pas été modifiée par la baisse des bénéfices de la cote, quoique des mouvements de panique ont été décelés sur quelques valeurs, comme Addoha ou encore Attijariwafa bank. Pour certaines sociétés de bourse, les investisseurs, qui se sont positionnés à l'achat dès septembre 2013 suite à l'anticipation de résultats favorables au titre de l'année, n'ont globalement pas changé de comportement car, pour eux, l'essentiel des réalisations des sociétés cotées reste conforme aux prévisions. Et il faut dire que si certains éléments exceptionnels n'avaient pas grevé la masse bénéficiaire globale, la baisse aurait été moins forte. Pour Upline Securities, par exemple, si l'on neutralise l'effet du dénouement du litige fiscal d'Attijariwafa bank et de Maroc Telecom ainsi que le déficit exceptionnel de la Samir, le résultat net global de la cote aurait limité sa baisse à 2,5%. Un analyste va jusqu'à dire que dans ce cas, le marché aurait pu afficher une hausse de 8% à 10%. Pour lui, les investisseurs se veulent optimistes cette année. Les institutionnels renforcent légèrement leurs positions au moment où les particuliers reviennent progressivement sur le marché. Les dividendes annoncés maintiennent le moral des investisseurs Un autre élément qui a permis aux indices de se maintenir en hausse est celui des dividendes. En effet, malgré la baisse des résultats, les émetteurs se sont montrés généreux cette année en décidant de distribuer la bagatelle de 19,5 milliards de DH, en hausse de 7,7% par rapport à 2012. Ce qui situe le taux de rendement de la cote à 4,1% et le taux de distribution des bénéfices à 76%. Ces dividendes annoncés ont conforté la décision des investisseurs de se renforcer sur le marché. Mais une question se pose: vont-ils déserter la place une fois les dividendes encaissés ? Les professionnels écartent ce scénario. «D'abord, parce que les particuliers qui adoptent généralement ce type de comportement ne sont plus aussi présents sur le marché. Ils reviennent progressivement et pas dans le but de fuir après l'encaissement des dividendes. Ensuite, les institutionnels ne peuvent suivre cette stratégie axée sur les dividendes vu leur stratégie de placement à long terme», explique le directeur d'une cellule analyse et recherche. Cependant, un groupe d'analystes assez sceptiques considère que ce mouvement de hausse n'a aucune base fondamentale. «Le marché a enregistré une progression assez brutale depuis le début de l'année. Pourtant, les volumes demeurent faibles et aucun signal positif, que ce soit sur le plan économique ou financier, n'est apparent pour la justifier», estime un professionnel. En effet, malgré quelques améliorations sur le plan économique, la situation du pays demeure difficile avec un secteur secondaire toujours en ralentissement et des déficits intérieurs et extérieurs qui se maintiennent à des niveaux inquiétants. «D'un autre côté, le résultat agrégé de la cote est ressorti en contraction, avec ou sans éléments non récurrents. Si hausse il y a actuellement, elle est surtout le fait des étrangers et des institutionnels qui, psychologiquement, croient dur comme fer que la place est sortie de son cycle baissier», ajoute-t-il. A son sens, la performance actuelle du Masi est le maximum que peut réaliser le marché cette année. Au final, qu'ils croient ou non en la profondeur de la reprise, les analystes s'accordent à dire qu'on ne va pas assister à une progression exponentielle du Masi cette année. «Mais le marché devrait commencer à effacer ses pertes accumulées depuis 2008», ajoute l'un d'entre eux. Le regain de confiance se fait progressivement et l'augmentation du poids du Maroc dans l'indice MSCI Frontier Market, qui sera effective en mai, favorise le retour des étrangers, surtout que les Emirats Arabes Unis et le Qatar vont se retirer de cet indice. La tendance devrait donc rester haussière, avec toutefois des phases de prise de bénéfices.