Les trois chaînes publiques, Al Oula, 2M et Medi1 TV annoncent leurs programmes pour Ramadan : sitcoms, feuilletons, nouvelles séries… Souvent frustrés, les spectateurs espèrent être bien servis cette année. Que serviront aux téléspectateurs nos chaînes publiques pendant le Ramadan ? Tout le monde se pose la question, à quelques jours de l'entame de ce mois sacré. Les trois chaînes les plus regardées, Al Oula, 2M, et Medi 1 TV, rivalisent entre elles cette année encore pour servir les meilleurs «plats», quitte à y consacrer des budgets conséquents. Elles savent que les Marocains, réunis en famille, ont les yeux rivés sur leur petit écran pendant la tranche du prime-time (juste avant, pendant et après le ftour), et donc la course est lancée pour réaliser la meilleure audience, au grand bonheur des annonceurs. Les recettes publicitaires flambent pendant le Ramadan d'une manière exceptionnelle. Selon les annonceurs eux-mêmes, c'est le moment du f'tour qui est le plus propice, où l'on assiste à ce que les régies appellent «le regain identitaire des téléspectateurs». Selon des estimations, pendant les deux heures qui suivent la rupture du jeûne, le taux d'audience peut grimper jusqu'à 90%. Mais, pour quels résultats ? Celui des recettes, il est, l'on convient, non négligeable ; il est même copieux : en 2012 pour ne prendre que l'exemple de la chaîne 2M, si les productions télévisuelles pour le mois de Ramadan avaient coûté 37 millions de dirhams, les recettes, elles, y ont atteint 140 MDH. Elles vont certainement encore augmenter, car si cette même année 2012, les tarifs f'tour se situaient entre 53 880 DH et 84 150 DH, ils seront cette année entre 73 400 DH et 109 400 DH. Ces tarifs concernent les spots de 30 secondes durant la tranche horaire allant de la rupture du jeûne à 21h 30. Quid de la qualité ? Le résultat n'est malheureusement pas toujours probant. Des dizaines de milliers de téléspectateurs, frustrés, se détournent dès les premiers jours pour aller voir ailleurs. Pour ne donner que l'exemple de l'année dernière (Ramadan 2012), les chiffres publiés par MarocMétrie montrent le degré d'insatisfaction de la part des spectateurs marocains : plus de 50,5% zappaient pour regarder des chaînes étrangères, 36,7% ont regardé la chaîne 2M, 8% Al Aoula, et 3,9% la chaîne Al Maghribia. Audience médiocre quand on sait les moyens mobilisés toute l'année spécialement pour Ramadan. Mais 2M reste le leader incontesté, malgré ce mécontentement, sur le plan de l'audience. Des estimations parlent de 17,5 millions de spectateurs par jour en 2012, contre 12,5 millions en 2011. La masse de spots publicitaires dérange le spectateur Ce n'est pas seulement la qualité d'un certain nombre d'émissions qui fait fuir le spectateur, mais aussi la masse des spots publicitaires qui s'abattent sur lui d'un seul coup, et qui domine une grande partie des ces heures de grande écoute. D'ailleurs, la question a été soulevée à l'intérieur du Parlement par certains députés en 2012, et Mustapha El Khalfi, ministre de la communication, avait lui-même émis la même remarque. Les artistes et les producteurs s'attachent-ils plus à leurs cachets qu'à la confection d'émissions de qualité, comme accusent nombre de spectateurs ? Problème d'artistes et de scénaristes ? De gouvernance ? Ou est-ce plutôt la procédure du choix qui pose problème ? Une chose est sûre : la comédie, cheval de bataille de toutes les chaînes pendant le mois de Ramadan, s'avère souvent un flop. Comme le dit ce spécialiste, «c'est un genre difficile, qui demande beaucoup de temps et d'études. D'ailleurs, chaque année on nous fourgue les mêmes plats mijotés par les mêmes figures». Averty Market Research & Intelligence, un institut d'enquêtes et de sondages d'opinion, confirme : pendant Ramadan 2012, elle a réalisé une enquête auprès de 1 042 répondants, les résultats tendent plutôt vers l'insatisfaction. Si en temps normal, 70% ne regardent la télévision marocaine que rarement, ou occasionnellement, 4% ne la regardent jamais. La «haute saison» de la télévision marocaine reste le mois de Ramadan, et encore ! 35,4% seulement des répondants la regardent souvent contre 26,7% durant toute l'année. Les raisons de ce léger regain ne sont pas à chercher du côté de la qualité des programmes, mais il s'explique principalement par la réunion familiale autour du ftour pour près de 80% des répondants. Cela dit, n'anticipons pas pour ce Ramadan 2013, et restons optimistes, les programmes des trois chaînes dont nous déclinons ici quelques grilles (voir page suivante) sont très variés, et certaines figures emblématiques de la comédie marocaine sont présentes, et arracheront probablement, malgré l'insatisfaction ambiante, quelques rires aux téléspectateurs. L'enquête précitée avait constatée d'ailleurs quelques préférences pour les programmes diffusés en 2012 sur les quatre chaînes : Medi1 TV et Assadissa, suivies de Tamazight TV et Arriadia. Une préférence allait à deux séries ayant pulvérisé l'audimat : «Firkat Naji atallah» de la star égyptienne Adil Imam (qui revient d'ailleurs cette année sur la même Medi 1 TV, avec une nouvelle série intitulée «Al Arraf») ; et «Bnat Lalla Mennana», la saga adaptée du théâtre au petit écran, celle de quatre jeunes filles cloitrées par leur mère, et qui vont s'engager dans une lutte sans merci pour conquérir leur liberté. L'enquête précitée a révélé autre chose : une prédilection particulière des spectateurs pour trois figures incontournables du petit écran au mois de Ramadan : Hassan El Fad, Mohamed El Jem et Aziz El Hattab. Ils seront encore de la partie cette année.