Hausse de 20 à 30% de la taxe sur les profits fonciers et augmentation de la base imposable pour les terrains hérités sont prévues dans le projet de Loi de finances. A moins d'incitations supplémentaires, les professionnels ne comptent pas investir dans le logement pour la classe moyenne. Les promoteurs immobiliers tirent la sonnette d'alarme. Déjà confrontés à une rareté du foncier, ces professionnels, réunis sous la bannière de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), craignent une aggravation de la situation du fait de nouvelles dispositions prévues dans le projet de Loi de finances. «Des changements actuellement à l'étude au niveau de certaines taxes pourraient menacer gravement la disponibilité du foncier», explicite Youssef Ibn Mansour, président de la FNPI. En étant pessimiste, ce dernier avance même que les ventes de terrains pourraient s'en trouver complètement gelées dans un contexte difficile. Ce sont précisément deux dispositions du projet de budget, passées bizarrement inaperçues jusqu'à présent, qui alimentent toutes ces inquiétudes. Il s'agit en premier lieu d'une révision conséquente du taux de l'impôt sur les profits fonciers sur les terrains possédés depuis 5 ans et plus. L'imposition de ce type de profits est relevée de 50% dans l'actuel projet de Loi de finances puisqu'elle passe de 20% à 30%, «ce qui constitue une augmentation inédite», commente M. Ibn Mansour. En second lieu, les promoteurs s'inquiètent d'une révision du mode de détermination du prix d'acquisition à considérer en cas de cession de terrains acquis par héritage. A l'heure actuelle, les cédants de ce type d'actifs ont la possibilité de faire considérer la valeur de marché au moment de l'héritage comme prix d'acquisition. Mais si la nouvelle disposition venait à être adoptée, le prix d'acquisition à considérer devra correspondre au prix d'achat déboursé par le propriétaire décédé, ou à la valeur vénale de l'époque si ce dernier a lui-même hérité le terrain. Cela devrait nécessairement augmenter la plus-value à retenir, ce qui au final induira une plus forte imposition. L'une comme l'autre mesure, de par le fait qu'elles alourdissent l'impôt sur les profits fonciers, font donc craindre aux promoteurs immobiliers une décrue de la commercialisation des terrains. Les promoteurs risquent de ne signer aucune convention pour la classe moyenne Et là n'est pas le seul motif d'inquiétude des professionnels quant à l'actuel projet de Loi de finances. Tel qu'il existe aujourd'hui, celui-ci gagnerait encore, selon eux, à être revu pour ce qui est du logement pour la classe moyenne. «Les améliorations apportées à ce dispositif dans le cadre des amendements de la Loi de finances ne tiennent toujours pas compte des réalités du terrain, notamment pour ce qui est de la cherté du foncier privé ou encore de la rentabilité escomptée des entreprises qui s'engagent dans ce type de projet», tranche M. Ibn Mansour, qui exprime de fait des craintes quant à la l'intérêt des investisseurs pour ce dispositif. Les modifications apportées à la formule de ce type de logements ont consisté jusqu'à présent à relever son prix de vente de 5 000 DH à 6 000 DH TTC. Or, selon l'argumentaire des promoteurs, ce dernier niveau de prix correspond toujours au tarif pratiqué actuellement pour le logement social qui est de 5 000 DH HT. «Il est inconcevable de réaliser un tel produit avec des conditions répondant aux exigences de la classe moyenne en termes de qualité», affirme M. Ibn Mansour. En effet, «le logement dédié à la classe moyenne devrait être supérieur en termes de prestations, ce qui suppose aussi un prix plus élevé», défend le président de la FNPI. Sachant cela, la seule configuration viable pour la FNPI consisterait en la réalisation de logements pour la classe moyenne sur du foncier public à un prix de 6 000 DH HT. Sous entendu que l'Etat prenne en charge la TVA pour le compte des acheteurs à l'instar de ce qui se fait pour le logement social. Car sans mesures fiscales incitatives, «il n'y aurait aucun intérêt pour les promoteurs immobiliers à signer des conventions avec l'Etat», précise bien M. Ibn Mansour. Le projet de budget ne trouve pas encore grâce aux yeux des promoteurs du fait qu'il prévoit le relèvement des taxes relatives à des matériaux de construction, ce qui pourrait renchérir davantage les prix de l'immobilier déjà jugés élevés. Allusion faite bien sûr à la taxe spéciale sur le fer à béton qui pourrait subir une hausse de 0,10 DH/KG ainsi que la taxe spéciale sur le sable fixée à 30 DH/t. «Ces augmentations auront une incidence sur le coût de production», insiste M. Ibn Mansour. Et si les promoteurs ont les mains liées pour ce qui est des tarifs des logements à 250 000 DH et 140 000 DH, dont les prix sont fixés, l'on doute bien qu'ils ne se priveront pas par ailleurs de répercuter la hausse sur le consommateur final.