A cause de la régionalisation avancée, les élections n'auront pas lieu avant fin 2013. Les listes électorales, le mode de scrutin, le découpage… Tous les textes seront révisés. Le report des élections arrange finalement toute la classe politique. Ecore une année, voire plus, de blocage pour certaines villes, une année de sursis pour les conseillers et une année sans majorité dans la deuxième Chambre pour le gouvernement (les quatre formations de la majorité ne comptent que 94 sièges sur 270). C'est aussi une autre année où le législateur doit jongler avec deux institutions, la première et la deuxième Chambres, régies par deux textes constitutionnels différents. C'est que malgré l'absence, pour le moment, d'un calendrier précis, tout porte à croire que les élections n'auront pas lieu avant décembre de l'année prochaine. Même la date de juin 2013 évoquée par le ministre de l'intérieur Mohand Laenser n'est pas d'actualité. C'est d'ailleurs le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, qui, sans être précis, lui non plus, qui a avancé la période de «septembre 2013, voire décembre» lors de son passage devant la Chambre des conseillers, le 3 juillet. Nous sommes loin de la date limite de fin 2012 voulue par le Roi, lors de son discours du Trône du 30 juillet dernier. Le chef du gouvernement avance comme motif de ce retard la difficulté de préparer et adopter à temps la panoplie des textes électoraux nécessaires à une organisation optimale de ces échéances et surtout la loi organique sur la régionalisation avancée. Il met en avant la complexité de mettre en œuvre ce projet qui nécessite encore des tractations entre partenaires politiques et, en second ordre, la lenteur de la cadence de la production législative. Cela d'autant qu'il s'agit d'un long processus. Sept opérations électorales sont prévues : les élections des conseils communaux, ceux des préfectures et provinces, les conseils régionaux et ceux des Chambres professionnelles, les élections des représentants des salariés et ceux des employeurs et enfin le scrutin relatif aux conseillers de la deuxième Chambre. En d'autres termes, il faut faire un choix. Si nous voulons réussir la régionalisation avancée, il faudra reporter les élections. Dans le cas contraire, nous pouvons très bien maintenir les institutions actuelles, organiser les élections, même avant la fin de l'année en cours. Quitte à entamer le chantier de la régionalisation après. Mais ce n'est pas tout. Car il faut aussi revoir certains aspects de l'organisation électorale restés en suspens depuis la tenue le 25 novembre 2011 des dernières élections législatives. Il s'agit, entre autres, de la révision des listes électorales, du découpage électoral et du mode de scrutin. C'est l'occasion pour le PJD notamment de ressortir une revendication qui date d'avant les dernières élections : établir les listes électorales sur la base des données de la DGSN de telle sorte que tout titulaire d'une carte d'identité nationale soit automatiquement inscrit sur les listes électorales. Le chef du gouvernement a d'ailleurs réitéré, encore une fois, cette revendication, au nom de son parti, lors de ce passage devant la Chambre des conseillers. A qui profite le report ? Autre revendication du parti au pouvoir qui semble cette fois sur la voie d'être concrétisée : soustraire l'organisation des élections à la seule tutelle du ministère de l'intérieur. C'est désormais le chef du gouvernement qui chapeaute directement la préparation de ce scrutin. Du moins dans son volet politique. C'est en effet le chef du gouvernement qui s'apprête à lancer et mener les négociations relatives aux textes électoraux avec les formations politiques. Le côté technique et logistique revient bien sûr aux techniciens du ministère de l'intérieur qui planchent actuellement sur les premières moutures de ces textes de loi. A qui profite ce report ? A priori tous les partis politiques y trouvent leur compte. A ce jour et plus d'une semaine après les déclarations du chef du gouvernement, aucun parti n'a contesté cette annonce. La seule réaction émane du RNI qui ne conteste pas la date des élections mais le fait que le chef du gouvernement en ait décidé sans en référer aux partis de l'opposition. Personne ne s'en est donc offusqué. Cela même si, au PJD, on prétend le contraire. En effet, aux dires de Abdelilah Benkirane, «aucun parti n'est aussi pressé que le PJD pour organiser les élections locales, ne serait-ce que pour avoir une représentativité au sein de la deuxième Chambre». C'était avant sa décision anti-sociale d'augmenter le prix des carburants et les multiples sorties désapprouvées de ses dirigeants et ministres. Aujourd'hui le PJD préfère laisser couler le temps, le temps justement de récupérer sa popularité. La plupart des autres partis, principalement ceux de l'opposition, n'étaient pas, eux, chauds pour organiser des élections communales peu après les législatives, de crainte de voir justement le PJD rafler la mise. Aujourd'hui, la donne a changé. Le temps joue en faveur de tous, ne serait-ce que parce des partis comme l'Istiqlal et l'USFP ont besoin du temps pour assainir leur situation interne et régler leurs problèmes organisationnels avant d'entamer le chantier des élections. Pour le PAM, ce délai devrait lui permettre de se reconstruire sur de nouvelles bases, alors que le MP a tout intérêt à profiter de ce délai pour faire le plein des notables et des élites locales et pourquoi pas récupérer les transfuges qui l'ont quitté pour d'autres cieux à la veille des communales de 2009. Reste néanmoins à régler une légère problématique légale : que faire du renouvellement du tiers sortant de la Chambre qui devrait avoir lieu avant la prochaine rentrée parlementaire, en octobre.