L'Afrique a besoin de 1.600 milliards de dollars supplémentaires d'ici 2030 pour atteindre ses objectifs de développement durable (ODD). Un gap élevé mais qui peut être comblé en activant trois leviers, selon un rapport conjoint de l'OCDE et de l'UA, présenté ce mardi à Casablanca, lors d'une rencontre organisée par CFC. Suivez La Vie éco sur Telegram Dans le cadre de la série des rencontres trimestrielles organisées par Casablanca Finance City Authority (CFCA), appelées CFC Insights, une rencontre s'est tenue, consacrée à la présentation d'un rapport élaboré par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l'Union africaine (UA), intitulé : «Dynamiques de développement en Afrique : investir dans le développement durable». L'événement, qui a connu la présence d'un parterre de personnalités du monde de la finance, d'ambassadeurs africains et d'experts, a été marqué par la projection d'un message vidéo de Leila Benali aux participants. La ministre de la Transition énergétique et du développement durable a notamment appelé à accroître massivement des financements abordables à long terme et à développer des fonds d'investissement adaptés pour un développement durable en Afrique. Dans une déclaration à La Vie éco, Lamia Merzouki, DGA de CFCA, a mis en exergue les enjeux inhérents à la problématique débattue durant la rencontre : «L'Afrique est le continent qui émet le moins de gaz à effets de serre, mais il est aussi le continent le plus vulnérable au changement climatique. En même temps, l'Afrique ne capte qu'une infime part, moins de 5%, de la finance verte internationale». Selon Arthur Minsat, directeur du Centre de l'OCDE pour le développement de l'Afrique et du Moyen-Orient, et co-auteur du rapport, le déficit de financement durable de l'Afrique avoisine les 194 milliards de dollars par an (soit 1.600 milliards de dollars d'ici 2030). Un gap à première vue élevé en valeur absolue, mais qui peut être comblé, car ce chiffre ne représente en fait que 0,2% du stock mondial d'actifs financiers et 10,5% du stock d'actifs financiers détenus par l'Afrique. «L'Afrique peut faire ce saut qualitatif, ce 'leapfrog', en investissant directement dans les infrastructures vertes résilientes aux changements climatiques», a indiqué Lamia Marzouki. La responsable n'a pas manqué de rappeler le rôle que peut jouer la place financière casablancaise, la première du continent, en tant que plateforme privilégiée à même de drainer les investissements et de les flécher vers le continent. CFC est de ce point de vue particulièrement proactive dans les réseaux internationaux, notamment via le réseau des centres financiers verts (Financial Centres for Sustainability, FC4S) créé en 2017 et co-présidé par la place financière casablancaise. Trois leviers à activer Ceci étant dit, le rapport conjoint de l'OCDE et de l'UA a relevé plusieurs écueils à surmonter pour massifier les flux de capitaux vers le continent. Selon les auteurs du rapport, l'un des principaux obstacles réside dans le fait que «la confiance des investisseurs est beaucoup plus faible en Afrique que dans d'autres régions du monde, ce qui augmente le coût du capital». Un renchérissement qui se traduit, selon le rapport, par un coût du capital 7 fois plus élevé en Afrique qu'en Europe pour les projets énergétiques. Une situation qui peut s'expliquer par un problème de perception du risque en Afrique, et surtout par un manque objectif de données fiables et détaillées. Ainsi, pour attirer des investissements plus nombreux et de meilleure qualité et combler cette lacune, les gouvernements africains et leurs partenaires devraient améliorer l'information des investisseurs. Les institutions des statistiques nationales africaines devraient fournir des données plus nombreuses et de meilleure qualité pour les évaluations des risques pays. De même, les agences de promotion des investissements et les régulateurs devraient fournir des informations plus détaillées et à jour dans des formats harmonisés. Le deuxième levier à activer concerne le renforcement des capacités des institutions financières locales. Le rapport recommande ainsi à la communauté internationale de consacrer davantage de ressources pour accroître la capitalisation des 102 institutions africaines de financement du développement (IFD) et de renforcer leur capacité à agir en tant qu'intermédiaires entre la finance internationale et les projets locaux, notamment en matière d'adaptation climatique. Enfin, le troisième levier porte sur le renforcement de l'intégration régionale. Cela consiste à mettre en œuvre des initiatives transfrontalières, telles que les corridors de développement et les infrastructures numériques, pour réduire la fragmentation du marché. Il s'agit aussi de surveiller activement la mise en œuvre du protocole d'investissement de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf).