Notre employeur nous force à solder nos droits annuels de congé avant une date donnée (épurer les droits 2009 avant le 30 avril 2010), sans quoi nous serons dépossédés de ces mêmes droits. C'est le moyen que la DRH a trouvé pour gérer les départs : un démissionnaire doit avoir le minimum de congé possible, afin de passer le maximum de son préavis au travail (et donc pas en congé). Cette pratique est-elle légale ? Tout d'abord, je voudrais préciser que le droit au congé est un droit d'ordre public, c'est-à-dire un droit auquel vous ne pouvez pas renoncer et une décision unilatérale de votre employeur ne peut vous l'enlever. En principe, le code du travail dans son article 245 annonce que les dates du congé annuel sont fixées par l'employeur après consultation des délégués des salariés, et le cas échéant des représentants des syndicats dans l'entreprise. Cela suppose qu'il appartient à l'employeur de gérer le planning des congés et de veiller étroitement, et chaque année, à la consommation par les salariés de leurs congés. A défaut, le salarié se doit de justifier pourquoi il ne voudrait pas prendre son congé. Lorsque le motif est valable et légitime, il y a report du congé à une période ultérieure. D'ailleurs, l'article 240 du code du travail dispose que «le congé annuel payé peut, après accord entre le salarié et l'employeur, être fractionné ou cumulé sur deux années consécutives». Par ailleurs, l'article 395 du code du travail qui a une portée relativement générale, apporte un délai de prescription de tous les droits de quelque nature qu'ils soient, le congé y est sous-entendu, découlant de l'exécution ou de la cessation des contrats individuels de travail qui est de deux années. D'aucuns pensent que le Droit des obligations et contrats (DOC) peut être applicable, et l'employeur peut opposer la prescription de cinq ans si le salarié ne consomme pas son congé pendant cinq années, mais ce texte est général, et la règle veut que le texte spécial, en l'occurrence le code du travail, l'emporte sur le général. Ainsi, aussi bien le fractionnement que le report, voire la consommation du congé annuel, nécessitent l'accord des deux parties, employeur et salarié. A la limite, un employeur peut forcer un salarié à prendre son congé, puisque le salarié ne va rien perdre, il gardera son salaire et ses avantages pendant ce congé, et, partant, cette situation n'est pas a priori préjudiciable ou attentatoire au salarié. En revanche, cet employeur ne peut pas priver le salarié de son congé en dehors des voies légales, qui sont pour le moment la prescription ou une injonction du juge pour liquider les congés, basée sur une demande de l'employeur, laquelle demande est justifiée par l'intérêt de la société. Il ressort de l'article 268 que tout employeur qui ne respecte pas les dispositions des articles 231 et suivants du code du travail relatives au congé payé annuel est passible d'une amende de 300 à 500 DH. Cette amende est appliquée autant de fois qu'il y a de salariés à l'égard desquels ces dispositions n'ont pas été observées, sans toutefois que le total des amendes ne puisse dépasser 20 000 DH.