Les exportations ont progressé de 40% de 2014 à 2020. L'enjeu est d'exploiter le potentiel du marché local et d'améliorer le positionnement du Maroc à l'international. Il faut miser sur la R&D, l'innovation, les ressources humaines, la logistique, la décarbonation et la digitalisation. L'industrie agroalimentaire a fortement évolué ces dernières années. La signature d'un MoU en 2014 et de contrats programmes entre le gouvernement et plusieurs opérateurs en 2017 a apporté une dynamique intéressante au secteur, au point que les industriels marocains sont devenus plus compétitifs à l'export. Selon Moulay Hafid El Alamy, ministre de l'industrie, intervenant à l'occasion du rendez-vous de l'industrie agroalimentaire, «le secteur rapporte 33 milliards de DH de devises au Maroc annuellement. Il a généré un chiffre d'affaires de 161 milliards de DH, une valeur ajoutée de 39 milliards de DH et emploie 161 000 personnes directement et indirectement». Lors de la seule la période 2014-2020, l'industrie agroalimentaire a contribué à créer plus de 91 000 emplois et a propulsé le chiffre d'affaires à l'export de 40% ! Cela, sachant qu'une enveloppe de 12 milliards de DH a été affectée au développement de ces industries, avec une mobilisation de 4 milliards de DH de la part de l'Etat. Ainsi, ce sont 283 investissements, répartis sur toutes les régions, d'un montant global de 8 milliards de DH, qui sont, actuellement, en cours d'accompagnement, à travers les mécanismes du Fonds de développement industriel et d'investissement (FDII) et le Fonds de développement agricole (FDA). Ils permettront de générer, à terme, plus de 21 000 emplois, des revenus de 23,5 milliards de DH et un chiffre d'affaires à l'export de 6,9 milliards de DH. Les 7 filières concernées par le contrat-programme (valorisation des fruits et légumes frais, industrie des pâtes et couscous, industrie de l'huile d'olive, industrie des viandes, transformation des fruits et légumes, industrie laitière et biscuiterie chocolaterie et confiserie) peuvent se targuer de réalisations appréciables. Hassan Khalil, président de l'Association marocaine des industries des pâtes alimentaires et couscous souligne : «L'industrie a créé 2 000 emplois directs et 4 000 indirects et la production annuelle a atteint 280 000 tonnes, dont 35 000 tonnes sont destinées à l'export». C'est dire la dynamique intéressante que connaît cette industrie, surtout après la mise en place du contrat programme. «Compte tenu de ces prouesses, nous nous penchons sur la création d'un label couscous, en collaboration avec l'Imanor, pour appuyer l'authenticité de ce produit marocain», souligne-t-il. De son côté, Rachid Sraidi, président de l'Association de biscuiterie, confiserie et chocolaterie, ne manque pas de rappeler que cette industrie génère des revenus de l'ordre de 7 milliards de DH, soit une croissance annuelle de 5,7% et l'équivalent d'un volume de production de 250 000 tonnes. Une progression remarquable certes, sauf que la consommation nationale moyenne reste faible, avec 4 kg/hab/an, comparativement à la Tunisie qui atteint 6 kg/hab/an ou encore l'Europe avec 14 kg. D'où le potentiel qui reste encore à exploiter dans cette industrie. Les autres industries ne sont pas en reste. Leur production s'est améliorée, autant que leur chiffre d'affaires à l'export, ou encore leur contribution à la création d'emplois. L'enjeu, actuellement, est de faire des produits marocains des produits compétitifs à l'international. D'ailleurs, Abdelmounim El Eulj, président de la Fédération nationale de l'agroalimentaire (Fenagri), précise que le secteur entre au stade de la compétitivité. Ce qui devra nécessiter des investissements dans la recherche & développement, mais aussi dans l'innovation, les ressources humaines, la logistique, la décarbonation pour davantage d'accès aux marchés européens, ainsi que la digitalisation. A côté de cela, il est essentiel de se préparer au marché local, pour inciter le consommateur marocain à se tourner plus vers le «made in Morocco». Pour ce faire, le secteur doit s'atteler sur l'amélioration de la valeur ajoutée et du rapport qualité/ prix. Des enjeux confirmés par Amine Berrada Sounni, PDG de la compagnie chérifienne de chocolaterie (Aiguebelle) qui précise que «les enjeux du secteur se trouvent dans l'innovation, la compétitivité et la R&D. Nous avons un consommateur exigeant et nous sommes face à des accords de libre-échange où la concurrence est rude. Ces enjeux sont donc une question de survie, mais aussi, une opportunité». Ainsi, pour pouvoir améliorer la compétitivité des produits marocains, M. El Alamy insiste sur la poursuite de la mise en place des écosystèmes et de les remettre en cause régulièrement, tout en gardant le fond des stratégies. «Il faut aider et accompagner l'investissement, être à l'écoute des besoins et former en fonction des attentes, et exploiter au maximum le marché local», signale-t-il. D'autant qu'il est nécessaire d'améliorer la logistique et la rendre accessible aux PME, en terme de coût. La décarbonation demeure un défi crucial à relever. «65% de nos exportations vont vers l'Europe, qui va instaurer une taxe carbone à partir de 2023. Les industriels exportateurs devront payer cette taxe à l'export s'ils ne déploient pas les moyens nécessaires pour réduire leur empreinte carbone et pour répondre aux exigences d'importations qui seront imposées», conclut le ministre. La balance commerciale devrait gagner 7 milliards de DH Plusieurs projets dans le secteur agroalimentaire ont vu le jour, dans le cadre de la banque de projet lancée par le ministère de l'industrie, pour la substitution de l'importation par la fabrication locale. Ainsi, 122 projets d'investissement dans le secteur agroalimentaire, d'un montant global de 3,7 milliards de DH, ont été validés. Ils devraient permettre de créer plus de 13 000 emplois et représentent un potentiel de chiffre d'affaires de 5,1 milliards de DH et 2,1 milliards de DH à l'export. Autrement dit, «le Maroc n'aurait plus à importer 5 milliards de DH et exporterait 2 milliards de plus. La balance commerciale du Maroc gagnerait alors 7 milliards de DH. Actuellement, nous importons l'équivalent de 183 milliards de DH en devises, de produits que nous sommes capables de réaliser sur le marché national. Ce qui représente un potentiel de substitution de 35 milliards de DH», précise le ministre.